Un « conseil » recommandera si un militaire en voie de radicalisation doit être radié

Jusqu’à une date récente, la loi permettait d’effectuer une enquête administrative pour s’assurer que le comportement d’une recrue ou d’un militaire candidat à un poste nécessitant une habilitation n’était pas incompatible avec la fonction ou l’affectation envisagée. Cependant, rien n’était prévu dans le cas d’un changement d’attitude de l’intéressé après son recrutement ou sa mutation.

Un amendement à la Loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme a remédié à cette lacune en autorisant l’ouverture d’une enquête administrative « lorsque le comportement d’une personne occupant un emploi ou titulaire d’une autorisation, agrément ou habilitation mentionnés […] laisse apparaître des doutes sur la compatibilité avec des missions, ou des activités au titre desquelles ils ont été délivrés. »

Pour un agent de la Fonction publique au sujet duquel une enquête a confirmé un comportement « incompatible avec les fonctions ou missions exercées », il peut être décidé un « retrait » ou une « abrogation, avec, le cas échéant, possibilité de suspension immédiate, en cas d’urgence. »

S’agissant d’un militaire susceptible de se trouver dans une telle situation, le texte précise qu’il sera « possible de l’écarter immédiatement du service au vu du résultat d’une enquête concluant à l’incompatibilité de son maintien en fonctions. »

Cela étant, la décision de radier un militaire « dont le comportement est devenu incompatible avec l’exercice de ses fonctions eu égard à la menace grave qu’il fait peser sur la sécurité publique » ne pourra être prise qu’après sa comparution devant un « conseil », présidé par un conseiller d’État et comprenant quatre officiers généraux issue des trois armées et de la Gendarmerie, le directeur des ressources humaines du ministère des Armées, un officier général « représentant la force armée ou la formation rattachée dont relève le militaire en cause » et d’un contrôleur général des armées de 1re section. C’est en effet ce que précise le décret n° 2018-135, publié par le Journal Officiel du 28 février dernier.

Ce texte precise que les rapporteurs de ce conseil seront « choisis parmi les officiers et les fonctionnaires de catégorie A du ministère de la défense, ayant accompli au moins cinq années de service public. »

Concrètement, et après avoir reçu les « pièces constitutives » de son affaire, le militaire mis en cause a un mois pour éventuellement présenter ses observations écrites à ce conseil, qui le convoquera par la suite.

Lors de son audition devant le conseil, le militaire concerné pourra se faire assister par une personne de son choix et demander à faire citer des témoins qui seront entendus séparément. Quant au président, il pourra « entendre toute personne qu’il juge utile au bon déroulement de la procédure. »

À l’issue, et si la majorité de ses membres estime que le comportement de ce militaire est effectivement « devenu incompatible avec l’exercice de ses fonctions », le conseil recommandera sa radiation des cadres ou la résiliation de son contrat soit auprès du ministre des Armées (pour les officiers sous contrat, les sous-officiers et les militaires du rang), soit auprès du président de la République (pour les officiers de carrière seulement).

En juin 2016, la Direction du Renseignement et de la Sécurité de la Défense (DRSD, ex-DPSD) avait indiqué suivre « en priorité » une « cinquantaine de dossiers de radicalisation » concernant de militaires sensibles à la propagande jihadiste. Cela étant, les dispositions du décret n° 2018-135 ne concerne pas seulement l’islam radical, mais aussi tout comportement potentiellement dangereux pouvant être lié à l’appartenance d’un mouvement extrémiste, quel qu’il soit.

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