Selon la DGSI, la menace d’attentats préparés par des jihadistes envoyés par Daesh en France reste « très sérieuse »

Le 13 novembre 2015, un commando envoyé par l’État islamique (EI ou Daesh) semait la terreur et la mort en plein Paris. Deux ans plus tard, l’organisation jihadiste a perdu la quasi-totalité des territoires qu’elle contrôlait dans le nord de l’Irak et en Syrie. Pour autant, a-t-elle perdu toute capacité d’envoyer des terroristes en France pour commettre de nouvelles attaques?

La menace d’attentats planifiés par des jihadistes encore présents au Levant reste « très sérieuse » en France, a estimé Laurent Nuñez, le patron de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), dans un entretien donné au quotidien « Le Figaro ».

« Le bruit de fond de cette menace est permanent. Ce qui nous préoccupe, ce sont toujours des projets d’attaques terroristes préparés par des équipes encore implantées dans les zones de combats, en Syrie et en Irak. Cette menace exogène, sur laquelle nous consacrons beaucoup de moyens, reste à nos yeux très sérieuse », a expliqué M. Nuñez.

Reste à voir si l’EI et al-Qaïda, qu’il ne faut pas oublier, ont encore la capacité d’envoyer un commando en France pour y commettre des attentats. Toute la question est là.

De telles attaques pourraient être le fait de « revenants », c’est à dire ces jihadistes français partis au Levant qui seraient sur le retout. « À ce jour, 244 hommes et femmes sont revenus, ainsi que 58 enfants. Les adultes, pour la plupart placés sous main de justice, sont tous suivis » par la DGSI, a précisé M. Nuñez.

Les chiffres qu’il a donnés sont toutefois différents de ceux avancés la veille par Gérard Collomb, le ministre de l’Intérieur. « D’après nos statistiques, 1.700 Français au total ont gagné la zone irako-syrienne depuis le début des combats. Environ 281 y sont présumés morts, 302 sont rentrés en France : 178 hommes, 66 femmes et 58 mineurs, dont la plupart ont moins de 12 ans. Parmi ceux-là, 120 hommes et 14 femmes sont incarcérés. Les autres sont tous suivis par nos services », a-t-il en effet confié au Journal du Dimanche.

Quoi qu’il en soit, « 686 hommes et femmes de nationalité française ou ayant résidé sur le territoire sont recensés sur zone [au Levant], à laquelle il convient d’ajouter 500 enfants », a précisé M. Nuñez. Mais « le scénario privilégié n’est pas celui d’un retour massif. […] Nous sommes désormais face à des combattants assez déterminés à rester sur les zones de repli de l’État islamique, dans l’hypothèse d’être projetés en Malaisie, en Indonésie ou en Afghanistan », a-t-il dit.

Par ailleurs, dans les colonnes du Journal du Dimanche, M. Collomb a soulevé la question des jihadistes susceptibles de venir de la bande sahélo-saharienne. « Nous avons de réelles inquiétudes sur cette zone. Pour les Français qui y résident ou y circulent, il faut une protection maximale. Notre priorité, c’est d’empêcher que des terroristes prennent la route des migrations en se mêlant aux réfugiés », a-t-il dit.

Cela étant, la menace d’attentats « endogènes », c’est à dire commis par des individus convaincus par la propagande jihadiste sans avoir pu rejoindre les zones de combat est évidemment le second « sujet de préoccupation » de la DGSI. D’autant plus que M. Nuñez s’inquiète de la « professionnalisation » de ces assaillants potentiels. Ainsi, lors des derniers démantèlement de cellules terroristes, il a été retrouvé des « tutoriels » téléchargés sur des sites de la mouvance jihadiste expliquant comment fabriquer des explosifs (du TATP en l’occurrence) ou encore des bombes artisanales avec une mise à feu complexe.

« À ce stade, l’hypothèse d’une attaque à la voiture piégée ou d’un attentat kamikaze ne peut être exclue, même si nous n’avons pas encore détecté de tels projets. Tout ce qui se passe sur les théâtres d’opérations est transposable sur notre territoire. Nous pouvons enfin craindre l’envoi de tutoriels très aboutis permettant à des « novices » de suivre une formation accélérée à la fabrication et l’usage d’explosif. Ce type de mode opératoire, exportable n’importe où, suscite toute notre attention », a expliqué le directeur du renseignement intérieur.

Au total, depuis 2013, « 46 attentats ont été déjoués, 17 ont échoué et 10 ont eu lieu », a souligné M. Nuñez. « La DGSI a procédé à 798 gardes à vue dans 581 dossiers judiciaires. 357 personnes ont été écrouées et 115 placées sous contrôle judiciaire », a-t-il ajouté.

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