Vers des tensions capacitaires de l’artillerie française après son engagement en Irak?

Après un redéploiement en vue de porter les derniers coups de boutoir contre les dernières positions tenues par l’État islamique (EI ou Daesh) dans le secteur d’al-Qaim (ouest de l’Irak), les quatre CAESAr (Camions équipés d’un système d’artillerie) mus en oeuvre par les artilleurs de la Task Force française Wagram ont effectué 24 missions de tirs la semaine passée.

Au total, depuis septembre 2016, la TF Wagram a 1.528 missions de tirs, ce qui correspond à la consommation de plus de 10.000 obus soit 10% de l’ensemble des munitions tirées par les 270 CAESAr en service dans le monde). Mais pas seulement. Lors de l’audition de Joël Barre, le Délégué général pour l’armement (DGA), le député Jean-Christophe Lagarde s’était inquiété de l’usure rapide des « tubes » [ou des canons, ndlr]. Et d’avancer le chiffre de 25, voire 30, rendus inutilisabes pour le moment.

Dans son rapport pour avis, le député Thomas Gassiloud a souligné le « suremploi » des 77 CAESAr en dotation dans l’armée de Terre. Et que 27 canons « sont trop usés pour être réemployés avant de lourdes opérations de maintenance. » En clair, l’engagement en Irak a « consommé » 35% du potentiel de ce type d’équipement.

D’où la question, posée maladroitement, du député Largarde au DGA. « Les canons CAESAr actuellement engagés de façon importante au Moyen-Orient s’usent vite quand on les utilise beaucoup. Or, à Bourges, il n’est possible d’en fabriquer que dix par an. Ce genre de difficultés se reproduit-il souvent dans notre outil industriel? », a-t-il demandé.

N’ayant pas eu de réponse, M. Lagarde est donc revenu à la charge. « Pour être plus précis, nous disposons de 75 canons [77 en réalité, ndlr] dont 25 ou 30 sont engagés en Irak et en Syrie [5, dont 1 en réserve et la TF Wagram n’est présente que sur le sol irakien, ndlr]. Or, le tube s’use en un an, mais nous ne pouvons les régénérer qu’au rythme de 10 par an. Autrement dit, si nous en utilisons 25 et n’en remplaçons que 10, nous perdons 15 canons par an. Est-ce le cas? », a-t-il insisté.

Malgré son insistance, le député n’a pas eu la réponse qu’il attendait. Si Mme l’ingénieur général de l’armement hors classe Monique Legrand-Larroche, qui accompagnait M. Barre, a admis que les CAESAr, « très employés, connaissent une usure rapide », elle n’a visiblement pas voulu en dire davantage. « Des travaux sont conduits pour les régénérer et en rééquiper nos armées », a-t-elle seulement ajouté. Ce qui fait quand même un peu court…

Dans son rapport, Thomas Gassiloud rappelle que le contrat opérationnel de l’armée de Terre prévoit « 109 canons de calibre 155 millimètres » [121 selon les chiffres clés de la Défense, ndlr] dont 32 canons AUF1 qui « risquent fort d’être indisponibles d’ici 2025 » et qui ne sont plus utilisés en opérations « en raison des contraintes opérationnelles que fait peser leur mobilité limitée sur les théâtres d’OPEX des dernières années. »

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