L’Allemagne en pince de plus en plus pour l’avion de combat américain F-35A

Il n’y a pas de fumée sans feu, dit-on. Aussi, quand, la semaine passée, Dirk Hoke, le Pdg d’Airbus Defence & Space, a pris sa plume pour faire valoir qu’acquérir des avions de combat auprès des États-Unis [sous-entendu, des F-35] « pourrait affaiblir l’industrie européenne de la défense et la rendre de plus en plus tributaire de la technologie américaine », c’est qu’il devait eu vent que quelque chose se tramait.

D’ailleurs, le 8 novembre, soit après avoir revendiqué le rôle de chef de file dans le projet avion de combat franco-allemand annoncé en juillet par M. Macron et Mme Merkel, Airbus a communiqué sur sa vision de ce que pourrait être un système de combat aérien du futur.

Cela étant, aucune annonce fracassante n’a été apportée, l’essentiel ayant déjà été dit en juin 2016, quand le groupe européen présenta les fruits d’une étude qui lui avait demandé le ministère allemand de la Défense au titre son programme « Next Genereration Weapon System », destiné à trouver un successeur au Panavia Tornado de la Luftwaffe.

Pour résumer, Airbus envisage un système reposant sur des appareils furtifs « habités », avec un long rayon d’action et une survivabilité accrue. Ces derniers seraient connectés à d’autres plateformes (avions de tout type, drones pouvant agir en essaim).

Seulement, développer un tel système prendra du temps. Même chose pour le projet franco-allemand d’avion de combat. Pour la France, il s’agit de remplacer les Mirage 2000D à l’horizon 2030, puis éventuellement les Rafale au cours de la décennie suivante. Quant à l’Allemagne, l’enjeu est de remplacer les Panavia Tornado à partir de 2025. En clair, le dossier est plus urgent de l’autre côté du Rhin.

C’est d’ailleurs pour cette raison que Berlin a demandé des informations relatives au F-35A de Lockheed-Martin ainsi qu’au F-15 et au F/A-18 de Boeing. Curieusement, alors que la Tranche 4 de l’Eurofighter Typhoon a également été considérée, Berlin n’a, semble-t-il, pas marqué le moindre intérêt pour le Rafale français, qui devrait être porté au standard F-4 d’ici 2025.

Mais, a priori, la messe serait sur le point d’être dite, à en croire les propos tenus par le général Karl Müllner, le patron de la Luftwaffe, pendant qu’Airbus présentaint son concept de système de combat aérien.

« Pour remplacer leurs Tornado, les forces allemandes ont besoin d’un avion de cinquième génération, difficile à détecter par les radars ennemis et capable de frapper des cibles à grande distance », a en effet affirmé le général Müllner. Ce qui signifie que le F-35A est dans ses petits papiers.

« Il s’agit vraiment de se donner une capacité de dissuasion. Parce que si vous avez la capacité d’envoyer un avion dans l’espace aérien d’un autre pays sans qu’il se fasse détecter, alors c’est un moyen de dissuasion incroyable », a-t-il plaidé.

« L’Allemagne a besoin d’un avion qui pourrait entrer en service vers 2025 », a insisté le général Müllner. Ce qui signifie qu’une autre solution ne sera pas prête avant ce délai. Toutefois, le chef de la Luftwaffe soutient le projet franco-allemand d’avion de combat pour… remplacer les Eurofighter Typhoon. Ce « programme aidera à préserver les compétences technologiques critiques en Europe , ce qui lui permettra de développer sa propre technologie », a-t-il avancé.

En attendant, c’est donc le F-35 qui tient la corde. Et le chiffre d’une commande d’un centaine d’appareils a été avancé. Et cela permettrait à l’industrie allemande « d’obtenir une part décente du travail sur le programme », fait-on valoir chez Lockheed-Martin.

« J’ai vu dans les médias qu’il y avait un intérêt pour le F-35, et nous sommes prêts à soutenir les autorités américaines pour leurs interactions avec le gouvernement allemand » sur ce dossier, a commenté Marillyn Hewson, PDG de Lockheed-Martin. lors d’un déplacement en Norvège, ce 9 novembre. « Je pense que c’est le meilleur choix pour eux [les Allemands] », a-t-elle ajouté.

En tout cas, si le Parlement allemand valide ce choix en faveur du F-35, ce serait un rude coup pour le camp français. Pour rappel, l’avion de Lockheed-Martin a déjà été choisi par le Royaume-Uni, le Danemark, l’Italie, les Pays-Bas et la Norvège. La Pologne compte en équiper sa force aérienne tandis que la Belgique et l’Espagne s’interrogent.

Mais ce n’est pas tout… Car le général Müllner a également évoqué l’achat d’avions de guerre électronique. Rappelant que l’Allemagne a pris l’engagement de fournir 14 appareils de ce type au milieu de la prochaine décennie, il a dit que cela supposerait d’en acheter au moins un vingtaine. Et là, ce serait le E/A-18 Growler, de Boeing, qui pourrait remporter les suffrages.

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