Le chef d’état-major des armées dit ne pas être un « otaniste forcené »

Si, lors de son audition, au début de ce mois, devant les députés de la commission de la Défense, le chef d’état-major des armées (CEMA), le général François Lecointre, a cité le général de Gaulle à deux reprises, ce n’était pas pour parler de l’Otan mais pour donner plus de force à son propos sur la place singulière que doivent tenir les armées au sein de la Nation.

« La défense! C’est là, en effet, la première raison d’être de l’État. Il n’y peut manquer sans se détruire lui-même » et « la France s’est faite à coups d’épées », sont en effet les deux citations que le CEMA a rappelées pour souligner sa conviction qu’une « grande démocratie » comme la France a « besoin d’une armée forte, sûre de ses valeurs et sûre de sa singularité – une singularité qui ne la sépare pas du reste de la Nation mais qui la complète. »

Répondant à une question du député communiste André Chassaigne sur la possibilité d’organiser « une véritable sécurité européenne tout en restant sous tutelle de l’Otan », le général Lecointre s’est voulu rassurant tout en tordant le cou à des idées reçues.

« Faites-moi confiance […] pour ne pas me soumettre à la tutelle de l’Otan. Je considère l’Otan comme une alliance objectivement indispensable mais je ne suis pas un ‘otaniste’ forcené », a répondu le CEMA.

« Je ne pense pas que dans le cadre indispensable de coopération internationale qu’est l’Otan nous soyons entraînés à nous soumettre à une tutelle excessive, et je puis vous rassurer : je porte, fortement, la voix de la France au comité militaire de l’Otan », a continué le général Lecointre.

Pour lui, la France garde toujours « une position singulière au sein de l’Alliance atlantique », en étant un « partenaire déterminé, important et crédible ». Car, a-t-il poursuivi, « sans nous, l’Otan perdrait de son crédit. »

La France « tient à faire entendre son point de vue, notamment pour ce qui concerne la nouvelle structure de commandement envisagée, et elle est déterminée à appeler tout le monde à la raison », a insisté le CEMA.

C’est ainsi que, a-t-il indiqué, Paris a présenté la candidature du général Denis Mercier, l’actuel commandant suprême de la transformation de l’Otan (SACT, l’un des deux principaux commandement avec celui des opérations), à la présidence du comité militaire de l’Union européenne. Et cela tant « pour faire entendre notre voix que pour montrer qu’il n’y a pas de contradiction à être ‘otanien’ et européen » car « pour assurer la défense de l’Europe, les deux organisations sont complémentaires », a expliqué le CEMA, qui fut à la tête de la mission européenne EUTM Mali, en 2013.

« Je pense qu’il faut être pragmatique. Ce sont les missions que nous conduirons qui permettront de définir un cadre de coopération; ce n’est pas un cadre de coopération créé ex nihilo qui conduirait à déterminer ensuite des missions communes », a encore fait valoir le général Lecointre. « À cet égard, la France se doit d’être à l’avant-garde de l’engagement de l’Union européenne en faveur de la stabilisation de l’espace euro-méditerranéen et de l’espace africain. Nous n’avons pas d’autre choix que celui-là », a-t-il estimé.

S’agissant de l’exercice Zapad 2017, qui, mené conjointement par la Russie et la Biélorussie, continue de faire couler beaucoup d’encore alors qu’il a pris fin il y a plus d’un mois, le général Lecointre a confirmé, sans toutefois donner de chiffres, que son ampleur a été supérieure à celle qui avait été annoncée par Moscou et Minsk.

« Il est vrai que les chiffres concernant le volume des troupes russes et biélorusses ayant participé à cet exercice ne sont pas anecdotiques », a-t-il dit. « L’Otan est, pour sa part, fort active, surtout depuis l’installation de la force de présence avancée renforcée dite Enhanced Forward Presence à laquelle la France participe actuellement au sein d’un bataillon franco-britannique », a-t-il rappelé.

« Nous prenons au sérieux et de façon mesurée la nécessité de contrôler ce qui se passe à l’Est de l’Europe. Nous prenons tout autant au sérieux notre rôle au sein de l’Otan, dont nous sommes, je le redis, l’un des principaux membres et l’un des plus crédibles », a conclu le général Lecointre sur cette question.

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