Syrie : Paris dénonce l’attitude de Moscou à l’égard du mandat des experts en armes chimiques

En juillet, Edmond Mulet, le rapporteur en chef de la commission conjointe ONU/OIAC [le JIM, pour Joint Investigative Mechanism, ndlr] chargée d’enquêter sur l’usage d’armes chimiques en Syrie, avait déploré des « pressions politiques » visant à orienter le travail de ses experts.

« Nous recevons, malheureusement, des messages directs et indirects en permanence de plusieurs directions nous expliquant comment faire notre travail. […] Certains messages sont très clairs et affirment que si nous ne faisons pas notre travail » selon leurs voeux, « alors ils n’accepteront pas nos conclusions », avait ainsi expliqué M. Mulet.

Les discussions portant sur le renouvellement du mandat du JIM au sein du Conseil de sécurité des Nations unies donnent un exemple de ces « pressions politiques ».

Le 26 octobre prochain, cette commission doit rendre ses conclusions sur les responsables de l’attaque chimique commise le 4 avril dernier à Khan Cheikhoun, en Syrie. Or, soutien de Damas, Moscou attend de voir le rapport du JIM pour se prononcer sur une éventuelle prolongation de son mandat.

Tel est, en tout cas, ce qu’a annoncé Mikhail Ulianov, un responsable du ministère russe des Affaires étrangères. Pour se justifier, il a trouvé « scandaleux » le fait que des experts du JIM ait refusé de prendre des échantillons prélevés à Khan Cheikhoun founis par les autorités syriennes, alors qu’ils visitaient la base d’Al-Shayrat, soupçonnée d’avoir servi à l’attaque chimique en question (ce qui a valu d’être visée par des missiles de croisière américains).

« Une enquête sérieuse est simplement impossible sans échantillon », a insisté M. Ulianov.

« Les Russes ont dit très clairement que si le rapport impliquait la Syrie, ils n’auraient soudainement plus confiance dans le groupe d’experts du JIM. On ne peut pas travailler comme cela », a réagi, le 18 octobre, Nikki Haley, la représentante des États-Unis auprès de l’ONU.

L’attitude russe a été aussi critiquée par la France. « Nous regrettons que la Russie remette en cause la qualité des travaux menés par les mécanismes d’enquête sur l’emploi d’armes chimiques en Syrie depuis que ceux-ci ont conclu à la responsabilité des forces armées et de sécurité syriennes », a déclaré Agnès Romatet-Espagne, porte-parole du ministère français des Affaires étrangères.

Ce n’est en effet pas la première fois que la Russie remet en cause les travaux du JIM, notamment en août 2016, quand ils pointèrent la responsabilité de Damas dans au moins trois attaques au chlore.

« Nous ne pouvons accepter que la crédibilité et l’indépendance de ces mécanismes soient contestées au motif que leurs conclusions ne conviennent pas à la Russie », a insisté Mme Romatet-Espagne, pour qui la méthodologie des experts du JIM est « indiscutable ».

« Il est de la responsabilité des États parties, y compris la Russie, de protéger la convention d’interdiction des armes chimiques et de s’engager pour n’accepter aucune impunité », a conclu la porte-parole du Quai d’Orsay.

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