Les armes chimiques nord-coréennes sont une « source d’inquiétude »

Si, ces derniers mois, les missiles et l’essai de bombes H nord-coréens focalisent l’attention de la communauté internationale, il ne faudrait pas perdre de vue que la Corée du Nord dispose également d’un important stock d’armes chimiques qu’elle pourrait utiliser dans le cas d’une intervention militaire contre ses installations nucléaires.

Selon l’International Crisis Group (ICG), basé à Bruxelles, l’arsenal nord-coréen se composerait de gaz sarin et tabun, d’ypérite, de phosgène et d’autres agents neurotoxiques de type VX. En tout, d’après l’organisation Nuclear Threat Initiative (NTI), la Corée du Nord aurait « approximativement 12 complexes où des produits chimiques, précurseur » sont stockés et « six entrepôts majeurs d’armes chimiques ».

Non signataire de la Convention internationale sur l’interdiction des armes chimiques, la Corée du Nord détiendrait entre 2.500 et 5.000 tonnes d’armes chimiques, ce qui la place, pour le moment, derrière les États-Unis et la Russie, pays qui ont par ailleurs annoncé leur intention de se débarrasser de leurs stocks respectifs (les Russes ont déjà commencé).

« Face au déséquilibre matériel américano-coréen, la Corée du Nord mise tout sur ses capacités asymétriques en développant un programme nucléaire, un programme balistique et une capacité chimique dont on parle très peu. Mais l’arsenal chimique de la Corée du Nord est un des plus importants au monde. Depuis peu, le régime développe aussi des cyber-capacités », expliquait récemment Antoine Bondaz, chercheur à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS), dans les colonnes de L’Obs.

Qui plus est, Pyongyang « exporte » son savoir-faire. Par le passé, l’Égypte, l’Iran et la Libye en auraient bénéficié. De même que la Syrie, récemment suspectée d’avoir reçu deux cargaisons de substances chimiques nord-coréennes dans un rapport des Nations unies.

Aussi, pour le directeur général de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), Ahmet Üzümcü, les armes chimiques nord-coréennes sont une « devraient être une source d’inquiétude pour la paix et la stabilité dans la péninsule coréenne et au-delà. » Et d’ajouter : « La communauté internationale devrait être préoccupée par la Corée du Nord en raison de son imprévisibilité. »

Pour M. Üzümcü, il est donc urgent de faire pression sur pousser la Corée du Nord à signer la Convention sur l’interdiction des armes chimiques. Ce qui, au passage, ne réglerait pas forcément le problème…

En tout cas, le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, s’y est employé, en envoyant des courriers à Pyonguang pour évoquer ce dossier. « Toutes les démarches ainsi que les demandes de rencontre avec les représentants nord-coréens sont malheureusement restées sans réponse », a déploré M. Üzümcü. « Ils ne voulaient pas nous rencontrer et discuter de ces questions », a-t-il insisté.

En avril, le Premier ministre japonais, Shinzo Abe, avait déjà soulevé la menace des armes chimiques nord-corénnes, affirmant qu’il était « possible que la Corée du Nord soit déjà capable de lancer une ogive contenant du sarin. »

Mais la menace d’un missile nord-coréen doté d’une ogive chimique tombant sur Séoul ou Tokyo n’est pas la seule. Fin septembre, Hamish De Bretton-Gordon, un expert passé par l’ex-Joint Chemical, Biological, Radiological and Nuclear Regiment britannique, a évoqué une autre hypothèse.

« Les chances que la Corée du Nord puisse fournir aux jihadistes une partie de leur capacité chimique ou nucléaire est une forte inquiétude en ce moment », a-t-il confié à NBC News, le 24 septembre. « Nous savons que les jihadistes ont beaucoup d’argent, et l’année dernière seulement ils ont tenté d’acheter de l’uranium fortement enrichi à des criminels russes pour 40 millions de dollars au kilogramme. Alors, est-ce que Kim Jong-un vendrait le VX mortel pour 40 millions de dollars au kilogramme? Je pense qu’il le ferait d’autant plus qu’il est acculé », a-t-il dit.

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