Le président Macron plaide pour une force d’intervention et un budget européens de la défense

Ce 26 septembre, le président Macron a donné le détail de ses « projets » pour « refonder l’Europe », à l’occasion d’un discours prononcé à la Sorbonne, à Paris. Considérant que la sécurité est l’une des « six clés de la souveraineté », le chef de l’État n’a pas été avare de propositions. Seront-elles réalisables? Pas sûr…

« En matière de Défense, notre objectif doit être la capacité d’action autonome de l’Europe, en complément de l’Otan », a affirmé M. Macron. « Ce qui manque le plus à l’Europe
aujourd’hui, à cette Europe de la Défense, c’est une culture stratégique commune », a-t-il ajouté.

Aussi, le président français souhaite que, « au début de la prochaine décennie », c’est à dire dans trois ans à peine, l’Europe soit « dotée d’une force commune d’intervention, d’un budget de Défense commun et d’une doctrine commune pour agir ». Et, pour faciliter le tout, il a proposé que les différentes armées nationales de l’Union européenne puissent accueillir dans leurs rangs des militaires venant d’autres pays membres.

S’agissant des forces d’interventions, il existe déjà des Groupements tactiques de l’Union européenne (GTUE), qui doivent être en mesure d’être déployés dans un délai de 10 jours et pour une période allant de 30 à 120 jours. Seulement, et alors que le cas s’était présenté lors de l’opération Serval, au Mali, jamais ces unités n’ont été sollicitées.

Pour bâtir une force d’intervention commune, plusieurs obstacles – et pas des moindres – sont à franchir. Au-delà des aspects culturels (des pays hésitent moins à intervenir que d’autres), il faudra régler un certain nombre de détails, à commencer par le commandement. En outre, le processus de décision pour envoyer des troupes sur un théâtre d’opérations extérieur n’est pas le même d’un pays à l’autre, ce qui complique la donne.

Si, en France, la boucle de décision est très courte (le président décide, le Parlement débat ensuite), il en va autrement en Allemagne, où le Bundestag doit d’abord donner son autorisation pour que soit possible le déploiement de la Bundeswehr. Qui plus est, encore faudrait-il qu’il y ait un consensus entre États sur la nécessité de déployer une telle force d’intervention (que l’on se souvienne des difficultés pour mettre en place EUFOR RCA, en Centrafrique… Finalement, ce fut grâce à la Géorgie et à une compagnie fournie par la France que cette force put voir le jour)

Autre obstacle : les règles d’engagement (Caveat) qui, là encore, sont différentes selon les États membres. « Si nous envoyions des soldats se battre là-bas, que se passerait-il? Au bout de quelques jours, le Bundestag enverrait un représentant vérifier que chaque soldat dispose bien d’une connexion Internet pour appeler sa famille. Puis rapidement se poserait la question de l’âge des soldats maliens qu’on encadrerait. Est-on sûr qu’aucun n’est mineur? Peut-on le prouver? Franchement, les Français ne se posent pas ce genre de questions quand ils envoient les ‘marsouins’ et c’est bien ainsi », avait expliqué, à propos de l’opération Serval, un officier allemand cité par le Bilan Stratégique du quotidien Le Monde.

S’agissant de l’idée d’un budget de défense commun, elle suscite une rafale de questions. Servira-t-il à financer les interventions? À acquérir des capacités? Comment sera-t-il abondé? Quels seront les montants des participations demandées? Comment seront déterminés les besoins?

Par ailleurs, M. Macron a également dit souhaiter que « le Fonds européen de défense » et « la coopération structurée permanente », approuvés en juin dernier les chefs d’État et de
gouvernement des pays membres de l’UE puissent voir le jour.

Sur les questions de terrorisme, M. Macron a proposé la création d’une académie du renseignement « pour renforcer les liens entre nos pays par des actions de formation et d’échange » ainsi qu’un « parquet européen contre la criminalité organisée et le terrorisme ».

Sur ce point, le renseignement ne consiste pas seulement à traiter des affaires liées « à l’internationale du terrorisme », pour emprunter l’expression utilisée par le président Macron. Le renseignement couvre un champ d’actions vaste, qui va de la vie économique au recueil d’informations militaires. Et, en général, dans ces domaines, les États n’aiment pas partager.

Enfin, M. Macron a émis l’idée de mettre en place une « force européenne de protection civile qui mettra en commun nos moyens de secours et d’intervention qui permettra ainsi de répondre aux catastrophes de moins en moins naturelles (sic). » Pour le coup, ce type d’initiative ne devrait pas poser de problème, les membres de l’UE ayant déjà l’habitude de coopérer dans ce domaine.

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