Al-Qaïda dans la péninsule arabique menace le transport ferroviaire américain et européen

Dans un entretien donné au Journal du Dimanche (édition du 6 août), le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, avait indiqué que la « menace terroriste restait très élevée » avant d’évoquer le cas des jihadistes de l’État islamique (EI) de retour en France (les returnees). « Nous en sommes à 217 personnes majeures et 54 mineures », avait-il précisé.

Mais le ministre a cité d’autres menaces, comme celle d’individus susceptibles « d’être téléguidés depuis l’étranger, notamment par al-Qaïda ». Seulement, M. Collomb n’alla pas plus loin sur ce point.

Avec les multiples attaques (ou tentatives) menée par des individus se réclamant de l’EI, on en aurait presque oublié qu’al-Qaïda cherche toujours à frapper les Occidentaux. Et pourtant, les frères Kouachi, auteurs du massacre de la rédaction de Charlie Hebdo, le 7 janvier 2015, affirmèrent avoir agi au nom d’al-Qaïda dans la péninsule arabique (AQPA), la branche probablement la plus dangereuse du réseau jihadiste fondé par Oussama Ben Laden.

C’est en effet dans sa revue de propagande « Inspire » qu’AQPA avait mis la tête à prix de Charb, le directeur de la rédaction de Charlie Hebdo. Publié régulièrement depuis 2010 dans une forme que renieraient pas les professionnels de l’édition, ce magazine électronique livre des modes opératoires aux militants de la mouvance jihadiste. Plusieurs d’entre-eux auraient été ainsi influencés de la sorte.

Dans son 17e numéro, Inspire appelle ses lecteurs à s’en prendre au transport ferroviaire aux États-Unis et en Europe, plus particulièrement en France et au Royaume-Uni. Trois modes opératoires y sont détaillés : l’attaque à l’intérieur d’un train (très probablement inspirée par celle, avortée, du Thalys, en août 2015), l’assaut d’une gare et le déraillement d’une locomotive.

Mais c’est surtout sur le troisième mode opératoire qu’insiste AQPA, en fournissant aux lecteurs d’Inspire des intructions pour construire un dispositif permettant de faire dérailler un train et similaire à « l’outil industriel » utilisé par les personnels technique des compagnies ferroviaires, l’idée étant de semer la confusion au sein des services de sécurité.

La branche yéménite voit dans le déraillement des trains plusieurs avantages. En premier lieu, une telle opération ne « nécessite pas le martyr » et elle peut donc être répétée. Ensuite, en raison de leur étendue, les réseaux ferroviaires sont difficiles à surveiller et à protéger. Mais surtout, cela aurait des conséquences économiques, comme cela fut le cas pour le transport aérien après les attentats du 11 septembre 2001.

« Il est temps que nous inculquions la peur et les contraignons à imposer des mesures de sécurité strictes aux trains comme ils l’ont fait avec leur transport aérien », fait valoir AQPA. « Nous devons menacer davantage les vulnérabilités de leur sécurité. Et quand ils dépensent des millions de dollars pour en traiter une, nous devons être prêts pour nous attaquer à une autre », ajoute l’organisation terroriste.

Cela étant, al-Qaïda a déjà commis un attentat contre le transport ferroviaire : celui de Madrid en mars 2004, avait fait 191 tués. Et l’on pourrait citer celui contre le métro de Londres, en juillet 2005. En outre, la police de New York déjoua, en 2009, un complot de l’organisation jihadiste qui prévoyait de faire dérailler un train de banlieue. Même chose en 2013, au Canada, avec l’arrestation de deux jihadistes, ayant reçu des instructions de membres d’al-Qaïda depuis l’Iran. En outre, les documents saisis dans son repaire, à Abbottabad [Pakistan], par les Navy Seals ont montré que Ben Laden s’intéressait aux effets économiques que de telles attaques pouvaient avoir.

En France, l’attaque empêchée par des militaires américains en permission et des civils courageux à bord du Thalys eut pour conséquences le renforcement des patrouilles des agents de la Sûreté ferroviaire, la mise en place de contrôles aléatoires des bagages, l’intensification des échanges d’information via le Système d’information Schengen(SIS) et l’installation de portiques à la gare du Nord et à la gare de Lille-Europe.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]