Le Hezbollah a lancé une offensive pour « nettoyer » la frontière libanaise de la présence jihadiste

Depuis août 2014, la région montagneuse d’Ersal, frontalière avec la Syrie, est une source de préoccupation majeure pour les autorités libanaises. Abritant plusieurs camps informels de réfugiés ayant fui la guerre civile syrienne, elle a été le théâtre d’affrontements meurtriers impliquant des jihadistes du Front Fateh el-Cham (Front al-Nosra à l’époque).

La raison de cette incursion jihadiste dans le « jurd » d’Ersal n’est pas encore claire, trois ans après les faits. L’arrestation, le 2 août 2014, d’Imad Ahmad Jomaa, un chef du Front al-Nosra, par les forces libanaises, en serait la cause. Mais d’après le général Jean Kahwaji, le chef d’état-major de l’armée libanaise, elle aurait été planifiée de longue date.

Quoi qu’il en soit, si la localité d’Ersal a fini par être évacuée par les jihadistes au bout de quelques jours de combat. Cependant, ces derniers ont pris position dans la région, emmenant avec eux plusieurs soldats et policiers libanais capturés lors des combats. Quatre d’entre eux seront assassinés et la libération de 16 autres sera obtenue après une médiation du Qatar, en décembre 2015.

Depuis, il y aurait environ millier de jihadistes de l’ex-Front al-Nosra et de l’État islamique présents dans le « jurd » d’Ersal. Leurs mouvements dans cette zone a donné lieu, ces derniers mois, à des tirs d’artillerie de l’armée libanaise. Mais c’est Hezbollah, appuyé par les forces gouvernementales syriennes, qui a visiblement pris les choses en main.

Ainsi, ces derniers jours, après plusieurs attaques ayant visé l’armée libanaise, l’aviation syrienne a effectué plusieurs raids aériens contre les positions tenues par les jihadistes dans le « jurd » d’Ersal, sans que l’on sache si les autorités libanaises ont donné ou non leur aval à ces bombardements. Dans le même temps, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a lancé un avertissement aux jihadistes en affirmant qu’ils représentaient « une menace pour tout le monde, y compris les réfugiés syriens » et affirmant qu’il « était temps de mettre fin à cette menace ».

Puis, le 21 juillet, la milice chiite a lancé une offensive dans cette région selon deux axes. « Le premier est celui du jurd de Flita (à l’ouest, en Syrie) et le second à partir de la chaîne de montagnes qui sépare le Liban de la Syrie, au nord-est du jurd de Ersal. Ce qui montre bien l’intention de ceux qui mènent l’offensive de couper le contact entre les deux zones pour piéger les combattants », a expliqué le quotidien libanais L’Orient-Le Jour.

Au bout de 48 heures, le « média de guerre », un organe de presse en ligne mis en place par le Hezbollah et l’armée syrienne, a indiqué que 68% du « jurd » d’Ersal était sous contrôle de la milice chiite, dont les secteurs de Wadi el-Khayl et de Kassarat, fiefs du Fateh el-Cham. Et le « jurd » de Flita, côté syrien, aurait également été « nettoyé » de la présence jihadiste.

Après une accalmie de quelques heures, le 23 juillet, le Hezbollah et ses alliés ont de nouveau progressé en direction des secteurs de Wadi Kamil, Wadi Hammoudi, Makaabat Fernn Baïdar, Chaabat Nahlé et de Wadi Dalil el-Barak.

De son côté, l’armée libanaise, soutenue par les Occidentaux (France et États-Unis en tête) pour faire contrepoids au Hezbollah, ne participe pas directement à cette offensive. Pour le moment, elle se limite à empêcher les jihadistes de se replier vers les zones habitées, comme cela a été le cas le 21 juillet, avec des tirs d’artillerie sur un « groupe terroriste qui tentait de s’infiltrer » dans l’une de ses positions dans les environs d’Ersal. Cela étant, aucun commentaire officiel n’a été fait sur son rôle dans l’opération en cours et le président libanais, Michel Aoun, a dit seulement « suivre les développements militaires ».

Quoi qu’il en soit, cette offensive du Hezbollah dans le « jurd » d’Ersal et le rôle effacé de l’armée libanaise suscitent des débats au sein de la classe politique libanaise, voire à de violentes polémiques, qui viennent relancer de plus belle, résume L’Orient-Le Jour, « la question concomitante des limites imposées au rôle de l’armée et à la souveraineté de l’État par la marge de manœuvre et de pouvoir de décision que s’octroie le parti chiite en matière de guerre et de paix. » Certains responsables estiment en effet la milice chiite « cherchera à exploiter sur le plan de la politique interne et régionale » ses gains militaires.

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