Selon Mme Parly, la Direction générale de l’armement devra trouver des « modes de financement innovants » pour équiper les armées

Le 6 juillet dernier, la ministre des Armées, Florence Parly, était invitée à s’exprimer devant les députés de la commission de la Défense. Et la lecture du compte-rendu de cette audition, qui vient d’être mis en ligne sur le site de l’Assemblée nationale, ne manque pas d’être savoureuse par moment, quand l’on connaît la suite des évènements…

Au moment où a eu lieu cette audition, et même si la rumeur courrait à l’époque, personne ne savait que le ministère de l’Action et des Comptes publics allait demander aux Armées de prendre financièrement à leur charge l’intégralité des coûts liés aux opérations extérieures (OPEX) et intérieures (OPINT) – soit 850 millions d’euros – alors que, en vertu de la Loi de programmation militaire 2014-2019 actualisée, ces derniers auraient dû faire l’objet d’un financement interministériel en fin de gestion.

D’où les propos tenus par le général Pierre de Villiers, alors chef d’état-major des armées (CEMA) lors de son passage devant la même commission qui avait entendu Mme Parly quelques jours plus tôt. Propos qui lui valurent les foudres d’un président Macron qui confondit autorité avec autoritarisme, oubliant (ou ignorant) l’article D3121-9 du Code de la Défense, lequel précise exactement les prérogatives et devoirs d’un CEMA.

Cela étant, évoquant, devant les députés, la perspective de cet effort budgétaire qui ne manquerait pas d’être demandé à son ministère, Mme Parly a dit, au sujet du général de Villiers, lors de son audition du 6 juillet : « Il a raison de considérer qu’il faut trouver les financements pour les OPEX et, en même temps, assurer la régénération de l’équipement des armées. » Et d’ajouter : « Nous ne sommes pas en désaccord sur ce point. »

« L’une des difficultés de l’élaboration du budget pour 2018 tient au fait que le socle budgétaire de 2017 ne comporte pas tous les effets en année pleine liés aux décisions prises après l’attaque du Bataclan ou et autres événements importants survenus pendant l’année 2016 », a également expliqué Mme Parly.

« Pour mon collègue Gérald Darmanin [le ministre de l’Action et des Comptes publics, ndlr], c’est de l’argent frais qu’il va falloir trouver; mais, de mon point de vue, ce n’est pas de l’argent frais puisqu’il s’agit de financer des opérations déjà engagées et sur le financement desquelles nous ne disposons d’aucune marge de manœuvre, à moins de les interrompre », a continué la ministre, avant d’admettre que « des mesures d’ajustement pourraient néanmoins être décidées dans l’immédiat afin de tenir compte des impasses budgétaires mises en lumière par la Cour des comptes. »

« Nous avons également un ‘matelas’ […] de crédits de paiement qui correspondent à des programmes engagés mais dont la trésorerie, en quelque sorte, en termes de crédits budgétaires, peut-être plus ou moins pilotée ; à ceci près que, au bout d’un certain temps, il faut tout de même payer. Si on ne le fait pas, on finit par payer des intérêts moratoires, on crée des situations délicates pour un certain nombre d’entreprises, etc. Nous restons donc très attentifs à ce qu’on ne majore pas les reports en question », a ensuite avancé Mme Parly.

« Quoi qu’il advienne, je puis vous assurer que nous sommes pleinement engagés pour protéger au mieux les moyens prévus pour 2017, car nous avons parfaitement conscience que les années 2017 et 2018 se tiennent : diminuer les moyens décidés pour 2017 rendra d’autant plus difficile le financement de ceux de l’année 2018 », a fini par faire valoir la ministre. En clair, la forte hausse promise du budget des armées en 2018 sera en partie amputée par les coupes effectuées cette année.

En général, quand le ministère des Armées doit faire des économies, il n’a pas 36 solutions : il les prélève sur le programme 146 « Équipement des forces », c’est à dire sur le budget géré par la Direction générale de l’armement (DGA).

Et Mme Parly a indiqué que la « réforme de la DGA sera […] un élément déterminant » pour le renouvellement des matériels par « l’entrée en service de nouvelles générations d’équipements permettant un réel saut technologique. »

« Nous allons prochainement désigner un nouveau DGA [Délégué général pour l’armement, ndlr] qui aura pour mission non seulement d’améliorer la qualité et de veiller à la modernité de nos équipements, mais également d’engager une profonde transformation visant à trouver des modes de financement innovants pour accélérer le renouvellement des matériels », a annoncé la ministre, sans plus de précision.

Quelles seront donc ces « modes de financement innovants » qu’aura à trouver le successeur de Laurent Collet-Billon, l’ex-Délégué général pour l’armement, dont le mandat a pris fin le 30 juin dernier? Va-t-on assister au retour des « sociétés de projet« , rendues possibles par la loi pour la croissance et l’activité (dite « loi Macron ») voté en 2015?

Pour rappel, afin de remédier au retard de la vente aux enchères de fréquences hertziennes aux opérateurs de télécommunications, l’ancien ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, avait imaginé un dispositif – très critiqué – reposant sur des « sociétés de projet » qui, grâce à l’apport de capitaux publics et privés, auraient acheté des équipements pour ensuite les louer aux armées.

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