La Turquie veut coopérer avec le consortium franco-italien Eurosam pour sa défense aérienne

C’est à en perdre son latin, tant ce dossier aura donné lieu à maints rebondissements. En 2013, la Turquie annonça son choix en faveur du système de défense aérienne chinois Hongqi-9/FD 2000, aux dépens du consortium franco-italien Eurosam (SAMP/T ou Mamba) et du tandem américain Raytheon/Lockheed-Martin (Patriot PAC-3).

Seulement, la décision turque, motivée par le coût avantageux du système chinois (qui est une copie du S-300 russe) et les gains industriels attendus, prêta le flanc à la critique. Ainsi, pour l’Otan, le Hongqi-9/FD 2000 ne pouvait pas être compatible avec ceux mis en oeuvre par les Alliés, sauf à livrer à son fabricant, CPMIEC (China Precision Machinery Export-Import Corporation), des données confidentielles, comme par exemple les codes IFF (amis/ennemis).

Puis, des désaccord apparurent entre Ankara et Pékin sur la mise en oeuvre du contrat, en particulier sur la question du partage de la charge industrielle. En 2014, le président turc Recep Tayyip Erdogan alla même jusqu’à évoquer des discussions en cours avec la France au sujet du SAMP/T d’Eurosam, arrivé second de l’appel d’offres. « La production conjointe est importante », avait-il souligné.

Était-ce une manoeuvre pour faire plier la partie chinoise? Toujours est-il que, un an plus tard, le ministère turc de la Défense confirma le choix du Hongqi-9/FD 2000 dans le cadre de son programme T-Loramids… avant finalement d’y renoncer officiellement quelques mois plus tard. Et d’annoncer le lancement d’un « projet national » confié aux entreprises turques Aselsan (électronique) et Roketsan (missile), avec le « soutien d’un système d’armement mondialement reconnu ».

Puis, moins d’un an plus tard, à la faveur du spectaculaire rapprochement entre Moscou et Ankara, l’on apprenait que le système de défense aérienne russe S-400 « Triumph » (code Otan : SA-21 Growler) suscitait l’intérêt de l’état-major turc. En février dernier, e ministre turc des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, alla jusqu’à affirmer, selon l’agence russe TASS, qu’un accord était sur le point d’être trouvé. Mais Fikri Isik, son homologue de la Défense, se montra nettement plus prudent.

« La Turquie a besoin d’un système de défense antimissile et a lancé un programme dans le but de développer une solution nationale. Ce programme prend du temps, donc nous avons discuté avec différents pays pour répondre à cette exigence urgente. Et il semble que la Russie est le candidat le plus approprié pour satisfaire les besoins du pays. Toutefois, nous ne sommes pas encore en mesure de signer un accord demain », avait expliqué M. Isik.

En juin dernier, Sergueï Tchemezov, le président du conglomérat russe Rostec, déclara que les négociations « concernant les détails techniques du contrat sur les S-400 » entre Moscou et Ankara étaient « quasiment terminées » et que les discussions portaient désormais sur les aspects financiers.

On en était donc là quand, le 14 juillet, à l’occasion d’une réception donnée à l’ambassade de France en Turquie, le ministre turc de la Défense a annoncé un accord préliminaire avec le consortium Eurosam, constitué par Thales et MBDA, sur la « production conjointe de systèmes de défense. »

« Je suis heureux d’annoncer que cet après-midi, la Turquie a signé un accord de coopération avec le consortium franco-italien Eurosam pour produire des systèmes de défense antimissile », a en effet déclaré le ministre.

Selon cet accord, les entreprises turques et Eurosam produiront ensemble des systèmes Sol-air de moyenne portée/terrestre (SAMP/T). Ce dernier, en service au sein des forces françaises et italiennes,  fonctionne avec le missile Aster 30 et dispose d’un rayon d’action supérieur à 100 km. Son radar Arabel, d’une portée de 120 km, est capable de suivre jusqu’à 100 cibles simultanément.

Cela étant, le projet d’acquérir des S-400 russes n’est pas abandonné. L’agence Bloomberg a ainsi indiqué, le 13 juillet, qu’Ankara avait accepté de payer 2,5 milliards de dollars à Moscou pour acquérir 4 systèmes S-400. L’accord prévoit la livraison de deux premiers exemplaires – fabriqués en Russie – d’ici la fin de l’année 2018 et la production, en Turquie, des deux derniers.

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