La famille d’un élève officier de l’ESM Saint-Cyr, retrouvé mort au camp de La Courtine, porte plainte

Le 9 février 2016, le corps du sous-lieutenant Michaël Lavocat, 22 ans, élève officier de l’École spéciale militaire de Saint-Cyr Coëtquidan, était retrouvé sans vie, le front collé à un fusil Famas dressé à la verticale, dans le baraquement 74 du camp de La Courtine (Creuse) où il effectuait, avec ses camarades, son dernier stage d’entraînement.

Tout indiquait alors que le jeune homme s’était donné la mort avec son arme de service. La disparition de son père, quelques jours plus tôt, fut alors avancée par le procureur de la République de Guéret, Sébastien Farges, pour expliquer ce « geste désespéré ».

Seulement, il s’avéra, plus tard, que le père de l’élève officier était bel et bien en vie. Ce qui donna lieu à un rebondissement dans cette affaire, le parquet de Guéret ayant décidé de la requalifier en « provocation au suicide. »

« Le suicide ne fait matériellement pas de doute mais l’enquête a évolué car les motivations sont curieuses », avait expliqué le procureur. Et d’ajouter qu’il s’agissait alors de donner un « cadre plus large à l’enquête, même s’il n’y aucune raison de penser que quelqu’un a délibérément poussé ce jeune homme au suicide. »

En mai de la même année, l’enquête judiciaire était finalement classée sans suite. Tout comme celle, dite de commandement, ordonnée par Jean-Yves Le Drian, alors ministre de la Défense.

D’après les investigations menées à l’époque, il fut établi que le sous-lieutenant Lavocat, souffrant d’un « mal-être », voire de « détresse », avait longuement mûri son acte, ayant cherché sur Internet des informations sur les doses mortelles de certains médicament et gardé sur lui pendant une quinzaine de jours une cartouche de 5,56 mm, subtilisée lors d’une séance de tir. L’étui de cette dernière, portant le lot des munitions utilisées à cette occasion, fut retrouvé près du corps.

Pour autant, plus d’un an plus tard, ces explications sont toujours loin de convaincre la famille du sous-lieutenant Lavocat, d’autant plus que certaines zones d’ombres n’auraient toujours pas été éclaircies. Déjà, sa mère avait confié au journal « Les Dernières Nouvelles d’Alsace » qu’elle ne croyait pas à la thèse du suicide. « Tout allait bien pour Michael, il n’était pas déprimé, il avait une petite amie, des projets, il allait être diplômé », avait-elle dit.

Aussi, la famille du sous-lieutenant a décidé de porter plainte contre 8 fonctionnaires, dont 2 colonels et un capitaine, pour « entrave à la saisine de la justice. »

Selon Le Parisien, le défaut de réponses à certains faits a motivé le dépôt de cette plainte. Ainsi, environ une heure avant sa mort, deux camarades du sous-lieutenant Lavocat auraient tenté de le joindre par téléphone, alors qu’il n’avait jamais reçu, auparavant, d’appels de leur part. Le quotidien avance que « le binôme a dissimulé étrangement son appel, alors que le portable du défunt n’a pas encore été exploité. » Et de se demander pourquoi.

En outre, aucun fragment de balle n’aurait été recueilli sur les lieux du drame (ce qui n’est pas surprenant quand une arme est utilisé à bout touchant). Or, toujours d’après Le Parisien, des fragments auraient bel et bien été récupérés lors du nettoyage de la scène avant d’être jetés. Nettoyage qui aurait été effectué alors que les auditions étaient toujours en cours. D’où l’accusation de « modification d’état des lieux d’un crime ou d’un délit » portée par la famille.

Enfin, l’annonce de la mort de son père par l’élève officier reste un mystère. Interrogé par Le Parisien, Daniel Lavocat, ancien sous-officier des Transmissions, ne croit pas au suicide de son fils.

« J’ai été chef de section pendant 15 ans. Quand vous avez un décès dans la famille d’un de vos hommes, le minimum, c’est de vérifier si c’est vrai. Il y a un protocole à respecter : vous avertissez le capitaine, le chef de corps. Le médecin vient rendre visite à la personne pour voir s’il peut continuer son service. L’assistance sociale est également prévenue. Là, rien de tout cela n’a été fait. Pourquoi? », demande Daniel Lavocat.

« Pour moi, c’est un scénario monté de toutes pièces. Mon fils était un battant comme moi, quelqu’un de très volontaire, de très actif. Mais aussi de très posé. Dans ce dossier, il y a beaucoup de zones d’ombre. Pour moi, mon fils a vu quelque chose qu’il n’aurait pas dû voir ou a fait quelque chose qu’il n’aurait pas dû faire », a-t-il ajouté.

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