Sans surprise, la France ne signera pas le traité interdisant les armes nucléaires adopté aux Nations unies

Après plusieurs semaines de négociations portées par l’Autriche, le Brésil, le Mexique, l’Afrique du Sud et la Nouvelle-Zélande, un traité visant à interdire les armes nucléaires a été adopté, le 7 juillet, par 122 pays membres des Nations unies ayant pris part aux discussions. Les Pays-Bas, membres de l’Otan, ont voté contre.

« Nous allons quitter cette salle aujourd’hui avec la satisfaction du devoir accompli, (…) forts du désir des peuples du monde entier de forger un monde sans armes nucléaires », a commenté Elayne Whyte Gómez, la réprésentante du Costa Rica, qui présidait la Conférence des Nations unies pour la négociation d’un instrument interdisant les armes nucléaires. « C’est un message historique pour l’humanité », a-t-elle ajouté. « Nous sommes sur le point de dire à nos enfants que, oui, il est possible d’hériter d’un monde exempt d’armes nucléaires pour les générations futures », a-t-elle encore insisté.

Désormais, ce traité, qui préconise une interdiction totale du développement, du stockage et de la menace d’utilisation d’armes nucléaires, sera ouvert à ratification à partir du 20 septembre. Il entrera en vigueur une fois que 50 pays l’auront signé et il se n’appliquera qu’aux signataires.

D’où sa portée purement symbolique étant donné que les puissances nucléaires, déclarées ou non, qui n’ont pas participé à cette conférence, ne le signeront pas. Pas plus que le Japon, seul pays à avoir subi une attaque nucléaire en 1945, et les États membre de l’Otan, qui est aussi une alliance nucléaire.

« Cette initiative ignore clairement les réalités de l’environnement sécuritaire international », ont fait valoir, par un communiqué conjoint, la France, les Etats-Unis et le Royaume-Uni.

Une source diplomatique de l’un des pays opposés à ce traité, citée par l’AFP, a estimé que c’était « donner de faux espoirs » par rapport à « ce qui est vraiment possible en matière de désarmement nucléaire. » Et d’ajouter : Ce texte « va seulement affaiblir le régime de non prolifération mondial » alors que l’idée d’un désarmement « progressif » aurait été « préférable ».

Cinq puissances nucléaires sont reconnues comme telles par le Traité de non prolifération (TNP), à savoir la France, le Royaume-Uni, les États-Unis, la Russie et la Chine. Pour ces dernières, leur arsenal a une vocation dissuasive. L’on compte également l’Inde, le Pakistan et Israël, qui ne sont pas partie prenante au TNP, ainsi que la Corée du Nord, qui s’en est retiré.

Selon un rapport du Sénat, « début 2016, ces 9 États possédaient environ 15.395 armes nucléaires, dont 4.120 déployées avec des forces opérationnelles. Quelque 1.800 sont maintenues en état d’alerte opérationnelle élevée. »

Pour la diplomatie française, ce traité est « inadapté au contexte sécuritaire international, caractérisé par des tensions croissantes et la prolifération des armes de destruction massive, dont témoigne notamment la menace nucléaire nord-coréenne. »

« La France n’a pas participé aux négociations de ce traité et elle n’entend pas y adhérer. Ce traité ne nous lie pas et ne crée pas de nouvelles obligations. La décision d’un grand nombre d’Etats, dotés, possesseurs ou non d’armes nucléaires, de ne pas participer aux négociations, en Europe et en Asie notamment, illustre avec force ce décalage », a rappelé cette source.

Et de rappeler que la « politique de sécurité et de défense de la France […] repose sur la dissuasion nucléaire », qui vise à protéger notre pays de toute agression d’origine étatique contre ses intérêts vitaux, d’où qu’elle vienne, et quelle qu’en soit la forme. » Et, ajoute le Quai d’Orsay, « le contexte international n’autorise aucune faiblesse. »

Pour Paris, qui estime que « désarmement nucléaire ne se décrète pas » mais qu’il « se construit », ce traité risque non seulement « d’affecter la sécurité de la région euro-atlantique et la stabilité internationale » mais aussi de « fragiliser le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, pierre angulaire du régime de non-prolifération. »

Enfin, le Quai d’Orsay a également fait valoir que la France a déjà réduit de moitié son arsenal nucléaire, mis un terme à ses essais nucléaires et fermé « de manière irréversible ses installations de production de matières fissiles pour des armes nucléaires. »

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