Le Canada annonce un plan pour augmenter ses dépenses militaires de 70% d’ici 10 ans

Actuellement, le Canada alloue un peu moins de 1% de son PIB à ses forces armées, lesquelles disposent d’un budget annuel de 18,9 milliards de dollars canadiens. En 2026, ce dernier aura augmenté de 70% pour atteindre 33 milliards (soit 1,4% du PIB). Tel est l’ambition dévoilée [.pdf] le 7 juin par par Harjit Sajjan, le ministre canadien de la Défense. Cela étant, son niveau restera en deçà de l’objectif des 2% fixé par l’Otan et auquel Ottawa a souscrit en septembre 2014, lors du sommet de Newport [Pays-de-Galle].

Quoi qu’il en soit, cet effort en matière militaire reste conséquent. Comme l’a expliqué M. Sajjan, il s’agit de faire en sorte que l’armée canadienne soit « forte au pays, à l’aise au sein de l’Amérique du Nord et capable d’assumer ses responsabilités internationales », d’autant plus que les tensions entre les puissances mondiales sont croissantes, que la nature des conflits est différente et que les avancée technologiques sont très rapides.

Le projet présenté par M. Sajjan recèle quelques surprises. Ainsi, le format de l’aviation de chasse canadienne va être revu à la hausse, avec l’acquisition de 88 nouveaux avions de combat alors que, jusqu’à présent, il n’était question d’en commander que 65 pour remplacer les CF-18 Hornet.

Il prévoit également le remplacement des ravitailleurs CC-150 Polaris ainsi que celui des avions de patrouille CP-140 Aurora. À cette liste, il faut aussi ajouter l’investissement dans des drones MALE, capables de mener des missions de surveillance et de frappes de précision.

Pour les forces terrestres, le plan parle d’acquérir de nouveaux véhicules blindés léger et surtout d’améliorer ses capacités pour « effectuer des opérations dans les régions éloignées » et intervenir dans le Grand Nord. Quant aux forces spéciales, leurs effectifs augmenteront (+605 opérateurs) et elles se verront doter de nouveaux systèmes de renseignement aéroportés et de nouveaux outils de surveillance et de reconnaissance. »

Quant à la Marine royale canadienne, elle ne verra pas le nombre de ses sous-marins augmenter, comme l’avait récemment proposé un rapport du Sénat et devra donc se contenter de la modernisation de ses 4 bâtiments de la classe Victoria, lesquels ont plus souvent été à quai qu’en mission… Cependant, elle disposera de 15 nouveaux navires de combats, 5 à 6 patrouilleurs et 2 bâtiments de soutien interarmées.

Seulement, ces annonces ne sont pas nouvelles. Le projet de remplacer les 12 frégates de la classe « Halifax » ainsi que les 3 destroyers de type « Iroquois » par 15 navires de surface modernes avait été mis sur la table en 2008, par le gouvernement conduit par le conservateur Stephen Harper. Et, 9 ans plus tard, non seulement le dossier n’a pas avancé d’un iota mais son coût a explosé, passant de 26 à 62 milliards de dollars CAN, selon un étude récente du directeur parlementaire du budget (DPB).

« Les bateaux sont hautement technologiques, et c’est surtout le coût associé à l’inflation et la croissance technologique qui a fait exploser le prix à ce point-là. Très régulièrement, on sous-estime dès le départ le coût et les systèmes requis pour avoir des navires modernes », a expliqué Jean-Denis Fréchette, le DPB. D’après le Journal de Montréal, la construction de ces navires doit commencer en 2021 et « chaque année de retard gonflerait la facture d’au moins 4 milliards CAN. »

Par ailleurs, et outre la hausse des effectifs prévue pour les forces spéciales, les forces canadiennes recruteront 3.500 nouveaux militaires d’active, 1.500 réservistes et 300 personnels de plus pour le renseignement (dont 180 postes civils). Et, d’ici 2026, la part des femmes dans les effectifs sera portée à 25%.

« La politique Protection, Sécurité, Engagement comprend les coûts complets et est entièrement financée. Elle démontre l’engagement du gouvernement du Canada à fournir aux militaires canadiens les soins et le matériel dont ils ont besoin et elle donne aux Forces armées canadiennes sur une base solide pour l’avenir. Je suis confiant que ces investissements auront un impact direct et positif sur nos militaires et leurs familles », a fait valoir Harjit Sajjan.

À noter également que le Canada ne se contentera plus d’une posture défensive dans le cyberespace. Le projet de M. Sajjan évoque la possibilité de lancer des « cyberopérations actives » contre des adversaires potentiels, dans le cadre d’opérations militaires préalablement approuvées.

Reste à maintenant à voir si ce plan entrera dans les faits, contraiement à ceux qui avaient été précédemment annoncés… Le ministre canadien de la Défense a assuré que son financement sera « pérenne et prévisible, parce que c’est ce que souhaite la défense. » Et M. Sajjan d’insister sur le fait que ces hausses budgétaires seraient « pleinement financées » et « rigoureusement chiffrées », sans pour autant préciser si des coupes seront opérées dans d’autres budgets ou si Ottawa aura recours au déficit.

Cela étant, les engagements pris par le gouvernement Trudeau ne l’engageront que s’il est reconduit à l’issue des prochaines élections : l’essentiel de cet effort en matière de défense se fera en effet à partir de 2019…

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