Selon Moscou, la branche afghano-pakistanaise de l’EI recevrait des armes livrées par des avions non identifiés

Depuis quelques mois, la Russie est accusée par des responsables américains et afghans d’apporter un soutien au mouvement taleb, notamment via des livraisons d’armes. D’ailleurs, le chef du Pentagone, l’ex-général James Mattis, avait évoqué cet appui lors d’un déplacement à Kaboul, en avril.

« Nous engagerons un dialogue diplomatique avec la Russie. Nous le ferons où nous pouvons, mais il nous faudra nous confronter à la Russie là où elle agit à l’encontre du droit international et là où elle enfreint la souveraineté des États », avait en effet déclaré le secrétaire américain à la Défense. Et de préciser que la livraison d’armes depuis un pays étranger vers l’Afghanistan était justement une « violation du droit international. »

En soi, ces accusations ne sont pas surprenantes au regard des propos tenus à plusieurs reprises par le diplomate russe Zamir Kaboulov. En décembre 2015, il avait en effet affirmé que les intérêts de la Russie et ceux des taliban « coïncidaient objectivement » dans la lutte contre l’État islamique (EI).

D’autant plus que, pour Moscou, les taliban sont moins dangereux que les jihadistes de l’EI dans la mesure où leurs objectifs sont d’essence nationaliste et qu’ils n’ont donc pas l’intention de « faire le jihad » ailleurs qu’en Afghanistan. Et cela, même si le chef d’al-Qaïda, Ayman al-Zawahiri, a renouvelé son allégeance à celui du mouvement taleb afghan.

« Les talibans ont abandonné le djihad mondial et sont devenus une force nationale », fit encore valoir , il y a quelques semaines, M Kaboulov, peu avant la tenue d’une conférence internationale sur l’Afghanistan, à laquelle les États-Unis ne prirent pas part.

Cela étant, Moscou a toujours réfuté les accusations américaines et afghanes sur des livraisons d’armes aux taliban. Elles sont « sans fondement », avait répondu Sergueï Lavrov, le ministre russe des Affaires étrangères, en avril.

C’est donc dans ce contexte que la diplomatie russe a publié, le 30 mai, un communiqué lourd de sous-entendus. Ainsi, via ce texte, Moscou interroge l’Otan et les États-Unis au sujet d’avions « non identifiés » qui aurait parachuté, « à plusieurs reprises », en mai, « des armes et d’autres matériels militaires » aux combattants de l’EI implantés dans la province afghane de Jowzjan.

Et des hélicoptères, également non-identifiés, auraient été répérés dans la province de Ghazni, précisément dans les districts de Waghaz et de Khogyani, où la présence de l’EI a été signalée.

« À cet égard, une question vient naturellement aux représentants susmentionnés de l’Otan et des États-Unis : connaissent-ils l’appartenance des avions non identifiés dans le ciel de l’Afghanistan, un pays qui depuis plus de 15 ans abrite des militaires des États-Unis? », a interrogé la diplomatie russe. Mais demander une telle chose revient à accuser, a minima, les Occidentaux de fermer les yeux sur ces livraisons d’armes. De quoi subtilement nourrir la théorie du complot sur les origines de l’EI…

D’autant plus que M. Lavrov a abordé le sujet, lors d’une conférence de presse donnée à l’issue d’une rencontre avec Harry Kalaba, son homologue zambien. « Il existe des preuves que ces hélicoptères ont laissé tomber quelque chose dans ces zones, des hélicoptères sans identification ont atterri dans ces zones, puis en ont décollé… Des témoins confirment qu’ils sont retournés dans les bases où il y avait des troupes américaines, entre autres. Cela soulève des questions », a-t-il lâché.

Seulement, si M. Lavrov parle de « preuve », il ne les a pas produites. En outre, il est question d’avions et d’hélicoptères dont le type n’a pas été précisé alors que cela serait susceptible de donner une indication sur leur origine. Quoi qu’il en soit, depuis la diffusion de ce communiqué par son ministère, l’Otan et Washington n’ont pas répondu aux sous-entendus de Moscou. En tout cas, pour ce qui concerne les Américains, les seules munitions livrées à l’EI l’ont été par des chasseurs-bombardiers et des AC-130. L’une d’elles, la MOAB (la mère de toutes les bombes) a même fait beaucoup de bruit

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