L’administration Trump entend faire respecter la liberté de navigation en mer de Chine méridionale

Durant la course à la Maison Blanche, Donald Trump avait adopté un ton très offensif à l’endroit de la Chine, en l’accusant d’avoir des pratiques commerciales déloyales et de « voler » des millions d’emplois aux États-Unis. Puis, une fois élu président, il a mis un peu d’eau dans son vin dans la mesure où l’appui de Pékin est d’une importance capitale dans le dossier nord-coréen. Mieux même : les deux pays ont signé, le 12 mai, un accord sur les exportations américaines de boeufs et de gaz naturel, ainsi qu’un autre sur le secteur financier.

Pour autant, s’agissant des revendications territoriales en mer de Chine méridionale, dont la quasi totalité est revendiquée par Pékin malgré un avis défavorable de la Cour permanente d’arbitrage (CPA) de La Haye, l’administration Trump suit visiblement la même ligne que celle fixée par celle de M. Obama, laquelle consistait à refuser toute politique du fait accompli en défendant la liberté de navigation dans cette région stratégique et en encourageant les différentes parties à négocier leurs différends territoriaux.

Car, en effet, Pékin a aménagé plusieurs récifs des îles Spratleys et Paracels à des fins militaires, notamment en y installant des capacités de déni d’accès et d’interdiction de zone (Anti-Access/Area Denial ou A2/AD). Ce qui pourrait avoir un impact sur la navigation civiles, sachant que la mer de Chine méridionale est carrefour de routes maritimes essentielles au commerce mondial.

Sous l’ère Obama, l’US Navy avait envoyé des destroyers patrouiller à moins de 12 milles de certains récifs accaparés par Pékin. En agissant ainsi, les États-Unis montraient qu’ils ignoraient de facto les prétentions chinoises sur ces îlots de mer de Chine méridionale. « Ces revendications maritimes exagérées [de la Chine, ndlr] sont contraires aux lois internationales, telles que reflétées par la Convention sur le droit de la mer [des Nations unies] », expliquait alors le Pentagone.

Depuis l’investiture de M. Trump à la Maison Blanche, aucun navire américain n’avait été envoyé patrouiller près des récifs revendiqués par la Chine jusqu’au 25 mai. Ce jour-là, le destroyer USS Dewey est en effet passé à moins de 12 milles du récif de Mischief, qui fait partie de l’archiper des Spratleys, afin de démontrer la « liberté de navigation dans ses eaux contestées. Et, comme les fois précédentes, les autorités chinoises ont vivement réagi.

Le destroyer américain est entré « sans permission » dans les eaux territoriales chinoises, a dénoncé Lu Kang, le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, qui souligné « le fort mécontentement et la forte opposition » de la Chine.

La marine chinoise a « identifié le bâtiment américain conformément à la loi et lui a intimé l’ordre de partir », a encore affirmé Lu Kang, avant d’estimer que cette action des États-Unis avait « compromis la souveraineté et la sécurité » de la Chine et aurait pu être à l’origine d’accidents navals ou aériens.

Justement, à propos d’incident aérien, et après l’interception jugée dangereuse d’un avion WC-145 Constant Phoenix par deux chasseurs Su-30 chinois, le 16 mai, un appareil de patrouille maritime américain de type P3C Orion aurait subi un sort identique, une semaine plus tard.

Le 26 mai, le Pentagone a en effet indiqué qu’un P-3 Orion avait été intercepté de manière « non professionnelle et non sûre » par deux avion de chasse chinois de type J-10 alors qu’il survolait la mer de Chine méridionale. « Nous continuons d’évaluer les faits et nous transmettrons nos préoccupations au gouvernement chinois à travers les canaux appropriés », a expliqué un porte-parole.

Le ministère chinois de la Défense a mis 24 heures pour réfuter les affirmations du Pentagone. « Le 25 mai, un avion de patrouille américain a mené des activités de reconnaissance dans l’espace aérien au sud-est de Hong Kong, en Chine. […] L’avion militaire chinois a mené une identification conformément au droit. L’opération a été professionnelle et sûre », a-t-il affirmé, le 28 mai.

Ces actions « portent atteinte à notre souveraineté et à notre sécurité, mettant en danger la sécurité de personnels des deux camps », a encore fait valoir le ministère chinois de la Défense. « Ce comportement est la cause fondamentale des problèmes de sécurité militaire en mer et dans les airs entre les Etats-Unis et la Chine », a-t-il insisté, avant d’assurer que « les forces armées chinoises mèneront à bien résolument leurs tâches et préserveront résolument notre souveraineté et notre sécurité. »

Depuis quelques temps, les incidents aériens de ce type ne sont pas rares. Or, en 2001, au cours d’une interception, P-3 Orion de l’US Navy était entré en collision avec un chasseur chinois de type Shenyang J-8, ce qui donna lieu, à l’époque, à une crise diplomatique de plusieurs jours entre Pékin et Washington.

La situation en mer de Chine méridionale devrait une nouvelle fois être au centre des débats du prochain Shangri-La Dialogue, un forum sur la sécurité organisé chaque année par l’International Institute for Strategic Studies (IISS) et qui se tiendra le 2 juin.

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