Le Canada pourrait renoncer au F/A-18 Super Hornet en répresailles à une plainte visant Bombardier

Le remplacement des avions CF-18 Hornet de l’Aviation royale canadienne aurait dû être réglé en 2010, avec la commande de 65 F-35A Lightning II auprès du constructeur Lockheed-Martin.

Cette issue paraissait alors logique étant donné l’implication d’entreprises canadiennes dans ce programme américain. Mais ce choix fut vite contesté pour des raisons techniques, opérationnelles et surtout financières, le Vérificateur général du Canada ayant mis en évidence une sous-évaluation des coûts afférents à cet achat. Il fut donc décidé de lancer un appel d’offres.

En 2015, peu avant sa victoire aux élections législatives, le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, affirma qu’il lancerait « un appel d’offres ouvert et transparent pour remplacer les F-18 » car « nous n’achèterons pas de chasseurs-bombardiers furtifs F-35. »

Seulement, une telle procédure devant prendre probablement plusieurs années, l’Aviation royale canadienne ne pouvait pas se permettre d’attendre pour commencer à renouveler sa flotte d’avions de combat. Faute de quoi, elle risquait une rupture capacitaire. D’où la décision d’entamer des « discussions avec le gouvernement des États-Unis et Boeing pour l’utilisation provisoire » de 18 F/A-18 Super Hornet, afin de trouver une « solution intérimaire ».

On en était là quand, le 8 mai dernier, le Comité sénatorial canadien de la sécurité nationale et de la défense a recommandé, dans un rapport intitulé « Réinvestir dans les Forces armées canadiennes », l’abandon du projet d’achat de F/A-18 Super Hornet, afin que « les contribuables n’aient pas à financer une solution temporaire coûteuse qui risque d’isoler le Canada des États‑Unis »

« Cette recommandation d’annuler la décision du gouvernement d’acheter, auprès d’un fournisseur unique, 18 nouveaux Super Hornet pour remplacer les vieux CF-18 du Canada, donne suite aux témoignages d’experts selon lesquels les coûts à long terme surpasseraient toutes économies à court terme et l’acquisition de ces avions réduirait l’interopérabilité avec les alliés du Canada », ont fait valoir les sénateurs de ce comité.

Ces derniers ont donc demandé au gouvernement de M. Trudeau « de lancer immédiatement un processus concurrentiel en vue de remplacer ses CF-18, et à prendre une décision d’ici le 30 juin 2018. » Et il se pourrait que leur voeu soit exaucé grâce à… Boeing.

En effet, le 19 mai, suite à une plainte déposée par le constructeur américain, les États-Unis ont ouvert une enquête anti-dumping visant les imporations d’avions conçus par Bombardier.

Il s’agit de vérifier si l’industriel canadien a vendu à perte ses avions CS100 et CS300 et s’il a bénéficié pour plus de 3 milliards de dollars de subventions publiques illégales.

« Nous déplorons que le département du Commerce des États-Unis ait ouvert des enquêtes sur les droits anti-dumping et les droits compensateurs relatifs aux importations d’aéronefs civils gros porteurs canadiens », a réagi Chrystia Freeland, la ministre canadienne des Affaires étrangères, pour qui la plaine de Boeing « vise clairement à empêcher le nouvel avion de Bombardier, l’appareil CSeries, de pénétrer le marché américain. »

Mais les choses pourraient aller plus loin. « Le Canada examine ses approvisionnements militaires actuels liés à la société Boeing » et « défendra énergiquement les intérêts de Bombardier », a ajouté Mme Freeland. En clair, Ottawa pourrait très renoncer aux F/A-18 Super Hornet en représailles de la plainte de Boeing. Et cela pourrait ouvrir de nouvelles perspectives à d’autres constructeurs d’avions de combat, Dassault Aviation en tête, l’industriel français ayant déjà fait part de son intérêt pour le marché canadien

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