Les forces armées canadiennes sont arrivées au point de rupture, selon un rapport

Quand, en 2008, il présenta sa stratégie en matière de défense, appelée « Le Canada d’abord« , le gouvernement canadien, alors conduit par le conservateur Stephen Harper, se voulait ambitieux. Afin de permettre aux forces armées du pays de relever les défis auxquels elles allaient être confrontées, il était prévu de revoir à la hausse leurs budgets. Il s’agissait alors de moderniser certaines capacités clés, en particulier dans les domaines aériens et navals.

Seulement, ce plan resta en grande partie au niveau des intentions. En 2012, après une brève embellie budgétaire, le ministère canadien de la Défense dut contribuer significativement à la diminution des déficits publics, avec une baisse d’environ 13% de ses ressources financières (soit 2 milliards de dollars canadiens). Certes, de grands programmes d’équipements, en particulier pour la Marine royale canadienne, ont été lancés… mais les investissements demeurent insuffisants.

Le changement de majorité parlementaire en 2015, incarné par la nomination de Justin Trudeau (Parti libéral) au poste de Premier ministre, n’a pas inversé cette tendance. Et dans le budget 2017, il est prévu d’allouer 18,7 milliards de dollars canadiens (13,2 milliards d’euros) aux forces armées.

Cet effort représente seulement 0,88% du PIB, ce qui est très en deçà de l’objectif des 2% de la richesse nationale fixé par l’Otan et plus encore du niveau de dépense nécessaire pour moderniser les forces armées canadiennes qui, selon un rapport du Comité sénatorial de la sécurité nationale et de la défense, sont arrivées à un point de rupture.

« Le sous-financement chronique et le dysfonctionnement du processus d’approvisionnement font partie des principaux problèmes qui expliquent pourquoi les Forces armées canadiennes sont arrivées au point de rupture. Disons les choses simplement : l’ambitieux programme d’acquisition d’immobilisations du ministère de la Défense nationale est privé depuis trop longtemps de l’argent nécessaire et du savoir-faire pour y arriver », peut-on en effet lire dans ce document, lequel estime par ailleurs que « le Canada ne devrait donc pas se fier à d’autres pays pour protéger ses intérêts nationaux et défendre sa souveraineté. »

Pour le rapport, il est impératif de donner enfin aux forces armées canadiennes les moyens de leurs missions. La première d’entre elles est d’assurer la protection des approches maritimes et aériennes du Canada, pays bordé par trois océans (Pacifique, Arctique, Atlantique) et dont le « domaine océanique » couvre une surface de 7,1 millions de km2. Et, avec le changement climatique, la région Arctique, riche en hydrocarbures, suscitera des convoitises. Qui plus est, la navigation y sera facilitée, ce qui est susceptible de donner lieu à hausses des activités illégales.

En outre, le Canada participe de manière significative aux mesures de réassurance prises par l’Otan en faveur des pays baltes et de la Pologne et prend part activement à la coalition anti-jihadiste à l’oeuvre en Irak et en Syrie, comme il l’avait fait en Afghanistan. Enfin, Justin Trudeau a également fait part de son intention de voir son pays participer davantage aux opérations de maintien de la paix conduites par les Nations unies.

Aussi, les besoins financiers des forces canadiens sont conséquents. Et le niveau actuel de leur budget est « tout simplement insuffisant » pour assurer la défense du pays et leur permettre de remplir ses engagements internationaux, notamment à l’égard de l’Otan et du commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord (Norad), estime le rapport des sénateurs.

Pour y remédier, le Comité sénatorial avance 16 mesures à prendre, dont celle visant à recommander au gouvernement canadien de soumettre au Parlement un plan budgéraire d’ici 6 mois prévoyant de porter le budget de la Défense à 1,5% du PIB d’ici 2023 et 2% d’ici 2028. L’effort qu’il propose devrait commencer dès 2018 et continuer sa progression à raison de 0,1% du PIB sur 10 ans.

Mais augmenter les dépenses militaires ne suffit pas. Encore faut-il qu’elles soient efficaces. Aussi, le rapport préconise une « restructuration complète » du système d’approvisionnement des forces armées canadiennes, qu’il qualifie de « fouillis bureaucratique où on remarque un manque de responsabilisation. »

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