Un rapport parlementaire s’interroge sur le bien-fondé du rythme des mutations des militaires

Selon le dernier bilan social de la Défense, publié l’été dernier, 46.549 militaires ont connu une mutation en 2015, dont 25.722 avec un changement de résidence. Ces chiffres, qui sont en-deçà de ce qui avait été constaté lors des années précédentes, marquées par d’importantes restructurations (et donc, de fermetures de bases et de casernes), peuvent paraître encore élevés.

Dans le détail, et par rapport aux effectifs de chaque armée, la « mobilité » est plus importante au sein de la Marine nationale. En 2015, 1.354 officiers (sur 4.505), 3.861 officiers-mariniers (sur 23.505) et 735 militaires du rang (sur 6.723) ont en effet dû changer d’affectation et de résidence. Pour l’armée de Terre, 4.812 sous-officiers (sur 37.855) et 2.986 officiers (sur 13.788) ont connu le même sort. Enfin, s’agissant de l’armée de l’Air, 1.489 officiers (sur 6.415), 3.407 sous-officiers (sur 24.732) ont été affecté à une autre base aérienne.

Si les officiers et les sous-officiers sont essentiellement concernés par les mutations, ces dernières touchent aussi les militaires du rangs : en 2015, 5.423 d’entre eux ont en effet changé d’affectation.

Seulement, ces mutations sont susceptibles d’affecter la vie familiale des militaires. Pour ceux dont le conjoint travaille, il faudra chercher un nouvel emploi dans une région pouvant connaître des problèmes de chômage. En outre, le changement de résidence implique de trouver un nouveau logement, ce qui n’est pas toujours simple au vu du marché de l’immobilier dans certains départements. Enfin, la scolarité des enfants peut en pâtir. D’où le choix, pour certains, du célibat géographique.

Qui plus est, les militaires divorcés peuvent connaître des problèmes d’autres natures, comme par exemple l’impossibilité d’avoir la garde alternée de leur(s) enfant(s).

Cela étant, les changements d’affectation ont leur raison d’être, comme le souligne le rapport sur la protection sociale des militaires [.pdf], qui, écrit par les députés Geneviève Gosselin-Fleury et Charles de la Verpillière, vient d’être rendu public.

« La mobilité, qualité indispensable du militaire, se justifie par la nécessité de ne pas voir des organisations se rigidifier ou se développer des cultures régionales, dans la marine par exemple, ou celle de faire évoluer les carrières », lit-on dans le document. Cependant, les deux députés s’interrogent sur le bien-fondé du rythme de ces changements d’affectation. « Il convient d’en peser les effets. Il semble que les refus d’avancement, qui étaient très rares il y a quelques années, soient plus fréquents aujourd’hui, précisément à cause de la mobilité », ont-ils relevé.

Si la « mobilité a de lourdes répercussions sur la vie familiale », elle en a également sur le budget de la Défence. Aussi, les deux députés estiment qu’il serait « souhaitable » de les « évaluer ». En outre, ils disent « s’interroger la nécessité de mutations aussi fréquentes qu’aujourd’hui » et suggèrent « d’en ralentir le rythme et, en tout état de cause, d’en organiser autrement le déroulement ».

Sur ce point, les parlementaires déplorent que les décisions concernant les mutations soient annoncées à une date qui ne permet pas aux intéressés de « prendre les mesures nécessaires aux inscriptions scolaires de leurs enfants, trouver un logement et préparer leur déménagement dans de bonnes conditions. »

En effet, en 2015, selon les chiffres du Haut Comité d’évaluation de la condition militaire (HCECM), 14% des mutations ont été prononcées avec un préavis de 6 mois, 35% avec un préavis compris entre 3 et 6 mois et 51% avec un préavis inférieur à 3 mois (dont 25% avec un préavis d’un mois seulement).

Les personnels militaire du Service de Santé des Armées (SSA) est particulièrement concerné. D’après le rapport, « le taux de préavis de moins de trois mois les concernant passer de 14 % en 2014 à 39 % en 2015. » Cette année-là, 942 d’entre eux (sur 3.528 officiers et 4.417 sous-officiers) ont dû changer d’affectation.

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