D’anciens auxiliaires afghans des forces françaises saisissent la justice pour obtenir des visas

Le 22 novembre, le tribunal administratif de Nantes, seul compétent en matière de contentieux relatifs au refus d’accorder un visa d’entrée sur le territoire français, rendra une décision très attendue par 31 anciens auxiliaires afghans (ou « personnels civils à recrutement local » ou PCRL) des forces françaises entre 2002 et 2012.

Au cours de cette période – et même après puisque la France a continué à faire fonctionner l’hôpital et l’aéroport de Kaboul jusqu’en décembre 2014 -, environ 700 civils afghans ont été employés par les troupes françaises en tant qu’interprètes, commis de cuisine ou encore magasiniers.

Très vite, suite à l’annonce de la fin de la mission de combat des forces françaises, en 2012, la question de l’avenir des interprètes afghans a été posée, leur avenir étant lié à celui de l’évolution sécuritaire de l’Afghanistan. En effet, pour les taliban, ces civils sont des « traîtres » qui ne méritent que la mort. Et, de leur côté, les autorités afghanes s’en lavent les mains, estimant que leur protection relevait de leurs anciens employeurs…

Cela étant, en décembre 2012, le gouvernement français mit en place un « dispositif d’accompagnement » à l’intention de ces civils afghans. Les dossiers des candidats à une expatriation en France furent alors minitieusement étudiés par les ministères concernées.

« Ceux d’entre eux qui ont effectivement été engagés à nos côtés et qui ont effectivement pris des risques et dont la vie est directement menacée (…) et que nous avons auditionnés sur un long travail qui a été réalisé par mes équipes ici depuis 3 mois, eh bien ceux-là seront accueillis en France et seront intégrés à la société française », avait expliqué le général Olivier de Bavinchove, qui était, en décembre 2012, le commandant les forces françaises en Afghanistan.

Plus tard, le quotidien Le Monde nous apprenait que, sur les 600 dossiers déposés, entre entre 160 et 170 Afghans et leurs familles furent autorisés à venir en France. Pour autant, des mesures spécifiques furent proposés à celles et ceux qui s’étaient vus opposer un refus à leur demande, dont le versement d’une indemnité de licenciement d’un montant 18 fois supérieur à leur salaire ou encore un déménagement vers une région afghane « plus tranquille », avec, en sus, le paiement d’une prime de 1.000 euros.

Cela étant, la situation en Afghanistan s’est dégradée depuis, les taliban ayant étendu leur influence dans le pays, s’emparant de plusieurs districts et en contestant même le contrôle de capitales provinciales. Et, ceux qui ont travaillé pour les forces de l’Otan jusqu’en 2014 restent dans leur collimateur.

C’est ainsi que 252 demandes de visas ont de nouveau été déposées auprès des autorités françaises par d’anciens employés de la « Task Force » La Fayette. Seulement, 31 d’entre-elles ont été rejetées sans motivation, d’où le recours collectif de ces anciens « PCRL » déposé auprès du tribunal administratif de Nantes. « Il est urgentissime que vous suspendiez les décisions contestées car il en va véritablement de leur vie », a plaidé l’un de leurs avocats, Me Loïc Bourgeois, pour justifier la procédure d’urgence qui venait d’être lancée.

Les avocats de ces anciens employés afghans des forces françaises s’appuient sur une loi de 1983 qui oblige l’État à protéger ses employés (fonctionnaires ou contractuels) en cas de menaces liées à l’exercice de leur fonction.

Cependant, tout dépendra de l’évaluation de la menace à laquelle sont exposés ces demandeurs d’asile. « Il y a lieu d’apprécier le risque de chacun », a en effet déclaré Christian Cau, le président du tribunal administratif de Nantes. Et pour cela, il faut que les requérants donnent des justifications, ce qui n’est pas simple.

D’autant plus que le représentant du ministère de l’Intérieur a fait valoir qu’il n’y avait pas forcément « d’automatisme » entre le statut d’ancien auxiliaire de l’armée française et « l’existence d’une menace particulière ».

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