Moscou et Damas accusent la coalition d’avoir frappé une position de l’armée syrienne à Deir Ezzor

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Le ministère russe de la Défense a accusé, le 17 septembre, la coalition anti-État islamique (EI ou Daesh) dirigée par les États-Unis d’avoir effectué des frappes aériennes contre une position occupée par l’armée syrienne dans les environs de Deir Ezzor, une ville contrôlée en grande partie par les jihadistes, qui tiennent aussi la province du même nom.

« Des avions de la coalition internationale anti-Daesh (deux F-16 et deux A-10) ont effectué samedi, vers 16h00 ou 16h50 (heure de Paris), quatre frappes contre des unités des troupes gouvernementales syriennes encerclées par les terroristes de Daesh. Les avions de la coalition ont pénétré dans l’espace aérien syrien depuis la frontière irakienne », a en effet affirmé Igor Konachenkov, le porte-parole du ministère russe de la Défense, via un communiqué.

D’après Damas, ces frappes ont fait au moins 62 tués dans les rangs des soldats syriens ainsi qu’une centaine de blessés. L’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) a quant à lui donné un bilan plus élevé, parlant de 80 morts.

« Si ces frappes s’expliquent par les coordonnées erronées des cibles, c’est une conséquence directe du refus de la partie américaine de coordonner avec la Russie ses actions contre les groupes terroristes en Syrie », a estimé Igor Konachenkov.

La conséquence de ces frappes est que l’EI a lancé une offensive contre l’aérodrome que défendaient les forces gouvernementales. Selon le communiqué russe, des « combats acharnés » étaient en cours au moment de sa diffusion.

De son côté, l’US Centcom, le commandement américain pour le Moyen-Orient et l’Asie centrale, a confirmé avoir lancé un raid à Deir Ezzor.

« Plus tôt aujourd’hui un avion de la coalition a effectué un bombardement au sud de Deir ez-Zor, en Syrie », a-t-il affirmé dans un communiqué.

Et d’expliquer : « Les forces de la coalition pensaient qu’elles frappaient une position de combat de l’EI qu’elles suivaient depuis un certain temps avant le bombardement. La frappe a été arrêtée immédiatement quand les responsables de la coalition ont été informés par des responsables russes qu’il était possible que du personnel et des véhicules ciblés faisaient partie de l’armée syrienne. »

En outre, l’US Centcom a fait valoir que, par le passé, la zone visée avait déjà été bombardée par la coalition. Qui plus est, les forces russes, a-t-il continué, avaient été préalablement avertie de la frappe afin d’éviter tout incident entre les avions de la coalition et ceux de l’aviation russe dans le ciel syrien, dans le cadre de mesures dites de « déconfliction ».

Ces dernières font partie d’un memorandum signé le 20 octobre 2015 et qui contient, avait, à l’époque, expliqué Anatoli Antonov, vice-ministre russe de la Défense, « un nombre de règles et de restrictions visant à empêcher des incidents entre les avions russes et américains qui effectuent, dans le cadre d’opérations différentes, des frappes aériennes contre le groupe jihadiste Etat islamique (EI) en Syrie. »

« La Syrie est un théâtre d’opérations complexe avec différentes forces militaires et milices agissant dans un périmètre proche, mais la coalition ne ciblerait jamais intentionnellement une unité militaire syrienne », a encore assuré l’US Centcom. « La coalition va se pencher sur les circonstances de cette frappe et voir si des leçons peuvent en être tirées », a-t-il promis.

Quoi qu’il en soit, Moscou a annoncé son intention de convoquer une réunion du Conseil de sécurité des Nations unies pour évoquer ces frappes de la coalition.

« Nous exigeons de Washington des explications complètes et détaillées, et elles doivent être données devant le Conseil de sécurité de l’ONU », a expliqué Maria Zakharova, la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères. « Ces frappes mettent en danger tout ce qui a été fait jusqu’ici par la communauté internationale, par le Groupe international de soutien à la Syrie comme par Moscou et Washington, parrains du processus de paix en Syrie », a-t-elle continué.

Puis, Mme Zakharova a accusé les États-Unis « d’être tout simplement incapables de remplir leurs engagements de distinguer les terroristes de l’EI et du Fateh al-Cham (ex-Front al-Nosra) des opposants syriens dans le cadre d’un accord sur le cessez-le-feu » avant d’accuser la Maison Blanche de « protéger l’EI ».

Pour rappel, Washington est à la tête d’une coalition qui frappe l’organisation jihadiste depuis août 2014 alors que, depuis un an, il est régulièrement reproché à la Russie de ne viser cette dernière que très marginalement.

La représentante des États-Unis auprès de l’ONU, Samantha Powers, a répété les regrets de Washington pour cette frappe de la coalition contre une position de l’armée syrienne. Elle « n’était pas intentionnelle et nous regrettons bien sûr les pertes en vies humaines », a-t-elle affirmé devant la presse. Puis, elle a fustigé Moscou en parlant de « moralisme », de « mise en scène » et de « cynisme ».

« Le régime syrien frappait volontairement des cibles civiles avec une régularité effrayante » et « la Russie ne fait rien pour l’en empêcher », a accusé Mme Powers, soulignant que Damas « utilise souvent des armes chimiques (…) et a torturé des milliers de prisonniers. » Et d’ajouter : « Et pourtant, face à tant d’atrocités jamais la Russie n’a exprimé sa consternation ni demandé une réunion d’urgence du Conseil ». Aussi, selon elle, « la réunion de ce soir [du Conseil de sécurité] est une diversion par rapport à ce qui se passe sur le terrain en Syrie. »

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