Le Pentagone juge inacceptables les combats entre les forces turques et les milices kurdes syriennes

turquie-20160829

Le 28 août, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a réaffirmé les objectifs de l’opération « Bouclier de l’Euphrate », lancée la semaine passée dans le secteur de Jarablus, dans le nord de la Syrie. « Nous avons la même détermination à combattre le Parti de l’Union démocratique (PYD) en Syrie que l’EI », a-t-il lancé, lors d’un discours prononcé à Gaziantep.

Mais l’impression qui domine, ces dernières heures, est que les forces turques, qui ont engagé une cinquantaine de chars dans l’opération, visent surtout les milices kurdes syriennes (YPG), lesquelles font partie des Forces démocratiques syriennes (FDS), bras armé de la coalition internationale dirigée par les États-Unis contre les jihadistes de l’EI (État islamique ou Daesh) en Syrie.

Pour rappel, le gouvernement turc considère le PYD comme une organisation terroriste, étant donné qu’il est lié avec le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), à l’origine d’une insurrection contre Ankara commencée en 1984.

Aussi, pour les autorités turques, il est hors de question que le PYD puisse disposer d’une continuité territoriale le long de la frontière séparant la Syrie de la Turquie. D’où l’opération « Bouclier de l’Euphrate » qui, dans ses premières heures, a consisté à chasser l’EI de Jarablus et de prendre ainsi de vitesse les milices kurdes qui convoitaient cette ville.

Mais depuis, les forces turques et les groupes rebelles syriens soutenus par Ankara, visent désormais ces mêmes milices kurdes, à qui il a été demandé, selon Washington, de se replier à l’est de l’Euphrate après avoir pris, il y a deux semaines, avec les FDS, la ville stratégique de Manbij à l’EI avec l’appui aérien de la coalition.

Justement, Manbij, située à quarantaine de kilomètres au sud de Jarablus, semble être un objectif pour Ankara. Ce 29 août, le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlüt Cavusoglu, a accusé les YPG d’y procéder à un « nettoyage éthnique ».

« Dans les endroits où ils se rendent, les YPG forcent tout le monde à migrer, y compris les Kurdes qui ne pensent pas comme eux, et procèdent à un nettoyage ethnique », a en effet déclaré le chef de la diplomatie turc.

La veille, le colonel Ahmed Osman, chef de la brigade « Sultan Mourad », un groupe rebelle syrien soutenu par la Turquie, a dit à l’agence Reuters que ses troupes « marchaient sans ambiguïté sur Manbij » pour s’en emparer « dans quelques jours, si Dieu le veut ». Du coup, les milices kurdes, qui devaient se retirer de cette ville, sont en train d’y renforcer leur présence.

Pour résumer la situation, d’une extrême complexité, la Turquie, qui, bien que membre de l’Otan, n’a pas toujours joué franc-jeu avec les jihadistes, affronte des milices kurdes syriennes soutenues par la coalition anti-EI, et donc par les États-Unis. Et, réconcilié avec Ankara, Moscou, qui soutient Bachar el-Assad, reste à l’écart, la diplomatie russe ayant seulement fait par de sa « profonde préoccupation », estimant que la « d’une dégradation supplémentaire de la situation dans la zone du conflit est inquiétante. »

Quoi qu’il en soit, pour le Pentagone, la tournure que prennent les événements est « inacceptable ».

« Nous suivons de près les informations faisant état de combats (…) entre les forces armées turques, des groupes de l’opposition [soutenus par Ankara, ndlr] et des unités affiliées aux Forces démocratiques syriennes », a fait savoir, ce 29 août, le département américain à la Défense. « Nous voulons clarifier que ces combats sont inacceptables et suscitent notre profonde inquiétude », a-t-il ajouté, dans un communiqué cité par l’AFP.

En outre, le Pentagone a insisté sur le fait que l’EI n’est plus présent au sud de Jarablus. « Les États-Unis ne sont pas impliqués dans ces activités (…) nous ne les soutenons pas », a-t-il affirmé, avant d’en appeler les différentes parties « à prendre des mesures appropriées pour cesser les combats. »

« Les FDS ont montré qu’elles étaient une force fiable et compétente. Notre soutien aux FDS dans leur lutte contre le groupe EI est toujours d’actualité, et nous allons continuer à les appuyer. Ils se sont battus et se sont sacrifiés pour essayer de débarrasser la Syrie de ce groupe haineux », a encore souligné le Pentagone.

« Nous avons réitéré notre point de vue selon lequel les YPG doivent retraverser à l’est de l’Euphrate, et nous comprenons que ce mouvement est déjà largement en cours », a continué le Pentagone. « Nous allons continuer à travailler avec nos partenaires sur le terrain pour nous assurer que nos efforts collectifs pour administrer à l’EI une défaite durable soient bien coordonnés et synchronisés », a-t-il assuré.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]