Pékin lorgne sur un archipel indonésien situé en mer de Chine méridionale

natuna-20160621Faisant fi des revendications territoriales de la Malaisie, du Vietnam, de Bruneï, des Philippines et de Taïwan, Pékin aménage des îlots des archipels Spratleys et Paracel, en mer de Chine méridionale, ce qui lui donnera de facto le contrôle de cette région à la fois essentielle pour le commerce international et riche en hydrocarbures.

Mais les autorités chinoises ont aussi des vues sur les îles Natuna, qui, situées également en mer de Chine méridionale, appartiennent à l’Indonésie. Et, depuis maintenant plusieurs semaines, la tension monte peu à peu entre Jakarta et Pékin.

Ainsi, en mars, un navire des garde-côtes chinois aidèrent un bateau de pêche, également chinois, à échapper à la marine indonésienne qui venait de l’arraisonner. Cet incidet provoqua une vive réaction de la part de Jakarta. Mais les choses n’en restèrent pas là.

Un mois plus tard, la Chine protesta à son tour auprès du Jarkarta après la saisie d’un navire chinois accusé de pêcher illégalement dans les eaux entourant l’archipel indonésien.

Puis, le 17 juin, la marine indonésienne a haussé le ton suite à une nouvelle incursion de bateaux de pêche chinois dans les eaux dont elle est chargée d’assurer la surveillance, en procédant à des tirs de semonce. Ce qui provoqué la colère de Pékin.

« La Chine proteste fortement contre un tel usage excessif de la force et le condamne », a affirmé, deux jours plus tard, Hua Chunying, la porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, qui a parlé d’un membre d’équipage « blessé » et de l’arrestation de 7 pêcheurs chinois par la marine indonésienne.

« Les actions de l’Indonésie ont violé le droit international, y compris la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (UNCLOS), ainsi que la Déclaration des conduites des parties en mer de Chine méridionale (DOC), et ont porté atteinte à la vie et à la propriété des pêcheurs chinois », a ajouté Mme Hua. « La Chine exhorte l’Indonésie à cesser d’engager des actions qui accentuent la tension et compliquent les questions, ou affectent la paix et la stabilité », a-t-elle conclu.

Détail important : dans son compte-rendu de cet incident, l’agence de presse officielle Xinhua a qualifié les îles Natuna comme étant une « zone de pêche chinoise traditionnelle où les revendications des droits maritimes par la Chine et par l’Indonésie se chevauchent », ce qui semble suggèrer que Pékin ne reconnaît pas les droits de Jakarta sur cette région. D’autant plus que l’archipel en question est situé à 3.000 kilomètres des côtes chinoises.

De son côté, l’Indonésie a admis l’arrestation de 7 pêcheurs chinois mais a démenti que les tirs de semonce aient blessé l’un d’entre eux. « La marine indonésienne a agi de façon appropriée en maintenant notre souveraineté sur nos mers », a fait valoir Susi Pudjiastuti, la ministre de la Pêche. « Les tirs étaient conformes à la procédure », a-t-elle continué, avant d’affirmer que « voler le poisson est un crime. »

Quant au président indonésien, Joko Widodo, il a ordonné à ses forces armées « de défendre la souveraineté territoriale de l’Indonésie ».

Pour le contre-amiral Achmad Taufiqoerrochman, le commandant de la flotte occidentale de la marine indonésienne, l’envoi de chalutiers chinois dans les eaux de l’archipel Natuna n’est pas sans arrière-pensée… « C’est une ruse », a-t-il dit, ce 21 juin, en accusant Pékin de donner sa « bénédiction » à la pêche illégale. « Ils ont besoin d’une présence et leur façon de le faire, c’est avec des bateaux de pêche », a-t-il expliqué.

Le procédé décrit par le contre-amiral Taufiqoerrochman n’est pas inconnu. C’est celui que la Chine a utilisé pour mettre la main sur le récif de Scarborough, jusqu’alors administré par les Philippines.

En avril 2014, le général Moeldoko, alors chef d’état-major des forces armées indonésiennes, fit part, dans un article publié par le Wall Street Journal, de la consternation de Jakarta de voir que la Chine avait « inclu des parties des îles Natuna dans sa ligne en neuf traits [neuf lignes de division dans la mer de Chine méridionale, ndlr] », ce qui suggérait qu’elle comptait revendiquer « un segment de la province indonésienne des îles Riau dans son territoire. »

C’est ce qui explique le déploiement récent, par les forces indonésiennes, d’hélicoptères d’attaque AH-64 Apache et d’un bataillon de fusiliers marins ainsi que la modernisation d’une base aérienne devant accueillir des avions de combat.

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