Nigéria : Le groupe jihadiste Boko Haram est encore loin d’être anéanti

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Le groupe jihadiste nigérian Boko Haram, lié à l’État islamique, a perdu de sa superbe en 2015, sous l’effet conjugué de la reprise en main des forces armées nigérianes et de l’intervention, dans le nord du Nigéria, des troupes tchadiennes et nigériennes.

Ainsi, cette organisation a perdu l’essentiel de ses gains territoriaux et a désormais des difficultés pour s’approvisionner en nourriture et en essence. En outre, son chef, Abubakar Shekau, est apparu mal en point dans une vidéo diffusée récemment. Ce qui a récemment fait dire au président nigérian, Muhammadu Buhari, que Boko Haram a été « techniquement vaincu ».

Pour autant, le pouvoir de nuisance de Boko Haram est encore loin d’avoir disparu. Tout en évitant toute confrontation directe avec les forces armées, ses militants continuent de se jouer des frontières dans la région du Lac Tchad afin de mener des attaques suicides contre des cibles « molles » peu ou pas protégées. Et à cela, il faut désormais ajouter la menace des mines, disséminées dans les champs par le groupe jihadiste.

Quelques chiffres illustrent ce changement de tactique. En 2015, d’après l’ONG britannique Action on Armed Violence (AOAV, Action contre la violence armée), le nombre de personnes tuées ou blessées lors d’attaques attribuées à Boko Haram a augmenté de 190%. Les attentats suicides perpétrés par le groupe ont augmenté de 167% par rapport à 2014.

Rien qu’au Nigéria, AOAV a compté 84 attaques qui ont causé la mort de 3048 personnes, dont 96% de civils. Au total, depuis 2009, l’insurrection menée par Boko Haram aurait été responsable de 20.000 tués.

Pour le Niger, où Boko Haram a mené plusieurs attaques dans le sud, le niveau de la menace reste « élevé ». Et c’est ce qui justifie, pour Niamey, la prolongation de l’état d’urgence (instauré en février 2015) dans la région de Diffa, frontalière avec le Nigéria, pour trois mois supplémentaires.

« La situation sécuritaire dans la région de Diffa reste encore préoccupante avec un niveau de menace assez élevé dû aux attaques de Boko Haram », a ainsi fait valoir le gouvernement nigérien.

La menace s’est en effet aggravée avec le départ des troupes tchadiennes des localités nigérianes de Malam Fatori et de Damasack, toutes les deux proches du Niger. Il a été rapporté que Boko Haram est revenu dans ses deux anciens fiefs.

Justement, avec le soutien de l’Union africaine, une Force d’intervention conjointe multinationale (MNJTF), comptant 8.500 soldats fournis par Nigeria, le Tchad, le Cameroun, le Niger et le Bénin, a été mise sur pied en 2015 pour combattre Boko Haram. Cette dernière, dont le commandement est assuré, depuis N’Djamena, par le général nigérian Lamidi Adeosun, devait recevoir le soutien de la communauté internationale.

Or, selon le général Adeosun, les promesses tardent à se concrétiser. « Tout ce que nous avons reçu ce sont des moyens de communication et onze véhicules », a-t-il dit, lors d’une conférence de presse donnée à Niamey. « Plusieurs engagements ont été pris par des bailleurs internationaux et les partenaires stratégiques en vue d’un soutien à la force, mais on n’a rien vu de concret sur le terrain » alors que les insurgés ont gardé leur capacité de nuisance dans la région du lac Tchad », a-t-il déploré.

« Nous donnons le meilleur de nous-mêmes avec les moyens de nos États », mais « le travail serait mieux fait si nous recevons plus de soutiens » extérieurs, a encore assuré le général Adeosun.

Cela étant, la mauvaise réputation de l’armée nigériane, accusée de corruption et de violations de droits de l’Homme, ne va pas dans le sens d’une aide accrue…

Pour rappel, la France est indirectement impliquée dans le combat contre Boko Haram. En 2015, elle a notamment envoyé des détachements de liaison et de contact au Niger et au Cameroun. En outre, une cellule de coordination et de liaison a été adossée au PC de l’opération Barkhane. Enfin, de l’aveu même du président Hollande, des vols de reconnaissance ont été effectués au-dessus des zones où le groupe jihadiste est actif (sauf au Nigéria, du moins officiellement).

Enfin, les forces spéciales britanniques (300 personnels) participent à la formation de l’armée nigériane tandis que les États-Unis ont envoyé au Cameroun un détachement de 300 militaires et des drones MQ-1 Predator non armés.

 

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