Verdun 1916-2016 – Le « père » de l’aviation militaire française devient ministre de la Guerre

roques-20160313Comme on l’a vu à l’occasion du portrait de Jean Navarre, la suprématie aérienne au-dessus du champ de bataille de Verdun aura été essentielle, ne serait-ce pour guider les tirs d’artillerie et observer les mouvements des troupes ennemies.

Si l’aviation militaire française a pu répondre au défi posé par son homologue allemande dès août 1914, elle le doit à un homme : le général Pierre Roques.

Issu d’une famille héraultaise très modeste, Pierre Roques, né en 1856, se distingue par sa vive intelligence, ce qui lui permet d’obtenir une bourse d’études et de réussir le concours de l’École Polytechnique, où il se lie d’amitié avec le futur maréchal Joffre. À sa sortie de l’X, il choisit de servir dans l’arme du Génie.

Au cours de sa carrière, qui l’emmènera dans les colonies françaises, l’officier va s’illustrer davantage par ses qualités d’ingénieur que sur le plan militaire. Il va en effet s’impliquer dans plusieurs projets importants d’infrastructures (ponts, voies ferrées, routes), notamment à Madagascar où, colonel, aux côtés du gouverneur, le général Galliéni, il occupe les fonctions de directeur du Génie et des travaux publics.

En 1906, promu général, Pierre Roques est nommé directeur de l’arme du Génie, dont dépendent les affaires liées à l’aéronautique naissante. Très vite, il comprend l’intérêt que peuvent avoir les « aéroplanes » pour les opérations militaires. Ce qui n’était pas évident, à l’époque : trois ans, seulement, venaient de s’écouler depuis le premier vol motorisé et contrôlé des frères Wright aux États-Unis.

« Les aéroplanes sont aussi indispensables aux Armées que les canons et les fusils. C’est une vérité qu’il faut accepter de bon gré, sous peine d’avoir à la subir de force », écrit alors le général Roques, contre le scepticisme affiché d’une partie de l’état-major. Le futur maréchal Foch n’a-t-il pas déclaré : « L’aviation, c’est du sport. Pour l’armée, c’est zéro! »?

Mais l’histoire est en route. En 1910, le général Roques est nommé « Inspecteur permanent de l’Aéronautique militaire ». Il fait approuver l’organisation, à Reims, d’un concours d’aéroplanes militaires pour l’année suivante.

Petite parenthèse : c’est le général Roques qui a imposé le terme « avion » pour désigner les « aéroplanes ». Et cela, en hommage à  Clément Ader, lequel a utilisé ce mot pour l’Éole, qui est probablement le premier « plus lourd que l’air » à avoir décollé le 9 octobre 1890, à Gretz-Armainvilliers. En outre, il instaure le « carnet d’emploi du temps des pilotes », c’est à dire le « carnet de vol » en usage de nos jours.

En février 1911, le général Roques institue les brevets militaires de pilote et de mécanicien. En outre, sa priorité est de faire en sorte que l’aviation puisse avoir le statut d’une arme à part entière au sein de l’armée de Terre, la Marine ayant choisi de faire cavalier seul dans ce domaine.

Quoi qu’il en soit, les essais menés en 1911 et 1912 arrivent à la même conclusion : l’aviation a un réel intérêt militaire, en particulier pour l’observation. En outre, pour la première fois, elle a été engagée par les forces italiennes contre les Turcs en Tripolitaine, le capitaine Carlo Piazza ayant ainsi mené une mission de reconnaissance avec un avion Blériot.

Par la suite, le général Roques va s’attacher à organiser l’aviation militaire française.

Les unités seront ainsi des « escadrilles », une direction du matériel aéronautique militaire est créée, de même que, à Vincennes, un établissement d’aviation militaire, chargé d’effectuer des recherches et des essais. Un commandement des troupes d’aéronautique voit le jour à Versailles et un corps de troupe est constitué.

Le 14 juillet 1912, l’aéronautique militaire reçoit son drapeau des mains d’Armand Fallières, le président de la République. Et il est décidé que les avions français arboreront des cocardes tricolores. Mais le général Roques venait tout juste de quitter ses fonctions pour prendre le commandement de la 7e Division d’Infanterie, puis, avant le début de la Première Guerre Mondiale, celui du XIIe Corps d’Armée. C’est ainsi qu’il aura à participer à la direction des opérations dans la Marne, puis en Champagne.

Le 16 mars 1916, ce proche de Joffre est nommé ministre de la Guerre, en remplacement du général Gallieni. Il restera à cette fonction pendant quelques mois, avant d’être remplacé par Lyautey. Chef de la IV Armée en décembre 1916, le général Roques prend la direction de de l’Inspection Générale des Travaux et Organisation de la Zone des Armées trois mois plus tard. Puis, l’armistice signé, il est nommé président du Comité Technique du Génie, avant d’être placé dans la section de la réserve.

Le 29 janvier 1920, soit un mois avant son décès, le général Roques se voit décerner la Médaille Militaire, avec cette citation : « Ancien commandant d’armée, ancien ministre de la Guerre, a fait preuve, au cours de sa longue carrière, de la plus haute conscience et de la valeur professionnelle la plus distinguée. A rempli en temps de paix, tant aux colonies que dans la métropole, des missions techniques où son mérite a obtenu les plus précieux résultats. S’est affirmé au cours de la guerre commandant de corps d’armée, puis commandant d’armée éminent. Appelé ensuite aux conseils du Gouvernement, a rendu à la France de signalés services. A bien mérité de la Patrie à qui il a consacré la plénitude de son dévouement et de ses hautes capacités ».

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