Le Pakistan admet (enfin) avoir accueilli l’état-major des talibans afghans

Pendant des années, le Pakistan a démenti avoir recueilli sur son territoire la direction du mouvement taleb afghan, chassée de Kaboul en 2001 par les forces américaines et les rebelles de l’Alliance du Nord.

Or, l’on sait que les principaux dirigeants des talibans afghans ont trouvé refuge à Quetta. En outre, entre 2001 et à aujourd’hui, les rapports sur ces collusions entre ces derniers et l’Inter-Services Intelligence (ISI), les services de renseignement pakistanais, n’ont pas manqué [voir un résumé ici]. Cela dit, c’était la même chose pour Oussama Ben Laden, le chef d’al-Qaïda…

Ce double-jeu d’Islamabad avait même fini par faire sortir de ses gonds l’amiral Mike Muellen, qui dénonça, en septembre 2011, la « guerre par procuration » menée par le Pakistan en Afghanistan.

Mais il aura fallu attendre le 2 mars 2016 pour voir enfin un responsable pakistais admettre publiquement la présence des dirigeants talibans afghans dans son pays. Cet aveu a été fait par Sartaj Aziz, le conseiller aux Affaires étrangères du Premier ministre Nawaz Sharif.

Ainsi, s’exprimant devant le Council of Foreign Affairs (CFR), à Washington, au sujet des chefs talibans afghans, M. Aziz a admis que son pays leur avait donné un « asile sûr » et que cela permettait à Islamabad de les pousser à négocier.

« Nous avons de l’influence sur eux, car leur direction est au Pakistan, et ils y sont soignés, leur famille est là », a-t-il affirmé selon transcription de ces propos faite par le CFR. « Nous pouvons donc utiliser ces moyens de pression pour leur dire ‘venez à la table' » des négociations, a-t-il ajouté.

En juillet 2015, le Pakistan avait accueilli une première rencontre entre les dirigeants talibans et les autorités de Kaboul. Mais cette tentative de dialogue tourna court avec l’annonce de la mort du Mollah Omar, le chef historique du mouvement taleb afghan, pourtant décédé deux ans plus tôt.

Mais M. Aziz a expliqué que cette médiation avait pu être organisée grâce à la pression exercée par Islamabad sur les chefs talibans. « Avant la rencontre du 7 juillet dernier, nous avons eu à utiliser certains de ces moyens de pression, nous avons restreint leurs mouvements, leur accès aux hôpitaux et autres infrastructures, et nous les avons menacés: si vous ne venez pas négocier, alors évidemment nous allons vous expulser », a-t-il expliqué.

Cependant, ces explications sont un peu courtes. Pourquoi, dans ces conditions, les autorités pakistanaises ont-elles capturé, en 2010, le mollah Baradar, adjoint du mollah Omar à l’époque, alors qu’il était favorable à des négociations avec Kaboul? Et pourquoi Islamabad n’a pas usé de cette influence pour calmer les ardeurs des dirigeants taliban?

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