Pour M. Le Drian, l’infiltration de jihadistes parmi les migrants est un « risque majeur »

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Quand, il y a quelques mois à peine, le risque d’une possible infiltration des flux de migrants par les jihadistes de Daesh (État islamique ou Daesh) fut avancé, il avait été minimisé par certains experts du contre-terrorisme, voire jugé improbable.

« Mettre un jihadiste confirmé, qui a combattu et s’est entraîné avec l’EI pendant des mois, voire des années, sur un bateau qui risque de couler (…) n’est pas une façon très efficace de l’envoyer en Europe », avait même estimé Christian Nelleman, directeur du centre de réflexion norvégien RHIPTO. Et d’ajouter : « Cela ne veut pas dire que ça n’a pas lieu, mais c’est minime. Et en termes d’attaques terroristes imminentes, cela serait du gâchis. » Seulement, depuis, il y a eu les attentats de Paris et de Saint-Denis, dont certains des auteurs ont justement pris les routes empruntées par les migrants, ce qui leur a permis de passer sous les « radars » des différents services.

Quoi qu’il en soit, la présence de Daesh en Libye rend ce risque d’infiltration encore plus important. Et, lors du Grand Jury RTL/LCI/Le Figaro, le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, ne l’a pas caché.

Les jihadistes de Daesh « sont là, sur près de 300 kilomètres linéaires de côtes, et ils se répandent. Et ils sont à 350 kilomètres de Lampedusa. Lorsque le beau temps va arriver en Méditerranée, il y a des risques de passage de combattants qui pourraient se mélanger à des réfugiés. C’est un risque majeur », a ainsi affirmé le ministre, en se disant « très inquiet sur la Libye ».

Cette estimation rejoint celle avancée en mai 2015 par Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’Otan. « L’un des problèmes est qu’il peut y avoir des combattants étrangers, qu’il peut y avoir des terroristes qui se cachent, se mêlent aux migrants », avait-il affirmé.

Une préoccupation partagée par le général américain Philip Breedlove, le commandant des forces alliées en Europe. « Certains sont des réfugiés légitimes, d’autres relèvent du crime organisé, mais nous pensons aussi qu’il peut y avoir des éléments extrémistes parmi eux. C’est un problème auquel nous devons répondre », avait-il affirmé.

Et l’on peut même imaginer un scénario (que d’aucuns jugeront improbable) consistant en une attaque d’un des navires de l’opération européenne Sophia, avec par exemple une embarcation de migrants en détresse piégée par des explosifs (*).

En attendant, pour M. Le Drian, la priorité est de trouver une solution politique à la crise libyenne, laquelle passe par l’installation d’un gouvernement d’union nationale. Un accord en ce sens a été conclu en décembre par des représentants des deux factions qui se disputent le pouvoir en Libye. Seulement, il n’a pas encore été validé par les deux Parlements rivaux.

« Il faut aboutir à un gouvernement d’union nationale (…) Il y a un processus politique sérieux en cours, validé par le Conseil de sécurité à l’unanimité. Je pense que c’est urgent. Il y aurait un soutien à un gouvernement libyen qui nous le demandera », a toutefois fait valoir M. Le Drian.

« Chacun se rend bien compte du danger de transférer un conflit au Levant (Syrie et Irak) sur lequel on commence à avoir des éléments positifs à un nouveau conflit en Libye » et « le seul moyen de l’éradiquer est l’unité politique de ce pays, pour que nous ayons un interlocuteur », a encore ajouté le ministre français.

(*) Scénario avancé par Pierre Servent, consultant et officier de réserve, auteur de l’Extension du domaine de la guerre

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