Le chiffre d’affaires des 100 premiers industriels de l’armement a encore baissé en 2014

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La méthode utilisée depuis 1989 par l’Institut de recherche sur la paix internationale de Stockholm (Sipri) pour évaluer le niveau des ventes d’armes et de services à caractère militaire n’est probablement pas parfaite. Notamment parce que ne sont pris en compte que les résultats des 100 premiers industriels du secteur [.pdf] et que les groupes chinois sont absents de ce classement, faute de données fiables à leur sujet.

Toutefois, le rapport rendu public ce 14 décembre par le Sipri donne des tendances. La première est que le total des ventes effectuées en 2014 par ces 100 groupes du secteur de l’armement est de nouveau en recul pour la quatrième année consécutive, avec une baisse « modérée » de 1,5 % en termes réels entre 2013 et 2014, à 401 milliards de dollars.

Le second enseignement est que, si elles dominent encore le marché de l’armement, avec 80% de parts, les entreprises implantées aux États-Unis et en Europe de l’Ouest voient leurs résultats encore s’effriter, avec une nouvelle baisse de 3,2% par rapport à l’année précédente.

Avec une part de marché de 54,4%, les industriels américains ont encore vu de leurs ventes décliner de 4,1% entre 2013 et 2014. Cependant, il faut se garder d’une généralisation excessive : premier de ce Top 100, Lockheed-Martin n’est pas prêt de céder sa place au vu de la progression de son chiffre d’affaires, qui s’est établi, l’an dernier, à 37,5 milliards de dollars (+3,9%) et du rachat annoncé de Sikorsky (hélicoptères).

Si les principaux groupes américains affichent des résultats qui se maintiennent, d’autres ont en revanche vu leur chiffre d’affaires baisser de 50%, comme Oshkosh, DynCorp International ou encore General Atomics.

Pour les entreprises européennes, la baisse est encore plus sensible (-7,4% en 2014). « Seules les firmes allemandes (+9,4 %) et suisses (+11,2 %) affichent une augmentation globale de leurs ventes d’armes en termes réels. La hausse des ventes d’armes allemandes est due à une croissance significative du chiffre d’affaires de l’entreprise de construction navale ThyssenKrupp (29,5 %), tandis que le suisse Pilatus Aircraft a bénéficié d’une demande croissante pour ses avions d’entraînement, stimulant les ventes suisses », note le Sipri.

Seulement, les chiffres concernant les groupes français ne sont pas en phase avec les prises de commandes à l’exportation enregistrées en 2014. Selon le rapport sur les ventes d’armes transmis au Parlement, en juin dernier, ces dernières ont progressé de 18,1% par rapport à 2013. On en mesurera les conséquences lors de la publication de la prochaine étude de l’institut suédois.

Cela étant, ces résultats globalement en baisse des industriels de l’armement américains et européens s’expliquent en partie par une baisse de la demande intérieure. Cette situation changera probablement en raison de l’intention de certains pays de revoir à la hausse leur effort de défense.

Quoi qu’il en soit, si les groupes américains et européens faiblissent un peu, d’autres en profitent. Ainsi, 36 entreprises d’autres régions ont amélioré leur chiffres d’affaire de 25%. Et ce les conglomérats russes ont particulièrement sur tirer leur épingle du jeu en 2014, avec des résultats en hausse de 50%. Et c’est là le troisième enseignement de l’étude du Sipri.

« Malgré des conditions économiques nationales difficiles, les ventes de l’industrie d’armement russe continuent d’augmenter en 2014. Le nombre de firmes russes figurant dans le Top 100 est passé de 9 à 11, représentant une part de 10,2 % du total des ventes d’armes du Top 100 en 2014 », affirme le Sipri. Il faut dire, au passage, que la hausse du budget russe de la Défense n’y est pas non plus pour rien…

Le premier industriel russe de ce classement est le fabricant de missile Almaz-Anteï, qui se place au 11e rang avec un chiffre d’affaires de 8,8 milliards, coiffant l’américain L-3 Communications et le français Thales. Il est suivi par United Aicraft Corp (14e) et United Shipbuilding Corp (15e). La plus forte progression (+72,5%) revient à Uralvagonzavod (chars de combat et blindés).

« Les compagnies russes surfent sur l’augmentation des exportations et des dépenses militaires nationales. Il y a désormais 11 entreprises russes dans le Top 100 et leurs chiffres d’affaires combinés sur 2013-14 ont augmenté de 48,4 % », a relevé Siemon Wezeman, chercheur en chef du Sipri.

Dans le même temps, les résultats des industriels ukrainiens de l’armement se sont effondrés. Ainsi, UkrOboronProm est passé de la 58e à la 90e place du Top 100 en un an, avec une baisse de ses ventes de 50,2%. Un autre entreprise ukrainienne, Motor Sich, est carrément sortie du classement.

« La baisse sensible des ventes des compagnies ukrainiennes est largement due au bouleversement causé par le conflit dans l’Est de l’Ukraine, la perte du marché russe et la chute de la devise », explique Siemon Wezeman.

Dans les pays émergents, les industriels turcs et sud-coréens ont vu leurs résultats progresser significativement.

Pour les premiers, ASELSAN (+5,6%) et Turkish Aerospace Industry, qui a fait son entrée dans le Top 100 avec une hausse de ses ventes de 15,1%, se distinguent particulièrement.

« La Turquie est à la recherche de davantage d’autosuffisance dans ses approvisionnements en armes et ceci, couplé à une stratégie d’exportation agressive, a contribué à la croissance rapide des chiffres d’affaires de ASELSAN et TAI », fait valoir le Sipri.

Même chose pour les industriels sud-coréens, dont le total des ventes a augmenté de 10,5% en 2014. L’un d’eux, Hyundai Rotem, un fabricant de véhicules militaires, a même fait son entrée dans le classement du Sipri, grâce à un chiffre d’affaires ayant pratiquement doublé d’une année sur l’autre.

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