Faut-il décerner la Légion d’Honneur aux 130 victimes des attentats de Paris?

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L’idée part sans doute d’un bon sentiment et c’est en cela que l’on peut difficilement la remettre en cause. Mais ne dit-on pas que « l’enfer est pavé de bonnes intentions »?

De quoi s’agit-il? Selon Europe1, le président Hollande aurait l’intention de décerner la Légion d’Honneur aux 130 victimes des attentats commis le 13 novembre dernier à Paris et à Saint-Denis afin de leur rendre hommage. Le chef de l’État avait pris une décision similaire pour Hervé Gourdel, ce guide montagne enlevé et égorgé par un groupe se revendiquant de Daesh en Algérie, en septembre 2014.

Cependant, la Légion d’Honneur n’a pas vocation a être décernée pour rendre hommage, à titre posthume, à des victimes d’attentats, aussi ignobles soient-ils. Cette décoration a été instituée pour récompenser les mérites et distinguer les services éminents rendus à la Nation, conformément à l’esprit de la République dont elle est un des symboles.

Or, tout ne se vaut pas. Être victime du terrorisme parce qu’on était au mauvais endroit au mauvais moment (et aussi injuste ou absurde que cela puisse être) n’est pas la même chose que de perdre la vie dans l’exercice de ses fonctions, comme par exemple ce parachutiste tombé les armes à la main face aux jihadistes d’al-Qaïda dans le désert malien ou encore comme Ahmed Merabet, ce policier froidement assassiné par les frères Kouachi lors de l’attaque de la rédaction de Charlie Hebdo.

Il y a plein d’autres façons de rendre hommage aux victimes des attentats du 13 novembre. À commencer par soutenir leurs familles, qui sont dans l’épreuve. Il est aussi envisageable d’ériger un monument pour rendre hommage à leur mémoire, comme l’ont fait les États-Unis après le 11 septembre 2001.

Si l’attribution de la Légion d’Honneur devait revenir à confondre victimes et combattants, ce qui n’a jamais été fait, à de rares récentes exceptions près, en plus de deux siècles d’existence, alors il faudrait sans doute créer une autre médaille, d’une valeur proche de la Medal of Honor américaine.

Le général (2S) François Cann, Ancien membre du Conseil de l’Ordre de la Légion d’Honneur, se dit « indigné » par le projet présidentiel. « Si demain la Légion d’honneur devait, à son tour, être dénaturée du fait d’une initiative démagogique alors, la Nation serait en droit de se demander quel respect portent les Grands Maîtres pour notre Premier Ordre national », a-t-il lancé dans un communiqué.

Pour le moment, le président Hollande n’a, semble-t-il pas pris de décision, qui exige une modification du code de la Légion d’Honneur. Dans les jours prochains, il devrait s’en ouvrir au général Jean-Louis Georgelin, le Grand Chancelier de l’ordre. Mais quoi qu’il arrive, comme il en est le Grand Maître, il aura le dernier mot.

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