Vers une nouvelle hausse des effectifs de la Force opérationnelle terrestre?

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Au lendemain des attentats commis à Paris en janvier, le ministère de la Défense a lancé l’opération intérieure Sentinelle, en mobilisant, dans un premier temps, 10.000 soldats, essentiellement issus de la Force opérationnelle terrestre (FOT) de l’armée de Terre.

Seulement, comme Sentinelle s’inscrit désormais dans la durée, il a donc fallu revoir à la hausse les effectifs de la FOT, ces derniers devant passer de 66.000 à 77.000 hommes. Et pour cause : en raison de cet engagement, l’armée de Terre a dû renoncer à déployer 18 compagnies (3.000 hommes) dans les territoires d’outre-Mer.

Mais le plus préoccupant reste encore la préparation opérationnelle des unités appelées à intervenir sur un théâtre extérieur, qui a été drastiquement réduite depuis janvier.

« La préparation opérationnelle interarmes conduite dans les centres d’entraînement spécialisés a particulièrement pâti de cette nouvelle donne. De janvier à octobre de cette année, la quasi-totalité des rotations consacrées à la préparation opérationnelle interarmes dans nos centres a été annulée », a rappelé le général Arnaud Sainte-Claire Deville, commandant des forces terrestres, lors d’une audition devant la commission de la Défense, à l’Assemblée nationale.

Aussi, a-t-il poursuivi, « depuis le 7 janvier, la capacité à la manœuvre interarmes des unités des forces terrestres décroît donc inexorablement », ce qui « signifie qu’aujourd’hui nous ne serions pas en mesure de renouveler une opération comme Serval dans les mêmes conditions de déclenchement et qu’il serait très difficile d’engager dans l’urgence les forces terrestres sur un nouveau théâtre d’opérations extérieures ».

Cela étant, a expliqué le général Sainte-Claire Deville, « la mise en condition avant projection a été préservée mais uniquement au profit des unités destinées à être engagées sur les théâtres d’opérations les plus exigeants ». C’est à dire que la priorité a été donnée aux unités appelées à être engagées dans les opérations Barkhane (Sahel) et Sangaris (Centrafrique).

« Le niveau d’entraînement de mes forces est affecté » a insisté le général Sainte-Claire Deville, qui a toutefois estimé que « la solide expérience acquise par nos régiments en opérations extérieures depuis ces vingt dernières années » a limité les dégâts.

« Renouvelant environ 20 % à 30 % de nos effectifs annuellement, nous pouvons raisonnablement estimer que, d’ici à 3 ou 5 ans, sans le renfort des 11.000 recrues accordées aux forces terrestres en avril dernier, nous aurions eu, à partir de 2018, une armée de terre uniquement apte à mener à bien l’opération Sentinelle et incapable d’assumer l’opération Serval », a en outre fait valoir le CFT.

« Cette remontée en puissance est par conséquent indispensable pour nous permettre, compte tenu du niveau d’engagement intérieur et extérieur des forces terrestres, de préserver une excellence opérationnelle durement acquise et la condition des hommes et des femmes mobilisés », a-t-il affirmé.

Cependant, ces 11.000 nouveaux soldats ne seront pas immédiatement opérationnels puisqu’il faut d’abord les recruter, puis leur donner une instruction militaire et les entraîner.

« Lorsque nous aurons recruté, instruit, formé et entraîné nos 11.000 recrues, le soldat passera (…) 15 % de son temps en OPEX » et « 20 % à 25 % en mission de protection de ses concitoyens sur le sol national. Le temps dégagé grâce à ces effectifs supplémentaires sera alors réinvesti au profit de la préparation opérationnelle interarmes (…). L’augmentation des effectifs qui nous a été accordée en avril, nous permettra à moyen terme de retrouver à l’horizon de l’été 2017 un niveau d’entraînement acceptable pour une armée professionnelle de premier rang », a estimé le général Sainte-Claire Deville.

Seulement, les attentats du 13 novembre pourraient à nouveau changer la donne s’il est décidé de maintenir, dans la durée,les effectifs de l’opération Sentinelle à 10.000 soldats.

« Si, demain, dans le domaine de la protection du territoire national, l’hypothèse d’engagement d’urgence est portée à 10.000 hommes dans la durée, je considère, en tant que commandant des forces terrestres, que pour accomplir notre mission sur le territoire national tout en maintenant un bon niveau de préparation opérationnelle interarmes, si l’on applique le ratio de trois aux 3.000 hommes nécessaires, c’est de 9.000 hommes supplémentaires que j’ai besoin », a indiqué le général Sainte-Claire Deville. Ce qui porterait les effectifs de la FOT à 86.000 soldats.

Or, dans la présentation du projet d’actualisation de la Loi de programmation militaire, votée l’été dernier, il avait été précisé que « la diminution des effectifs initialement prévue à hauteur de 33.675 » postes « s’établira à 14.925 sur la période 2014-2019, dont 6.918 sur 2015-2019 », cette « moindre déflation » devant notamment bénéficier à la FOT.

Mais, devant le Congrès, le président Hollande a annoncé que les suppressions de postes dans les armées seraient annulées jusqu’en 2019. Dans quelle mesure cette décision concernera-t-elle les effectifs de la FOT?

« Il est impossible de prévoir quels arbitrages vont être rendus dans ce domaine. Tout ce que je peux vous dire, c’est que la décision prise en avril de recruter 11.000 hommes supplémentaires pour les forces terrestres doit nous permettre, à isopérimètre de charge, de retrouver à partir de l’été 2017 une préparation opérationnelle interarmes de qualité », a expliqué le général Sainte-Claire Deville aux députés. À condition que le volume des forces engagées dans l’opération Sentinelle ne reste à 10.000 soldats sur le long terme.

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