Le moral des armées reste le point de vigilance le plus important pour le général de Villiers

Lors de chaque audition devant les parlementaires, le général Pierre de Villiers, le chef d’état-major des armées (CEMA), insiste toujours sur un point : le moral des militaires.

Or, ce dernier est souvent mis à rude épreuve, comme ne manque pas de le souligner régulièrement le Haut Comité d’évaluation de la condition militaire (HCECM), présidé par Bernard Pêcheur.

Dans son rapport thématique publié en juin 2015, le HCECM a mis en avant plusieurs facteurs susceptibles d’aggraver le moral des militaires, évalué par l’indicateur de mesure du moral (I2M), dont les perspectives de carrière, liées aux incertitudes causées par les restructurations, les contraintes militaires par rapport à la vie familiale et sociale, les conditions de travail, souvent associées au manque de moyens et le tassement du pouvoir d’achat.

Une autre facteur a été souligné par le général de Villiers lors de sa dernière audition devant la commission sénatoriale des Affaires étrangères et des Forces armées. Ainsi, a-t-il relevé, le rapport thématique du HCECM a insisté sur « le sentiment », chez les militaires, d’une « insuffisante considération par rapport à celle accordée aux autres catégories sociales ».

Cette perception, explique le HCECM, se nourrit de plusieurs facteurs, comme les « les erreurs du calculateur de solde Louvois », et la « succession de réformes conduites depuis près de vingt ans, à l’occasion desquelles nombre de militaires estiment souvent avoir subi plus de contraintes qu’aucune autre catégorie de la fonction publique », avec des effectifs qui « diminuent alors même que le volume des missions reste inchangé et que l’environnement juridique est de plus en plus exigeant ».

En outre, explique aussi le rapport du HCEM, le le fait que les militaires « ont jamais été aussi peu nombreux depuis près de deux siècles », ce qui fait de la communauté militaire un groupe social bien moins fort numériquement et culturellement que par le passé et dont les spécificités, certes toujours marquées, sont aussi moins fréquemment visibles », ce qui « s’accompagne d’un sentiment marqué d’absence de reconnaissance qui renforce encore la crainte du déclassement. »

Dans son rapport annuel, publié il y a quelques jours, le HCEM indique que, pour l’année 2014, les « évolutions des armées et des services et le manque de moyens humains et matériels influent négativement sur le moral des militaires, tout comme le niveau des rémunérations, parfois jugé trop faible, la reconversion, la communication interne et la progression professionnelle ».

En revanche, a-t-il précisé, « ce sont les items sur les conditions de travail qui donnent le plus de satisfaction ». Et d’ajouter : « Le sentiment d’utilisé, les responsabilités confiées et l’intérêt de la mission sont également perçus par tous comme étant particulièrement positifs ».

Voilà pourquoi le moral est « au plus haut en opération » et « plus fragile en garnison, dans les états-majors et notamment à Paris », comme l’a souligné le général de Villiers devant les sénateurs. Or, a-t-il fait valoir, le « moral est une part déterminante de la capacité opérationnelle » car « on ne gagne pas sans les forces morales. »

« Oui, les hommes et les femmes de nos armées ont un sens aigu du service. Face aux dangers, face aux terroristes, ils ont pleinement conscience de leurs responsabilités. Leur moral est ainsi excellent dès qu’ils sont directement employés pour la défense de notre pays. Je le constate lorsque je les visite en opération extérieure ou intérieure, là où se concrétise le sens de leur engagement », a affirmé le CEMA.

Mais le général de Villiers a mis l’accent sur la considération portée au militaire, en citant justement le rapport du HCECM. Et, selon lui, ce sentiment « d’inffusante considération » que ce dernier décrit est « le résultat d’années d’efforts consentis par les militaires ».

« Nous devons être attentifs à ces femmes et ces hommes qui enchaînent les missions sans se plaindre, qui supportent les dysfonctionnements de Louvois avec courage, qui font passer leur devoir avant leurs droits; ils ont besoin de notre reconnaissance et de notre soutien », a ainsi plaidé le général de Villiers. « Nos militaires défendent avec foi les valeurs de notre pays : la liberté, ils combattent pour elle ; l’égalité, ils la vivent sous l’uniforme ; la fraternité, elle est leur quotidien », a-t-il fait observer aux sénateurs.

« Veiller au moral est d’autant plus important que les armées sont, depuis toujours, le creuset d’une jeunesse qui est à l’image de notre nation, dans toute sa diversité et sa richesse. Il en va de la pérennité de notre modèle social militaire », a estimé le CEMA.

Aussi, pour éviter une dégradation de ce moral, le général de Villiers s’est dit persuadé de la nécessité de « prendre en compte les préconisations du HCECM en matière de condition du militaire pour l’avenir », car c’est un enjeu opérationnel! ». Et d’insister : « C’est un point d’attention majeur pour moi! ».

Ces recommandations évoquées par le général de Villiers sont :

  • Garantir dans la durée la confiance que la Nation porte à ses soldats, en faisant mieux connaître les missions des forces armées, en veillant à ce que ces dernières demeurent à l’image de la Nation
  • Préserver l’état militaire, en veillant aux bonnes conditions de mise en œuvre des nouveaux droits accordés aux militaires, notamment le droit d’association professionnelle
  • Garantir une politique salariale juste et équilibrée
  • Ouvrir une voie d’accès aux militaires contractuels et de carrière dans la ‘fonction publique en uniforme’ et dans la fonction publique hospitalière
  • Revaloriser le rôle du commandement en matière de condition militaire
  • Améliorer les conditions de travail et de viequotidienne et la condition du personnel en opérations
  • Concevoir une politique globale de la condition militaire.

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