Pour M. Valls, « le régime syrien ne peut en aucun cas être un partenaire »

Le Parlement a approuvé, le 25 novembre, à la quasi-unanimité, la « prolongation de l’engagement des forces aériennes au-dessus du territoire syrien » contre l’État islamique (EI ou Daesh). Ainsi, 325 sénateurs ont voté pour tandis que 21 se sont abstenus. À l’Assemblée nationale, sur 529 votants, seulement 4 députés ont exprimé leur opposition et 10 autres ont choisi de s’abstenir.

Cependant, cette quasi-unanimité masque des réserves sur la stratégie suivie par le gouvernement pour combattre Daesh. S’exprimant au nom du groupe « Les Républicains », l’ancien Premier ministre, François Fillon, qui s’était prononcé quelques heures plus tôt pour un soutien au Hezbollah parce qu’il combattrait les jihadistes en Syrie, a ainsi déploré le « temps perdu » par le président Hollande pour mettre en place une « coopération » avec la Russie.

« Peut-on combattre côte-à-côte avec les Russes, alors que nous leur imposons dans le même temps des sanctions européennes? La réponse est non! », a ainsi lancé M. Fillon, qui a aussi estimé que le « leitmotiv du ‘ni Assad ni Daech’ fut une erreur » car « pour vaincre les terroristes, nous ne pourrons pas nous passer d’une liaison avec les autorités syriennes ». Et de demander « l’ouverture d’un poste diplomatique à Damas. »

« Nous avons dans ce débat, et c’est normal, des divergences. Non, nous ne coopérons pas avec le régime syrien. Non, nous ne rétablirons pas des relations diplomatiques avec la Syrie », lui a rétorqué M. Valls. « Vous prétendez que nous nous sommes trompés sur la Syrie. Mais c’est bien en mars 2012 que les relations ont été rompues avec le régime de Bachar », a-t-il rappelé.

« Qu’est-ce ce qui justifierait aujourd’hui que nous rétablissions des relations avec le régime de Damas d’autant plus que, tout au long de ces dernières années, de ces derniers mois, ce régime n’a cessé lui-même de jouer précisément avec Daesh pour mieux lutter contre sa propre opposition? », a encore demandé l’actuel Premier ministre.

S’agissant de la coopération avec Moscou, M. Valls a fait quelques rappels. « Personne ne peut démontrer le contraire, jusqu’à il y a encore quelques semaines, la Russie soutenait le régime de Bachar el-Assad et n’intervenait pas en Syrie. Quand elle est intervenue en Syrie, elle a concentré d’abord ses frappes contre l’opposition, y compris l’opposition modérée au régime de Bachar el-Assad », a-t-il dit.

Sur la question des sanctions prises contre Moscou dans l’affaire ukrainienne, le chef du gouvernement a fait valoir qu’on « ne peut pas affirmer faire partie de la communauté internationale sans que cela ait un certain nombre de conséquences ». Et de préciser : « Nous souhaitons que les sanctions contre la Russie soient levées mais elle doit remplir sa part du contrat (…) qu’elle a signé dans le cadre des accords de Minsk. »

Au sujet de la mise en place d’une « grande coalition pour lutter contre le terrorisme », M. Valls a noté de « différentes contradictions ou ambiguïtés chez un certain nombre de pays ».

« La France, elle, est claire quant à son objectif de lutter contre Daech. On ne peut pas vouloir une grande coalition sans d’abord se mettre d’accord sur le fait que le seul objectif, c’est de lutter contre Daesh. Chacun doit être au clair, pas seulement la Russie mais tous les pays, sur cette question », a-t-il affirmé, précisant que l’on « ne peut pas bâtir une grande coalition en excluant les pays sunnites, en posant des préalables relatifs uniquement à la Turquie, l’Arabie Saoudite et d’autres pays du Golfe ».

Et d’expliquer : « Si cette grande coalition ne repose que sur un axe chiite, vous n’aurez pas les autres pays, à commencer par les États-Unis d’Amérique et les pays européens et vous risquez de créer dans cette région du monde des conflits encore bien plus importants avec des conséquences majeures dans notre pays ».

Aussi, a insisté M. Valls, « on ne peut pas créer une coalition uniquement avec le régime de Bachar el-Assad, le Hezbollah et l’Iran » et « cela aura les mêmes conséquences que celles que nous avons connues dans d’autres régions du monde ».

« Pour résumer la question en une formule, a-t-il conclu,  attention à une nouvelle forme de néoconservatisme qui, au lieu d’aller de l’ouest vers l’est, va cette fois de l’est vers l’ouest. Il entraînera les mêmes conséquences, les mêmes absurdités et les mêmes divisions. »

De son côté, le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a rappelé les 4 axes de la stratégie française face à l’EI.

« Il faut frapper Daech au cœur pour permettre la reconquête des territoires et pour éviter que l’organisation ne développe son attractivité », le « priver de ses ressources et de ses bases, y compris économiques et logistiques », l’empêcher « de gagner du terrain autour des régions qu’il contrôle déjà au Proche-Orient » et « contenir la dispersion de la menace et cloisonner davantage les théâtres, en empêchant l’extension du groupe qui se profile déjà au Maghreb ».

Pour le ministre, qui a dit partager « l’idée qu’il faut avoir avec la Turquie un dialogue très clair sur sa position », ces 4 axes « forment une seule stratégie, la stratégie de la France » et « aucun d’entre eux ne doit être sous-estimé » car « s’il existe, au centre, une action militaire, il faut que l’action préventive et l’action diplomatique permettent de réaliser un ensemble cohérent. »

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