Pour M. Le Drian, « tout le monde a besoin de tout le monde » contre Daesh

Les jours qui viennent vont être intenses sur le plan diplomatique, le président Hollande devant faire deux importants déplacements, d’abord à Washington puis à Moscou, pour évoquer les moyens à mettre en oeuvre pour « anéantir Daesh », pour reprendre l’expression utilisée le 22 novembre par le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, lors du Grand Rendez-vous d’Europe1/iTélé/Le Monde.

À cette occasion, ce dernier a mis en avant que la lutte contre Daesh (État islamique ou EI) est « à la fois une guerre de l’ombre et une guerre du champ de bataille » car il faut « combattre un ennemi à deux têtes », c’est à dire « un État en constitution avec une armée » qui occupe une partie de l’Irak et de la  Syrie et un mouvement terroriste international qui en est l’émanation et dont l’objectif est de frapper le monde occidental.

« Il faut traquer les terroristes, ceux qui esssaient de frapper la démocratie (..) et il faut en même temps frapper au coeur, dans le champ de bataille, au Levant pour anéantir l’État islamique », a insisté M. Le Drian. Aussi, a-t-il continué, « dans cette affaire, (…) tout le monde a besoin de tout le monde » et il faut donc « trouver des formes de coordination » ainsi que les « moyens d’agir le mieux possible ». Mais à la condition, toutefois, de partager le même objectif.

S’agissant des Russes, qui ont entamé une campagne aérienne en Syrie le 30 septembre dernier, M. Le Drian a une nouvelle fois noté une évolution de leur part pouvant s’expliquer par la responsabilité de Daesh dans la perte d’un de leur avion commercial au-dessus du Sinaï, la présence importante de russophones [ndlr, ce qui n’est pas nouveau] dans les rangs jihadistes et dont les « objectifs sont vraisemblablement d’agir en Russie » ainsi que par la faiblesse des forces de Bachar el-Assad, qui fragilise leur « scénario initial », qui consistait « à préserver leurs propres intérêts » en Syrie via des accords avec le régime syrien.

« Désormais, la Russie frappe les zones de Daesh », a noté M. Le Drian. Les Russes « le font de manière très significative à Raqqa et à Deir Ezzor », a-t-il continué. « Il y a une évolution. Jusqu’où va-t-elle? Il faudra le vérifier avec M. Poutine. Il est bien évident que si l’on est dans une coordination, ça veut dire que la Russie frappera Daesh et ne frappera pas plus l’Armée syrienne libre », a-t-il expliqué.

Quant aux États-Unis, M. Le Drian a surtout insisté sur la coopération en matière de renseignement militaire, domaine où, a-t-il souligné, « chacun avait son autonomie, le renseignement étant aussi un outil de souveraineté ».

« On peut considérer aujourd’hui, a-t-il dit, que l’action commune est extrêmement performante » car désormais « nous sommes à livre ouvert sur l’Irak et la Syrie », c’est à dire que Français et Américains se partagent les informations. « Nous étions partenaires. Nous sommes maintenant totalement en action commune », a précisé le ministre, qui a par ailleurs exclu, du moins pour le moment, toute coopération avec les services syriens.

Concernant le soutien demandé par la France à ses partenaires de l’Union européenne, M. Le Drian a précisé qu’il prendrait trois formes.

« Un certain nombre d’Etats vont, je l’espère, participer aux actions de frappes, aux actions fortes sur le territoire syrien et irakien (…) D’autres vont pouvoir apporter du soutien logistique (hélicoptères, avions de transport tactiques ou autres) à la France, voire soulager l’effort militaire français avec des moyens en hommes sur d’autres théâtres, notamment au Sahel », a-t-il indiqué.

Enfin, sur le volet strictement militaire, M. Le Drian a estimé nécessaire de « frapper Mossoul (Irak) où se trouvent les lieux de décision politique (de l’EI) et Raqqa (Syrie) où se trouvent les centres de formation des ‘foreign fighters’, c’est-à-dire les combattants destinés à agir à l’extérieur » ainsi que les « capacités de ressources qu’a l’État islamique, c’est-à-dire les lieux de pétrole, les champs pétrolifères ». Au passage, le ministre a souligné que le « marché noir » lié au pétrole exploité par les jihadistes « servait aussi Bachar el-Assad ».

Mais cela ne suffira pas pour « éradiquer » l’EI : pour cela, une opération terrestre, avec un appui aérien conséquent, est nécessaire.  « Une victoire et une destruction de Daech passent obligatoirement à un moment donné par une présence au sol (..) cela ne veut pas dire la présence française au sol, a affirmé M. Le Drian.

« Pour battre l’EI, il faut des frappes en appui (de la coalition) et des forces au sol qui peuvent être kurdes ou de l’Armée syrienne libre », a-t-il insisté.

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