Le tir de missiles de croisière russes depuis la Caspienne est surtout un message adressé à l’Otan

Des responsables américains ayant requis l’anonymat ont affirmé auprès de CNN que 4 des 26 missiles de croisière 3M14 Kalibr (code Otan : SS-N-30) tirés le 7 octobre par des navires russes depuis la mer Caspienne n’ont pas atteint leurs cibles en Syrie puisqu’ils seraient « vraisemblablement » tombés en Iran.

Ce qu’a presque immédiatement démenti le ministère russe de la Défense. « Tous les missiles tirés de nos croiseurs ont atteint leur cible », a affirmé le général Igor Konachenkov, son porte-parole. « Contrairement à CNN, nous ne faisons pas référence à des sources anonymes mais nous montrons les parcours de nos missiles et leurs cibles pratiquement en temps réel », a-t-il ajouté.

Les responsables américains n’ont pas précisé les régions iraniennes où ces 4 missiles se seraient égarés. Et Téhéran n’a pas confirmé la chute de ces engins sur son territoire. En tout cas, il sera difficile de démêler le vrai du faux étant donné que l’Iran est aux côtés de la Russie pour défendre le régime de Bachar el-Assad en Syrie. Cela étant, Téhéran a démenti.

Quoi qu’il en soit, et pour être honnête, l’annonce de ces tirs de  SS-N-30 par la frégate Daghestan (projet 11661K) et les corvettes lance-missiles Grad Sviajsk, Ouglitch et Veliki Oustioug (projet 21631), qui appartiennent à la flottille russe de la Caspienne aura été surprenante, dans la mesure où, d’un point de vue opérationnel, ils ne se justifiaient pas.

En effet, la Russie dispose, en Syrie, de bombardiers qui ont déjà frappé les zones visées par ces missiles de croisières. Au passage, ces derniers ont détruit 11 cibles. Qui plus est, les navires russes croisant en Méditerranée orientale auraient pu tout aussi bien être sollicités, d’autant plus qu’ils sont nettement plus proche du théâtre des opérations que ceux de la mer Caspienne.

Au soir des tirs de ces missiles, le ministère russe n’a pas lésiné sur la communication, en diffusant une vidéo montrant les lancements. Le chef des opérations de l’état-major russe, le général Andreï Karpalatov, y est allé de son couplet, en précisant que ces frappes, qui ont demandé une « intense préparation », notamment au niveau du renseignement, avaient été précédemment approuvées par les pays partenaires (l’Iran et l’Irak).

« L’écart avec les cibles est inférieur à 5 mètres », a aussi fait valoir le général Karpalatov. « Les résultats des frappes confirment la haute efficacité des missiles de longue portée, presque 1.500 kilomètres », a pour sa part commenté Sergueï Choïgou, le ministre russe de la Défense.

Du côté des Occidentaux, le secrétaire américain à la Défense, Ashton Carter, a déploré que ces missiles de croisières aient été tirés depuis la Caspienne « sans avertissement » et que certains d’entre eux ont « approchés de quelques kilomètres un de nos drones ».

Aussi, le lancement de ces 26 missiles par la flottille de la Caspienne et dont la portée approcherait les 2.600 km, apparaît plus comme étant une démonstration de force de Moscou adressée non pas aux adversaires du régime de Bachar el-Assad mais aux États-Unis et à l’Otan. D’autant plus que ces  SS-N-30, dont c’était l’épreuve du feu, peuvent être dotés de charges conventionnelles et nucléaires. À noter que les Tomahawk – l’équivalent américain de ce missile russe – « nucléarisés » (versions TLAM-N et GLCM) ont tous été retirés du service.

Aussi, c’est une façon pour Moscou de contourner le traité sur les Forces nucléaires intermédiaires (FNI), qui, conclu en 1987,  « oblige les deux États parties [ndlr, États-Unis et Russie] à détruire, trois ans au plus tard après l’entrée en vigueur du Traité, tous leurs missiles balistiques et de croisière lancés à partir du sol ayant une portée comprise entre 500 et 1.000 kilomètres et ceux dont la portée est comprise entre 1.000 et 5.500 kilomètres ».

En tout cas, ces missiles ont de quoi préoccuper l’amiral William Gortney, le patron du Commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord (NORAD).

Le 8 octobre, lors d’une intervention devant l’Atlantic Council, il a cité l’aviation stratégique et les missiles de croisière russes lancés depuis un sous-marin ou un navire de surface, lesquels constituent un « grand défi » car cela « nous oblige à attraper des flèches au lieu d’essayer de toucher l’archer ».

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]