Quand Napoléon Ier s’intéressait aux sous-marins

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Dans son dernier numéro, le magazine Guerres & Histoire s’attache à tordre le cou à 12 idées reçues sur la Grande Armée de l’empereur Napoléon Ier. Selon l’une d’elles, ce dernier n’aurait manifesté que peu d’intérêt aux innovations technologiques de son époque. Ce qui peut déjà paraître surprenant quand l’on sait le jeune Bonaparte a commencé sa carrière en tant qu’officier d’artillerie et qu’il a donné à l’École polytechnique le statut militaire qu’elle conserve encore aujourd’hui…

Aussi, pour le bimestriel, « en matière de technologie, les faits montrent ainsi que l’Empereur a fait preuve de pragmatisme, sinon d’opportunisme, et n’a fait que suivre l’avis de ses experts quant à des innovations très loin d’être au point ». Et parmi ces dernières figure… le sous-marin, dont il faudra effectivement la guerre de Sécession, soit plus de 50 ans plus tard, pour en voir un couler un autre navire (le CSS Hunley enverra par le fond, en février 1864, l’USS Housatonic, près de Charleston).

En 1800, l’ingénieur américain Robert Fulton proposa à la France le Nautilius, un sous-marin à propulsion humaine, capable d’utiliser des mines pour couler des navires adverses. Les recherches visant à construire un submersible ne sont alors pas nouvelles. Le physicien Denis Papin s’y était intéressé à partir de 1690, comme, avant lui, le scientifique hollandais Cornelus Drebbel.

Lors de la guerre d’Indépendance américaine, David Bushnell mit au point ce qui peut être considéré comme étant le premier sous-marin à vocation militaire, capable de se déplacer de façon autonome et doté d’hélices pour sa propulsion. Mais il s’avéra peu efficace.

Quant au Nautilus proposé par Robert Fulton, il s’agit du premier sous-marin à utiliser un double système de propulsion, avec une voile repliable et une hélice à main. De dimensions réduites (6m48 de long pour 1m90 de diamètre), il pouvait accueillir un équipage de 3 personnes.

Avec sa coque cylindrique et carrénée de cuivre, il était – du moins théoriquement – en mesure plonger à 10 mètres de profondeur, avec une autonomie de 3 heures. En outre, il disposait d’une sorte de « kiosque » muni de hublots. Son armement consistait en charge explosive flottante (l’ancêtre de la torpille) qu’il devait approcher des vaisseaux ennemis.

Les premiers essais du Nautilius eurent lieu dans la Seine, le 13 juin 1800. Prometteurs, ils furent encouragés par Bonaparte, alors Premier consul, et se poursuivirent donc au Havre et à Brest.

En septembre 1800, Robert Fulton trouva l’occasion de tester les capacités miliaires de son Nautilus en s’attaquant à deux navires britanniques au mouillage devant les îles Saint-Marcouf. Répéré lors de son approche, ce fut un échec. Le même scénario se reproduisit quelques mois plus tard devant Le Conquet.

Ces échecs sonnèrent le glas du Nautilus. En octobre 1801, rappelle Guerre & Histoire, une commission présidée par le ministre de la Marine, rend un avis négatif sur la poursuite du projet. Ce dernier sera d’autant plus abandonné que les relations entre la France et le Royaume-Uni s’étaient à l’époque améliorée.

Pour autant, l’idée de concevoir un sous-marin ne fut pas abandonnée par tout le monde. Il faudra attendre 1811 et les frères Coëssin (Jean-Alexandre, polytechnicien, et François Guillaume) pour voir une nouvelle tentative, avec le Nautile. De forme ellipsoïde, il pouvait embarquer 9 membres d’équipage. Muni de deux caissons (ballasts), il était propulsé par une double rangée de rames. Cependant, malgré des débuts prometteurs, le projet fut, là encore, abandonné, en raison d’un trop grand nombre de défauts (difficultés à respirer pour les marins, propulsion défaillante, etc….).

Pour Guerre & Histoire, l’Empereur était donc plutôt ouvert aux nouveautés (outre les sous-marins, il est aussi question du fusil à chargement par culasse et des « fusées de guerre »). Mais « s’il faut lui faire un reproche, poursuit le magazine, c’est avant tout de ne pas avoir mis en place une réelle politique de recherche et d’innovation ».

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