La coalition internationale anti-EI soutient le plan militaire et politique irakien visant à reconquérir la province d’Al-Anbar

Le Premier ministre irakien, Haider al-Abadi a dénoncé, ce 2 juin, l’échec de la communauté internationale dans la lutte contre le groupe État islamique (EI ou Daesh), qui contrôle désormais une grande partie des territoires sunnites en Irak ainsi que près de la moitié de la Syrie après ses récentes conquêtes de Ramadi et de Palmyre.

Selon Fabrice Balanche, géographe et spécialiste de la Syrie, cité par l’AFP, l’EI aurait en effet conquis, au total, 300.000 km2, ce qui correspondrait au « 11e pays arabe par sa superficie, derrière Oman, sur les 22 que comptent la Ligue arabe ». Et cela alors qu’une coalition emmenée par les États-Unis et à laquelle la France participe (opération Chammal) a été mise sur pied pour contrer les jihadistes.

« Je pense que c’est un échec de la communauté internationale. Concernant le soutien à l’Irak, il y a beaucoup de mots mais peu d’actions sur le terrain », a ainsi dénoncé M. al-Abadi, à Paris, lors d’une conférence de presse donnée avant l’ouverture d’une réunion des représentants des pays membres de la coalition anti-EI.

Le chef du gouvernement irakien a affirmé que ses forces armées n’étaient pas suffisamment aidées, en particulier pour ce qui concerne les armes et les munitions. « Nous n’en avons pas reçu beaucoup, presque rien. Nous ne devons compter que sur nous-mêmes », a-t-il avancé.  »

« En raison de problèmes fiscaux, nous ne sommes pas en mesure de conclure de nouveaux contrats de fourniture d’armes. La plupart des contrats avaient été conclus par le précédent gouvernement avec les Russes. Les Russes sont désormais soumis à des sanctions américaines et il est très difficile de payer pour avoir ces armes. L’argent est là à la banque mais nous ne pouvons les avoir », a encore fait valoir M. al-Abadi. « Nous ne demandons pas des armes mais s’il vous plaît laissez-nous acheter des armes de manière plus facile », a-t-il plaidé, sans aborder la conduite des forces irakiennes, lesquelles ont abandonné Ramadi aux jihadistes.

Par ailleurs, le Premier ministre irakien a souligné la présence toujours plus importantes d’étrangers dans les rangs des jihadistes.  » Dans le passé, les combattants irakiens étaient estimés à 58% pour 42% d’étrangers. Aujourd’hui, la proportion s’est inversée avec 60% de combattants étrangers contre 40% d’Irakiens », a-t-il assuré. « Il y a un problème international, il doit être résolu », a-t-il continé, avant de demander « pourquoi il y a autant de terroristes viennent d’Arabie saoudite, du Golfe, d’Egypte, de Syrie, de Turquie et de pays européens ». Et d’ajouter : « Nous avons besoin d’un travail politique de nos partenaires au sein de la coalition à ce sujet ».

À l’évidence, la stratégie jusqu’à présent suivie ne donne pas les résultats espérées. La coalition internationale a effectué plus de 4.000 frappes contre les positions des jihadistes. Pour être totalement efficaces, elles doivent appuyer des troupes sol, comme cela a été le cas à Kobané, où les milices kurdes ont infligé un cuisant revers à l’EI.

Pour le chef du gouvernement irakien, « le soutien aérien n’est pas suffisant (…) Il y a trop peu de surveillance. Daech est mobile et se déplace en très petits groupes ».

À cela, il vient s’ajouter les tensions communautaires. Les milices chiites, appuyées par l’Iran, n’ont pas la réputation de faire dans la demie-mesure face aux sunnites. Ces derniers sont donc tentés de rejoindre l’EI, ce qui complique davantage la donne. En outre, la question de leur contrôle opérationnel reste posé étant donné que, visiblement, elles sont « conseillées » par des responsables de la force al-Qods, l’unité des Gardiens de la Révolution iranien, chargée des opérations à l’étranger.

Aussi, la marge est étroite pour la coalition internationale, pour qui il n’est pas question d’engager des troupes au sol, si ce n’est des conseillers militaires auprès des forces irakiennes. Du coup, la seule chose qu’elle peut faire en plus n’est que d’apporter son soutien au plan de reconquête des territoires contrôlés par l’EI que lui a soumis le Premier ministre irakien.

« C’est un bon plan militairement et politiquement pour reprendre la province d’al-Anbar », a commenté Anthony Blinken, le secrétaire d’État américain adjoint. « En Irak, aujourd’hui, nous avons la bonne stratégie et elle sera gagnante si tous remplissent leurs obligations », a-t-il ajouté.

On ignore les détails de ce plan présenté par M. al-Abadi. Mais, dans les grandes lignes, il prévoit de miser sur les tribus sunnites de la province d’al-Anbar afin de les convaincre de combattre aux côtés des forces irakiennes. Il est aussi question que toutes les troupes engagées – donc les milices chiites – soient placées sous le commandement et le contrôle du Premier ministre irakien.

« La détermination est totale dans la lutte internationale contre le groupe État islamique, un combat de long terme », a assuré Laurent Fabius, le ministre français des Affaires étrangères.

Mais ce combat passe aussi par la Syrie. Là, les membres de la coalition internationale ont noté, dans une déclaration commune, « l’incapacité et l’absence de volonté du régime de Bachar el-Assad à lutter contre Daech ». Et d’en appeler « au prompt lancement d’un véritable processus politique inclusif, sous l’auspice des Nations unies » afin de rétablir la paix, ce qui passerait par la création d’un gouvernement de transition incluant des représentants de l’opposition modérée syrienne.

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