Le chef du Pentagone critique sévèrement l’attitude des forces irakiennes à Ramadi

La semaine passée, la ville de Ramadi, capitale de la province d’al-Anbar, en Irak, tombait aux mains des jihadistes du groupe État islamique (EI ou Daesh) à l’issue de combats ayant fait au moins 500 tués (y compris parmi les civils).

Pour le général Martin Dempsey, le chef d’état-major interarmées américain, les forces irakiennes « n’ont pas été chassées » de Ramadi mais elles se sont « volatilisées », comme à Mossoul, un an plus tôt. Un constat partagé par Ashton Carter, le chef du Pentagone, lors d’un entretien accordé à CNN le 24 mai.

« Ce qui est arrivé apparemment c’est que les forces irakiennes n’ont pas montré de volonté de se battre. (…) Nous avons un problème avec la volonté des Irakiens de combattre l’EI et de se défendre », a ainsi affirmé le secrétaire américain à la Défense. « Les soldats irakiens n’étaient pas en nombre insuffisant, ils dépassaient largement en nombre les forces opposées, et ils ne sont pas parvenus à se battre. Ils se sont retirés de la zone », a-t-il déploré.

« Nous pouvons leur fournir un entraînement, nous pouvons leur apporter des équipements, mais nous ne pouvons évidemment pas leur donner la volonté de se battre », a encore poursuivi M. Carter. « Mais, a-t-il continué, si nous leur fournissons un entraînement, des équipements et de l’aide, j’espère qu’ils se mettront à vouloir se battre parce que c’est seulement s’ils combattent que l’EI peut être vaincu ».

Toujours d’après le responsable américain, « les bombardements aériens » de la coalition emmenée par les États-Unis son « efficaces ». Mais, a-t-il souligné, « rien ne peut remplacer la volonté des forces irakiennes de se battre. »

« Nous ne pouvons pas porter la victoire, seuls les Irakiens peuvent le faire, et en particulier dans ce cas des tribus sunnites dans l’ouest. Et si nous devons changer la manière dont nous aidons les forces irakiennes, nous l’envisagerons », a encore insisté M. Carter.

Ce constat, sévère, a été récusé par Haider al-Abadi, le Premier ministre irakien. Pour ce dernier, Ashton Carter « a reçu des informations inexactes ». Et d’assurer que Ramadi serait reprise « dans quelques jours ». Une contre-offensive a en effet été lancée le 24 mai, avec le concours des milices chiites, soutenues par l’Iran, et de tribus sunnites. A priori, la localité de Houssaïba al Charkiya, située à une dizaine de kilomètres à l’est de la capitale d’al-Anbar, aurait été reconquise.

Même si des responsables militaires américains ont considéré que la perte de Ramadi n’avait pas une portée stratégique majeure, il n’en reste pas moins que, désormais, l’EI pourrait menacer Bagdad et le pays « chiite ».

« La libération d’Anbar est le départ de la libération de Bagdad et de Kerbala », aurait d’ores et déjà prévenu Abou Bakr al-Baghdadi, le chef de l’EI, dans une vidéo de propagande.

Co-auteur d’un essai intitulé « EI, à l’intérieur de l’armée de la terreur » (ISIS : Inside The Army Of Terror), Hassan Hassan a expliqué à l’agence Reuters que, après le revers de la semaine passée, « le débat au sein de la communauté sunnite d’Irak porte désormais sur ces sunnites de Ramadi qui coopéraient avec le gouvernement contre Daech mais qui ont perdu ».

Et Hassan Hassan d’ajouter : « Les autres villes sunnites résistant à Daech vont à présent y réfléchir à deux fois ». Et cela alors que « les sunnites sont en train d’accepter que Daech est leur armée sunnite ». Aussi, estime-t-il, « la chute de Ramadi est un moment charnière pour l’Irak ». D’autant plus que les représailles commises par les miliciens chiites sur les civils sunnites après la reconquête de Tikrit ne faciliteront évidemment pas les choses….

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]