Un emprunt pour trouver les 2,2 milliards d’euros manquants au budget de la Défense?

Le Premier ministre, Manuel Valls, a envoyé les « lettres de cadrage » aux différents ministères pour leur demander de faire de nouveaux efforts budgétaires afin de trouver 2,8 milliards d’euros économies en plus d’ici 2016.

D’après le quotidien Les Echos, les ministères de l’Éducation, de la Justice, de l’Intérieur et de la Culture en seraient dispensés étant donné qu’ils sont jugés « prioritaires ». Quant au budget des forces armées, l’on connaîtra son sort à l’issue d’un conseil d’un Défense qui se tiendra le 29 avril. A priori, et en toute logique, il devrait échapper à un nouveau coup de rabot dans la mesure où le président Hollande a annoncé une déflation moindre de ses effectifs par rapport à ce qui avait été fixé par la Loi de programmation militaire (LPM).

Mais ce conseil de Défense devra aussi répondre à une question cruciale : comment trouver les 2,2 milliards d’euros de recettes exceptionnelles nécessaires pour que le montant du budget de la Défense soit de 31,4 milliards? Cette somme devait provenir de la vente aux enchères de fréquences hertziennes de la bande des 700 MHZ. Or, cette opération ne pourra pas se faire dans les délais. Le risque est donc de voir les armées être en cessation de paiement dès l’été prochain.

Le retard de la vente des fréquences avait été anticipé par le ministère de la Défense qui, en octobre dernier, a avancé la solution des sociétés de projet. L’idée est de créer des structure dotés de capitaux publics, issus de la vente de participations de l’État, afin de leur permettre de racheter du matériel aux armées pour les leur louer dans la foulée. Et la loi sur la croissance et l’activité (dite loi Macron) autorise de tels montages.

Or, cette solution est loin de faire l’unanimité. Mais, présentée comme étant la seule, les parlementaires sceptiques – du moins pour certains – ont fini par s’y rallier. Seulement, pour le ministère des Finances et des Comptes publics, ces sociétés de projet ne sont pas une bonne option. Pourquoi? Parce qu’elles sont « consolidées », c’est à dire qu’elles constituent une dépense « maastrichtienne ». D’où son opposition avec celui de la Défense.

En février, le secrétaire d’État au Budget, Christian Eckert, a avancé l’existence d’un plan B… Laquelle a été démentie par Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense, pour qui il n’y a absolument pas d’alternative aux sociétés de projet.

Seulement, le montage de ces dernières a de quoi rendre sceptique… Déjà, elles auront un « surcoût évident », selon Laurent Collet-Billon, le Délégué général à l’armement (DGA), pour qui, « au fond, on transforme ce qui était à l’origine des crédits budgétaires en un prêt, ce qui a un coût ». En outre, il est question d’avoir recours au « marché du crédit » pour abonder le capital de ces sociétés de projet, l’Agence des participations de l’État n’étant pas ravie à l’idée de céder des actifs qui rapportent des dividendes substantiels aux finances publiques.

Par ailleurs, le ministre des Finances, Michel Sapin, voit les choses autrement. « Entre juillet et décembre, le ministère de la Défense a un problème de trésorerie et non un problème de budget », a-t-il dit dans les colonnes du Monde, après visiblement avoir renoncé à demander aux armées de trouver les sommes manquantes dans leurs budgets (ce qui aurait été possible en prenant en compte la baisse du prix du pétrole par exemple, comme l’avait affirmé M. Eckert).

En outre, on fait valoir à Bercy que ces « sociétés de projet coûtent cher et qu’elles ne servent à rien ». Et l’on explique que les commandes du ministère de la Défense devront être passées en juin et que la loi Macron ne sera pas promulguée avant juillet. « Le temps que le dispositif soit opérationnel, nous serons en octobre », a expliqué, à l’AFP, une source placée au ministère des Finances. D’où l’idée d’emprunter les 2,2 milliards manquants à six mois. « Les taux sont négatifs, ça nous rapportera de l’argent! », a-t-on fait valoir.

Le dernier mot reviendra au président Hollande, qui s’était déjà prononcé en faveur de ces sociétés de projet au début de cette année. Mais, il faudra aussi d’autres ressources pour financer le maintien d’une partie des effectifs qui devaient être supprimés, ainsi qu’un nouveau plan d’équipement des armées qui sera examiné à l’occasion de la réactualisation de la LPM 2014-2019. Et sans oublier le surcoût de l’opération Sentinelle (1 million par jour), appelée à durer…

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