Pour M. Poutine, la non livraison des BPC « Mistral » à la marine russe est « sans importance »

En novembre dernier, et compte-tenu de la situation dans l’est de l’Ukraine, le président Hollande décida de « surseoir jusqu’à nouvel ordre » à la livraison à la marine russe du Vladivostok, l’un de deux Bâtiments de projection et de commandement (BPC) de type Mistral commandés par la Russie en juin 2011 pour 1,2 milliard d’euros. « On pourrait ne jamais livrer. Il faut que les Russes se rendent compte de cette situation », avait insisté, quelques jours plus tard, Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense.

Visiblement, que les BPC soient livrés ou non n’a pas l’air de déranger Vladimir Poutine, le président russe. Déjà, en décembre, il avait dit espérer que la France « rendra l’argent que nous avons dépensé » en cas de non respect du contrat signé trois ans plus tôt. « Si la France rembourse la Russie, nous n’aurons pas de requêtes particulières », avait-il même promis.

Les propos du chef du Kremlin tranchaient alors avec les déclarations d’autres responsables russes. Comme ceux de Sergueï Lavrov, le ministre des Affaires étrangères. Interrogé sur cette affaire en marge d’une réunion de l’OSCE à Bâle, il avait répondu, excédé, que la France « devait remplir toutes ses obligations contractuelles ».

Récemment, directeur général de la société publique Rosoboronexport, Anatoli Issaïkine, a indiqué que Moscou donnait deux mois à la France pour livrer le premier BPC – le Vladivostok – avant de saisir les tribunaux et de demander probablement le paiement de pénalités. Et puis, le président Poutine a de nouveau évoqué cette affaire, pour en relativiser la portée.

« Le refus de livrer les navires conformément au contrat est un mauvais signe bien sûr, mais du point de vue du soutien de nos capacités de défense, je vais vous le dire franchement, c’est sans importance », a-t-il dit, ce 16 avril, lors d’un entretien télévisé.

« À l’époque, nous avions conclu ce contrat avant tout pour soutenir nos partenaires et assurer une charge de travail pour leurs chantiers navals, mais nous prévoyions de les utiliser en Extrême Orient, ce n’est pas critique », a encore expliqué M. Poutine. Quant aux dédommagements éventuels, il a dit partir « du principe que les autorités françaises (…) rendrons l’argent ». Et d’ajouter : « Nous n’avons pas l’intention d’exiger des pénalités excessives, mais il faut que les pertes que nous avons subies soient remboursées ».

Dans le fond, les propos de M. Poutine traduisent la pensée de certains responsables russes qui, par le passé, critiquèrent le contrat des BPC Mistral. Il s’agissait alors de remettre en cause la politique menée par l’ex-ministre de la Défense, Anatoli Serdioukov.

« Nous avons discuté de l’absurdité de cette décision. Il s’agissait d’une initiative de Serdioukov. Ce n’est pas le seul dégât qu’il a provoqué au gouvernement et à l’industrie », avait ainsi affirmé van Kharchenko, le vice-président de la commission militaro-industrielle, au sujet du contrat Mistral.

Plus récemment, Dmitri Rogozine, le vice-premier ministre, y est allé aussi de sa petite phrase. « Le Mistral est un grand bâtiment de projection et de commandement. A mon avis, nous pourrions nous passer de ce contrat parce que nous aujourd’hui la capacité de construire en grands blocs ce type de navires », a-t-il dit, en septembre dernier. « Ces navires ne nous conviennent pas vraiment pour des raisons climatiques, du moins ils ne pourront certainement pas naviguer dans les eaux russes du nord », a-t-il même ajouté, alors que, justement, les BPC en question ont été adaptés pour naviguer par grand froid…

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