Un accord cadre sur le programme nucléaire iranien a été trouvé

En novembre 2013, l’Iran et le groupe 5+1, constitué par les 5 pays membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies (États-Unis, Russie, France, Chine, Royaume-Uni) et l’Allemagne, signèrent, à Genève, un accord intérimaire sur le programme nucléaire mené par Téhéran et se donnèrent un an de plus pour continuer les discussions et trouver ainsi  un compromis sur les capacités iraniennes d’enrichissement d’uranium et la levée des sanctions internationales.

Après des mois de tractations sans succès, le délai pour obtenir un tel accord a été prolongé jusqu’au 31 mars 2015. Et, au terme de 8 jours de négociations intenses et visiblement âpres menées à Lausanne, un « accord-cadre » a fini par être trouvé le 2 avril. Pour le président américain, Barack Obama, qui souhaitait une telle issue, il s’agit d’une « entente historique ». Idem côté iranien.

Mais le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, y a mis quelques bémols en se montrant prudent. Dans ce dossier, la France voulait un « accord robuste », devant permettre à l’Iran de mener à bien des activités nucléaires civiles sans avoir la capacité de leur donner une finalité militaire. En outre, il s’agit aussi pour la France d’éviter que d’autres pays du golfe arabo-persique, en particulier l’Arabie Saoudite, se lancent dans la prolifération nucléaire

Selon le chef de la diplomatie française, cet accord-cadre ne garantit pas, du moins « pas encore », le fait que l’Iran ne disposera pas de l’arme nucléaire. « Ce sont des avancées positives mais il reste encore du travail à faire », a-t-il commenté à l’antenne de France2. « L’Iran peut continuer à utiliser l’énergie nucléaire civile. Si l’Iran ne respecte pas ces engagements, il faut qu’on puisse revenir sur les sanctions économiques qui existent actuellement. Le mécanisme précis n’est pas encore mis au point. Il y a eu un pas en avant, mais on n’est pas au bout du chemin », a-t-il ajouté.

Effectivement, un accord final doit être signé d’ici le 30 juin prochain, car il reste à négocier les détails de la mise en oeuvre des dispositions adoptées à Lausanne. Ces dernières prévoient notamment une réduction des capacités iraniennes d’enrichissement de l’urunium, en faisant passer le nombre de centrifugeuses à 5.060 pendant 10 ans (soit 2/3 en moins) et interdisant la construction de nouveaux sites de production pendant 15 ans. Le stock d’uranium enrichi à 3,67% (contre 20% actuellement) passera de 10 tonnes à 300 kg.

Toujours sur la question des centrifugeuses, l’Iran ne pourra utiliser que celles dites de première génération (IR-1) sur le site de Natanz. Celles appelées IR-2M, plus rapides que les précédentes, seront placées sous le contrôle de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Quant au complexe de Fordo, enfoui sous une montagne et donc, protégé contre toute action militaire, il restera ouvert mais ne devra plus servir à enrichir de l’uranium pendant au moins 15 ans.

Le coeur du réacteur à eau lourde d’Arak, pouvant potentiellement produire du plutonium pour des applications militaires, sera détruit et déplacé hors d’Iran. Il se limitera à la recherche et à la production de radioisotopes médicaux. Ce qui tombe bien : c’était précisément sa vocation première, selon Téhéran. Et, pendant 15 ans, l’Iran ne pourra pas en construire un autre.

S’agissant du temps nécessaire pour produire suffisamment d’uranium enrichi pour fabriquer une arme nucléare, ce que les diplomates appellent le « breakout time », actuellement de 2 à 3 mois, il a été porté à au moins un an. Et cela pendant 10 ans minimum.

Bien évidemment, et comme, par le passé, l’Iran a caché ses activités (comme celles menées à Fordo), le contrôle de ces mesures est primordial. De lui dépendra la levée des sanctions internationales. Il sera régulièrement mené par les inspecteurs de l’AIEA. Ces derniers auront aussi accès, pendant 25 ans, aux mines d’uranium ainsi qu’aux lieux où l’Iran produit le yellowcake (concentré d’uranium).

Pour autant, ces dispositions ne sont pas encore suffisantes pour certains, Israël parlant même d' »erreur historique ». « Cet accord ne va pas bloquer le programme nucléaire de l’Iran, mais au contraire lui ouvrir le chemin », a estimé Benjamin Netanyahu, le Premier ministre israélien. « Les grandes puissances se sont retrouvées en situation d’infériorité en refusant toute idée de confrontation militaire avec l’Iran en cas d’échec des négociations, si bien que Téhéran a réussi à imposer ses volontés et a obtenu une légitimité internationale pour son programme nucléaire », a enchéri Tzahi Hanegbi, le vice-ministre des Affaires étrangères.

Plusieurs points sont contestés par les opposants à cet accord. Tout d’abord, l’Iran va conserver une capacité d’enrichissement d’uranium, de recherche et de développement en matière nucléaire. Et le maintien de l’installation souterraine de Fordo, qui devrait abriter un « centre de physique nucléaire » sans matériaux fissiles, interroge… Enfin, il est aussi reproché qu’aucune disposition n’oblige Téhéran à lever le voile sur ses activités militaires passées.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]