Une coalition militaire emmenée par l’Arabie Saoudite intervient au Yémen pour contrer les milices chiites

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D’obédience zaïdite, une branche du chiisme, la rébellion houthiste a relancé ses opérations au Yémen au cours de l’été 2014 pour dénoncer un projet constitutionnel qui aurait privé ses bastions du nord d’un accès à la mer. En septembre, elle a conquis Sanaa, la capitale, forçant le président Rabbo Mansour Hadi à se replier vers Aden.

Depuis les rebelles houthis, alliés aux partisans de l’ancien président yémenite, Ali Abdullah Saleh qu’ils avaient pourtant combattu lorsque ce dernier était au pouvoir avant d’en être chassé à la faveur du « printemps arabe », ont continué leur progression vers le sud et menacent désormais Aden.

Le 25 mars, ils ont ainsi pris le contrôle de la base d’Al-Anad, évacuée quelques jours plus tôt par les forces spéciales américaines qui y étaient déployées dans le cadre de la lutte contre al-Qaïda dans la péninsule arabique (AQPA). Dans le même temps, le président Hadi a une nouvelle été contraint de se réfugier dans un « lieu sûr », ce que n’a pas pu faire son ministre de la Défense, Mahmoud el-Soubaihi, qui a été capturé et envoyé à Sanaa.

Cette situation, qui alimente la rivalité entre chiites et sunnites dans le pays, risque de profiter aux mouvements jihadistes, comme AQPA ou encore l’État islamique (EI) qui a revendiqué les attentats ayant visé deux mosquées chiites à Sanaa, le 20 mars. Et le retrait militaire américain du pays « va sans doute rendre notre lutte contre » les organisations terroristes « plus difficile », a admis le colonel Steve Warren, le porte-parole du Pentagone.

Au niveau international, les rebelles houthis sont appuyés par l’Iran, qui, selon les annonces qui ont été faites, aurait pris l’engagement de construire une centrale électrique et de fournir du pétrole à Sanaa, désormais sous contrôle chiite, pendant un an.

Outre l’influence iranienne dans le pays, l’alliance avec les partisans de l’ex-président Saleh est aussi vue d’un mauvais oeil par l’Arabie Saoudite étant donné que le royaume avait obtenu son départ du pouvoir. Par ailleurs, Riyad s’inquiète de voir des milices chiites être en mesure de contrôler une des rives du détroit de Bab el-Mandeb, entre la mer Rouge et le golfe d’Aden

En mauvaise posture, s’adressant à « tous les pays qui le souhaitent », le président Hadi a demandé à « un soutien immédiat, par tous les moyens, pour protéger le Yémen ». L’appel a été entendu par l’Arabie Saoudite, qui a pris la tête d’une coalition de 10 pays pour intervenir militairement contre les rebelles houthis.

Ainsi, dans la nuit du 25 au 26 mars, l’opération « Tempête décisive » a été lancée par des frappes aériennes sur plusieurs positions tenues par les rebelles chiites à Sanna, dont la base aérienne d’Al-Daölami, le palais présidentiel, un camp des forces spéciales ainsi que le bureau politique du mouvement houthis. Des batteries de missiles SAM et 4 avions de combat auraient été détruits, selon un premir bilan donné par l’agence saoudienne SPA.

Pour cette opération, l’Arabie Saoudite a mobilisé 150.000 militaires – ce qui laisse supposer qu’une intervention terrestre est prévue – ainsi que 100 avions de combat. La coalition mise en place compte dans ses rangs les Émirats arabes unis (qui auraient engagés 30 avions), Bahreïn, le Koweït (15 avions chacun) et le Qatar (10 appareils). L’Égypte, la Jordanie, le Soudan, le Pakistan et le Maroc sont également concernés. De même que les États-Unis, qui fournissent un soutien logistique et des renseignements.

« Le président Barack Obama a autorisé la fourniture d’un soutien en logistique et en renseignement aux opérations militaires menées par le CCG, le Conseil de coopération du Golfe », a déclaré Bernadette Meehan, porte-parole du Conseil national de sécurité (NSC) de la Maison Blanche. « Nous appelons fermement les Houthis à cesser immédiatement leurs actions militaires déstabilisatrices et à revenir aux négociations qui font partie du dialogue politique », a-t-elle continué.

« Vous avez une milice qui contrôle ou pourrait contrôler des missiles balistiques, des armes lourdes et une force aérienne. Je ne me rappelle aucune autre situation dans l’histoire où une milice dispose d’une force aérienne. (…) C’est donc une situation très dangereuse », a expliqué Adel al-Jubeir, l’ambassadeur saoudien aux Etats-Unis. Aussi, « l’opération militaire vise à défendre le gouvernement légitime du Yémen et à empêcher le mouvement radical houthi de prendre le contrôle du pays », a-t-il affirmé.  « La coalition fera tout ce qu’il faudra pour rétablir la stabilité », a-t-il ajouté.

Bien évidemment, l’Iran a dénoncé vigoureusement cette intervention. « L’action militaire lancée par l’Arabie saoudite va encore plus compliquer la situation, étendre la crise et faire perdre les chances d’un règlement pacifique des divergences internes au Yémen », a fait valoir Marzieh Afkham, la porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères. « Cette agression ne donnera aucun résultat, sauf qu’elle provoquera une propagation du terrorisme et de l’extrémisme, et une augmentation de l’insécurité à travers la région », a-t-elle estimé, avant d’en appeler à un arrêt immédiat des frappes aériennes.

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