Budget de la Défense : Députés et sénateurs exigent des éclaircissements sur les sociétés de projet

Après l’Assemblée nationale, où le recours à l’article 49.3 a été estimé nécessaire pour le faire passer sans vote, le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (ou loi Macron) va être désormais examiné par le Sénat. Ce texte concerne le ministère de la Défense étant donné qu’il compte des dispositions permettant le rapprochement de Nexter avec le groupe allemand Krauss-Maffei Wegmann et la création des sociétés de projet.

Ces dernières, dotés de capitaux publics obtenus via des cessions d’actifs financiers de l’État, ont, dans un premier temps, vocation à racheter du matériel (avions A400M, frégates multimissions) appartenant aux armées afin de les leur louer dans la foulée. Et cela afin de remédier à l’absense des recettes exceptionnelles (REX) qui devaient abonder le budget du ministère de la Défense à hauteur de 2,3 milliards d’euros en 2015 après la vente aux enchères de fréquences de la bande 700 MHZ.

Ce n’est pas peu dire que ce dispositif suscite des réserves. Aussi bien au ministère du Budget, où l’on freine des quatre fers, que chez les parlementaires. Cependant, pour ces derniers, faute d’autres solutions acceptables en vue, sont prêts à l’accepter… mais à certaines conditions.

Toutefois, le ministre du Budget, Michel Sapin, a exprimé publiquement ses réserves au sujet de ces sociétés de projet, lesquelles ont pourtant été validées par le président Hollande, chef des armées. Elles « ont au moins un défaut : elles n’ont pas la qualité de nous permettre de faire un miracle financier », a-t-il ainsi déclaré lors d’une audition devant la commission des Finances de l’Assemblée nationale. Car elles « sont consolidées en dépense, en dette », a-t-il plaidé, c’est à dire comptabilisées dans les dépenses publiques. Et d’estimer qu’il pouvait « y avoir d’autres solutions pour répondre aux mêmes préoccupations, de la même manière ».

Quelques semaines plus tôt, Christian Eckert, le secrétaire d’État au Budget avait, devant la même commission, évoqué l’existence d’un « plan B » pour éviter d’avoir recours à ces sociétés de projet. Sans pour autant en donner le détail.

Ces réticences de Bercy face aux sociétés de projet ont conduit Jean-Pierre Raffarin, l’actuel président de la commission sénatoriale des Affaires étrangères et des Forces armées à demander au président Hollande d’arbitrer clairement entre le ministère de la Défense et celui du Budget.

Histoire d’en avoir le coeur net sur cette affaire, la commission spéciale mise en place par le Sénat pour examiner le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques devait entendre Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense, ce 24 mars. Seulement, il ne sera pas possible d’en faire un compte-rendu dans la mesure où cette audition n’a pas été ouverte à la presse.

« Nous voulons interroger le ministre qui ne s’était pas exprimé à l’Assemblée après les déclarations de Michel Sapin qui évoque un plan B. Le Sénat est soucieux du maintien de l’outil de défense, mais s’inquiète du procédé choisi. L’article sur les sociétés de projet sera examiné en commission mercredi », a expliqué Vincent Capo-Canellas, le président de ladite commission.

Par ailleurs, et bien que l’amendement concernant les sociétés de projet a été adopté par les députés, malgré leurs réserves, il est auss question de tirer au clair les dissensions entre la Défense et Bercy.

« Les sociétés de projet, plan de substitution aux recettes exceptionnelles défaillantes devant financer les équipements de la Défense, sont au cours d’une lutte interministérielle acharnée entre d’une part le ministre de la défense , Jean-Yves Le Drian, et le ministre de l’économie, Emmanuel Macron, et, d’autre part, le ministre des finances, Michel Sapin, et son secrétaire d’Etat au budget, Christian Eckert », a ainsi rappelé, dans un communiqué, le député François Cornut-Gentille, rapporteur spécial de la commission des finances sur le budget de la défense.

Ce dernier ayant engagé un contrôle parlementaire pour « démêler le vrai du faux », il a envoyé un questionnaire à plusieurs admnistrations et services du ministère de la Défense et de Bercy. Or, une seule a ommis de lui répondre : la Direction générale de l’armement (DGA), qui est pourtant la principale concernée.

« Face à ce silence depuis trois mois, François Cornut-Gentille a demandé à Gilles Carrez, président de la commission des finances de l’Assemblée Nationale, et à Valérie Rabault, rapporteure générale du budget, d’auditionner Laurent Collet-Billon, délégué général pour l’armement, pour le contraindre à répondre aux questions légitimes que soulèvent les sociétés de projet », fait savoir le député. L’audition devrait alors lieu le 1er avril prochain, en espérant que l’on puisse savoir ce qui s’y sera dit.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]