L’idée d’une armée européenne fait un flop

La proposition faite par le président de la Commission de Bruxelles, Jean-Claude Juncker, de former une « armée commune à tous les Européens » afin de faire « comprendre à la Russie que nous sommes sérieux quand il s’agit de défendre les valeurs de l’Union européenne », a été bien accueillie en Allemagne. Du moins par certains responsables politiques (les opinions sont plus nuancées chez les éditorialistes de la presse d’outre-Rhin).

En revanche, cela n’a pas été le cas pour les pays qui comptent sur le plan militaire. Pour la Pologne, qui entend investir massivement pour moderniser ses forces armées, cette idée est « très risquée ». Au Royaume-Uni, la réponse a été rapide, cinglante et sans surprise. « Notre position est claire comme du cristal : la défense est une compétence nationale et ne relève pas de l’Union européenne. Et il n’y a aucune perspective pour que notre position change. Il n’est pas question d’une armée européenne », a déclaré un porte-parole du gouvernement britannique.

En France, le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, ne l’a même pas abordée au cours de son allocution prononcée lors de sa conférence de presse du 11 mars. Pourtant, il a bel et bien parlé des affaires européennes… Mais pour bien en appeler à un partage du fardeau de la sécurité entre les 28.

« Nous sommes vingt-huit Etats au sein de l’Union européenne, mais combien sommes-nous à prendre réellement part à la résolution des crises dans notre voisinage? Je l’ai dit à Riga, je veux le redire ici : je considère que le fardeau de la sécurité européenne n’est pas équitablement réparti. La France continuera à prendre ses responsabilités, mais nous attendons que nos partenaires soient également au rendez-vous, car il s’agit de notre sécurité collective », a-t-il affirmé. « Nous nous sommes fixés dans le cadre de l’Otan un objectif de dépense de défense de 2 % du produit intérieur brut ; la plupart des Européens en sont trop éloignés », a-t-il aussi souligné.

Aussi, la France demandera lors du Conseil européen de juin prochain, qui sera largement consacré aux questions de défense, « l’exclusion des dépenses engagées au titre des opérations extérieures dans le calcul des déficits publics européens » car, pour M. Le Drian, c’est un « un débat légitime, parce que lorsque la France s’engage au Sahel, au Levant, elle intervient au profit de la sécurité de tous les Européens ». En outre, pour le ministre « plus la France a d’alliés, plus sa voix est forte à travers le monde ».

Cela étant, M. Le Drian s’était déjà montré très critique sur cette idée d’armée européenne. « L’Europe de la Défense, ce n’est pas l’Europe militaire. Il faudrait d’abord une Europe politique, ce qui n’est pas à l’agenda », avait-il dit en février 2013.

« L’Europe de la Défense, c’est la mise en commun de certains moyens de défense, c’est l’industrie de défense, un certain nombre d’actions communes (…) Elle ne se fait pas de manière incantatoire », avait encore fait valoir M. Le Drian. « Quand l’Europe de la Défense aura la capacité d’intervenir immédiatement, ce sera dans 150 ans! Il faudrait que l’Europe ait un gouvernement unifié, une assemblée européenne et une autorité militaire communes. Je ne sais pas si on verra ça », avait-il aussi dit.

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