La France « dialogue » avec des éléments du régime syrien

La visite qu’ont rendue quatre parlementaires français au président syrien, Bachar el-Assad, le mois dernier, a fait polémique étant donné qu’elle n’avait pas été préalablement approuvée par l’exécutif.

« Cette initiative, je la condamne. Il s’agit d’une rencontre entre des parlementaires français, qui n’ont été mandatés que par eux-mêmes, et une dictature qui a bombardé son propre peuple. Et qui a utilisé l’arme chimique pour détruire des vies humaines. […] Il y a d’autres façons d’aider la Syrie », avait réagi le président Hollande.

Et, pour la diplomatie française, « ce serait une énorme faute de mettre en avant Bachar al-Assad comme perspective pour la Syrie », comme l’a rappelé son chef, Laurent Fabius, lors d’une audition devant la commission sénatoriale des Affaires étrangères et des Forces armées, avant le voyage à Damas des quatre parlementaires.

Pour autant, cela ne veut pas dire qu’il n’y ait aucun contact entre les autorités françaises et le régime syrien. Le ministre l’a même admis au cours de cette même audition.

« Nous sommes persuadés qu’il faut dialoguer avec des éléments de son régime – et nous le faisons. Nous ne sommes pas seuls à le croire. C’est ce que font les Russes – nous sommes en liaison avec eux – ainsi que les Égyptiens. Une rencontre a récemment eu lieu au Caire. Les Saoudiens vont le faire », a en effet affirmé M. Fabius.

« Laisser entendre que Bachar al-Assad pourrait devenir notre représentant constituerait le meilleur argument que nous puissions fournir à Daech (EI ou État islamique). Si nous agissons ainsi, tous les Sunnites ou presque, sans parler des autres, basculeront de ce côté », a expliqué le patron du Quai d’Orsay.

Aussi, a-t-il ajouté, « nous pensons donc qu’il convient de trouver une solution, à laquelle nous sommes en train de travailler, comprenant des éléments du régime, afin d’éviter l’écroulement qui a eu lieu en Irak par le passé ». Et cette position s’explique par la nécessite de « conserver au régime ses piliers si l’on veut que l’État se tienne et si l’on veut pouvoir compter sur des éléments de l’opposition dite modérée ».

Sur le plan militaire, M. Fabius a estimé qu’il faut renforcer l’opposition modérée (laquelle a, depuis cette audition au Sénat, subit de nouveaux revers face à la branche syrienne d’al-Qaïda dans le secteur d’Alep) car « conférer un avantage militaire à Bachar al-Assad serait lui faire un cadeau, ainsi qu’à Daech, les deux constituant l’avers et le revers de la même médaille. »

Par ailleurs, si l’on en croit les informations du Figaro, un contact aurait été établi avec les services de de sécurité syriens. Et cela dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.

Lors du voyage en Syrie des 4 parlementaires, raconte en effet le quotidien, un émissaire français aurait rencontré, en toute discrétion, le général Ali Mamlouk, qui n’est autre que le chef de la sécurité nationale syrienne (et à ce titre, un homme de confiance de Bachar el-Assad). Un compte-rendu des échanges, qui ont porté sur « les jjihadistes français en Syrie, ceux qui sont emprisonnés dans les geôles du régime, les passeports que Damas a récupérés, mais aussi sur la réalité opérationnelle des combats » a été adressé à la DGSI et à la DGSE, de même qu’un « rapport circonstancié » a été remis à un conseiller du président Hollande.

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