Selon M. Le Drian, l’idée d’exclure les dépenses militaires du déficit commence à être entendue au niveau européen

Rapports après rapports, la Cour des comptes pointe encore et toujours les gaspillages de l’argent public et/ou le faible retour sur investissements de certaines dépenses. Le dernier n’a malheureusement pas échappé à la règle puisqu’il a épinglé, notamment, la gestion du Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (MuCEM), celle du musée national des Arts et traditions populaires (MNATP) qui, bien que fermé en 2005, comptait encore une centaine d’employés jusqu’en 2011 encore le calamiteux projet de logiciel de paie unique des agents de l’État (dont le Louvois est un avatar) qui a laissé une ardoise de 346 millions d’euros avant d’être abandonné en 2014.

Et l’on pourrait ajouter maints exemples de dépenses faites dans le cadre de politiques qui ne donnent pas les résultats espérés et où il y aurait matière à faire des économies… En attendant, la dépense publique est passée, de 1980 à aujourd’hui, de 45,5% à près de 57% du PIB tandis que, dans le même temps, le budget de la Défense a baissé de 4,7% en euros constants. Ce phénomène n’est pas propre à la France : on le constate chez la plupart des pays européens, alors même que les impératifs liés à la monnaie unique imposent une gestion rigoureuse des finances publiques, avec la fameuse règles des 3% de déficit à ne pas dépasser.

Et encore, s’il n’y avait eu que les fameux « dividendes de la paix »… Sauf que, depuis que la parenthèse de la Guerre froide a été fermée, les menaces de conflits n’ont pas disparu pour autant et de nouvelles sont même apparues. Et pour y faire face, encore faut-il en avoir les moyens. Comment faire, dans ces conditions, et avec les contraites budgétaires que l’on connaît, pour inciter les pays européens à faire de nouveau un effort en matière de défense, comme l’Otan les y invite (du moins pour ceux qui en sont membres)?

Une des solutions serait d’exclure les dépenses militaires du calcul des déficits publics. Elle n’est pas nouvelle : elle a notamment été avancée par Jean-Pierre Chevènement et, plus récemment, par plusieurs responsables du Parti socialiste, dont Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense, afin qu’elle soit appliquée à la France étant donné que cette dernière s’implique militairement pour la sécurité du Vieux Continent en intervenant notamment en Afrique.

« On ne peut pas considérer qu’on a des dépenses exceptionnelles, dues à la nécessité de ramener la paix dans cette région du monde à la demande du Conseil de sécurité, et, en même temps, nous imposer sur ces dépenses les mêmes règles budgétaires que sur les autres », avait fait valoir François Rebsamen, du temps où il était sénateur avant de devenir ministre.

Seulement, parmi les États de l’Union européenne, cette idée d’appliquer un tel régime dérogatoire est loin de faire l’unanimité, à commencer au sein de la Commission européenne…

Mais, apparemment, cela est de moins en moins vrai si l’on en croit les propos tenus par quelques députés lors d’une audition du ministre de la Défense sur l’opération Sentinelle. En tout, elle sera abordée en mars prochain, à Riga (Lettonie), lors d’une Conférence interparlementaire dédiée à la Politique européenne de sécurité et de défense commune.

« La question sera à l’ordre du jour de la prochaine conférence interparlementaire de Riga ; si les élus de toutes les nations pouvaient se mobiliser, Bruxelles se déciderait peut-être enfin à améliorer le dispositif Athéna », a ainsi affirmé le député Joaquim Pueyo.

« L’idée d’exclure les dépenses militaires du calcul des déficits publics commence à être entendue au niveau européen, et il faut continuer à avancer dans cette direction », a même avancé M. Le Drian. Répondant à un autre député, ce dernier a affirmé que « du côté de Bruxelles, on sent un léger frémissement quand à la question des dépenses liées à la défense ». Et d’ajouter : « La contribution des États au plan d’investissement Juncker ne sera pas comptabilisée dans le déficit; si le retraitement des investissements militaires n’est pas encore à l’ordre du jour, cette question sera vraisemblablement abordée dans les réunions à venir des chefs d’État et de Gouvernement, puis des ministres de la Défense ».

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