Comment M. Le Drian va-t-il faire entrer l’édredon dans la valise?

« Il n’y a pas d’armée sans les hommes et les femmes pour la servir », a lancé, non pas M. de La Palice, mais le président Hollande, depuis le porte-avions Charles de Gaulle, avant de faire part de son intention de « revoir et adapter le rythme de réduction » des effectifs au sein des armées. Et le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a été chargé de lui remettre des propositions.

Pour rappel, alors qu’il avait été décidé par le gouvernement Fillon, de supprimer 54.000 postes dans les armées, la dernière Loi de programmation militaire (LPM) n’a nullement remis en cause cette tendance puisqu’elle prévoit d’en supprimer 23.500 supplémentaires. L’enjeu est de faire des économies sur la masse salariale afin de rester dans l’enveloppe allouée au ministère de la Défense, laquelle est bloquée depuis 2012 à 31,4 milliards d’euros.

Pour autant, il ne faut pas tirer des conclusions trop hâtives, comme certains ont pu le faire dans quelques médias, en craignant des suppressions de postes à l’Éducation nationale ou une baisse des budgets sociaux pour compenser cette révision du « rythme » des déflations d’effectifs dans les armées (*)

Tout d’abord, le chef de l’État a tout de suite précisé que les propositions que lui remettra M. Le Drian en matière d’effectifs devront tenir compte « des nécessités budgétaires ». En clair, il devra faire avec les 31,4 milliards alloués à son ministère et il n’est nullement question d’aller au-delà, ce qui complique sérieusement l’équation.

D’ailleurs, le président Hollande a insisté sur ces 31,4 milliards. « Ce n’est pas simplement qu’un chiffre, c’est ce qui permet de faire fonctionner nos armées et de les équiper, c’est un ensemble de crédits budgétaires et de ressources exceptionnelles. Ces crédits-là, ces ressources-là seront strictement maintenues pour que nous puissions atteindre tous les objectifs que j’ai fixés pour nos armées », a-t-il affirmé.

L’une des solutions pour financer le ralentissement du rythme des déflations d’effectifs dans les armées (on notera au passage qu’il n’est nullement question de remettre en cause l’objectif final de supprimer de 23.500 postes) serait de jouer sur les commandes de matériels. Sauf que ce ne sera pas possible.

« Tous les projets qui sont prévus par la loi de programmation militaire en 2015 pourront se concrétiser. Je pense à la commande des 12 avions ravitailleurs MRTT pour l’armée de l’air, au lancement du grand programme Scorpion pour l’armée de terre, à la rénovation de 11 ATL2 et à la commande de bâtiments de soutien et d’assistance hauturiers pour la marine ainsi que d’une centaine de véhicules pour les forces spéciales; tout sera exécuté comme il est prévu », a affirmé le président Hollande.

Sauf que, pour le moment, les 31,4 milliards d’euros promis aux armées sont encore hypothétiques : il manque 2,4 milliards de recettes exceptionnelles (REX). L’idée de créer des sociétés de projet qui loueraient du matériel aux armées, selon le principe du crédit bail, a bien été confirmée par le président Hollande. Reste à la traduire vite en acte, ce qui ne sera pas simple, tant les obstacles juridiques, législatifs et financiers sont nombreux.

Alors, dans ces conditions, comment M. Le Drian va-t-il s’y prendre pour ralentir le rythme des suppressions de postes au sein de ministère, à budget inchangé et sans toucher aux programmes d’équipement? Autant vouloir faire entrer un édredon dans une valise…

(*) Voir l’émission « On refait le monde » de RTL

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