Le ministère de la Défense manque de « visibilité » pour sa politique en matière d’infrastructures, déplore un représentant syndical

En 1995, certains centres de sélection firent l’objet de travaux importants afin de pouvoir mettre en oeuvre les cabines « Espace ». Ces dernières devaient être utilisées pour faire passer des tests aux jeunes gens appelés à « remplir leurs obligations militaires », ou du moins celles du Service national, au cours de leurs « trois jours » (en fait, une demi-journée).

Seulement, un an plus tard, en février 1996, et alors que les chantiers avaient commencé, le président Chirac annonçait la professionalisation des armées… Fatalement, les centres de sélection, qui étaient alors des structures interarmées, allaient disparaître. Et les travaux effectués passèrent par pertes et profits. Combien cela a-t-il coûté aux finances publiques?

Le problème est que les réformes se succèdent à tel rythme, au sein des armées, que l’une n’est pas encore terminée qu’une autre se prépare. En 2012, le Commandement des forces aériennes a ainsi fait mouvement vers la base aérienne 102 de Dijon étant donné que celle de Metz devait fermer.

Et, deux ans plus tard, nouveau déménagement en vue : le CFA quittera la Bourgogne pour Bordeaux-Mérignac, la base de Dijon devant à son tour être fermée. Lors de l’audition des représentants des syndicats des personnels civils du ministère de la Défense à l’Assemblée nationale, Gilles Goulm, secrétaire général de Force Ouvrière-Défense a soulevé ce problème et suscité ainsi d’intérêt de certains députés.

« Nous avons à plusieurs reprises évoqué devant vous la politique d’infrastructure du ministère et l’utilisation des crédits qui y sont consacrés. Alors que les conditions de vie et de travail des agents, militaires et civils, sont trop souvent déplorables du fait de l’état de délabrement des locaux, il serait grand temps que le ministère ait une vraie vision à moyen et long termes de son organisation, ce qui éviterait d’engager des opérations extrêmement coûteuses pour une ou deux années », a ainsi affirmé M. Goulm.

« Était-il nécessaire, mesdames et messieurs les députés, d’engager 23 millions d’euros – plus 800 000 euros pour la rénovation de la villa du général – dans la construction de locaux pour installer le commandement des forces aériennes à Dijon, après la fermeture de la base aérienne de Metz voilà moins de deux ans, alors que ladite base de Dijon ferme à son tour et que le commandement des forces aériennes s’installe à Bordeaux? », a aussi demandé le responsable syndical. Au passage, si les chiffres qu’il avance sont vrais, 800.000 euros pour rénover une villa paraît énorme et choquant en ces temps où le moindre euro compte!

« Dépenser 23 millions d’euros pour l’installation du commandement des forces aériennes à Dijon, qui deux ans plus tard est transféré à Bordeaux, témoigne soit d’une réelle incompétence, soit d’un manque de visibilité fort dommageable », a encore dit Gilles Goulm, en réponse à une question posée par un député.

Et visiblement, l’exemple qu’il a évoqué n’est pas un cas isolé. « Des exemples de ce type (…) nous en avons, hélas, trop souvent », a ainsi poursuivi M. Goulm, pour qui ces derniers « démontrent le manque de visibilité criant dont souffrent le ministère de la Défense et nos armées ».

Et d’ajouter : « Il n’est pas rare aujourd’hui de découvrir que certaines unités du service d’infrastructure de la défense (SID) n’arrivent pas à engager la totalité des crédits dont elles disposent par manque d’effectifs. En effet, pour passer des marchés et suivre les travaux, il faut des agents compétents, notamment surveillants de chantier, ce dont nous manquons cruellement depuis la révision générale des politiques publiques (RGPP), et il y a fort à parier que la loi de programmation militaire et ses 24.000 suppressions de postes aggraveront encore la situation. En termes moins choisis, on appelle cela marcher sur la tête ».

Pour le responsable syndical, le ministère de la Défense a « un problème de gouvernance des crédits d’infrastructure et il est plus que temps d’y apporter des solutions ». Plus loin, revenant encore une fois sur l’exemple qu’il venait d’évoquer, M. Goulm a insisté en disant ne pas croire un seul insitant « que le chef d’état-major de l’armée de l’air de l’époque se soit amusé à déplacer le commandement des forces aériennes de Metz à Dijon en sachant qu’on fermerait Dijon pour le transférer à Bordeaux deux ans plus tard ». Et de conclure : « Si de telles décisions sont prises, y compris au plus haut niveau, c’est simplement par manque de visibilité à court terme. Il serait déplorable que les mêmes bêtises soient commises aujourd’hui ».

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