M. Valls insiste sur la menace jihadiste dans le sud de la Libye

En septembre, le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, avait alerté sur la situation dans le sud de la Libye, qualifié de « hub » pour terroristes. « Nous devons agir en  Libye », avait-il dit, sans pour autant en préciser les modalités.

Depuis la chute du régime du colonel Kadhafi, les nouvelles autorités libyennes n’ont jamais réussi à s’imposer face aux milices révolutionnaires. Et les tensions entre les différentes factions n’aident évidemment pas. À Tripoli, les combattants proches des milieux islamistes (et des Frères musulmans) ont imposé leur loi par les armes, en prenant le dessus sur les brigades de Zenten, proches des libéraux. Dans l’est, la situation est confuse. En mai, un ex-général de l’armée libyenne, le général Khalifa Haftar, a lancé l’opération Dignité contre les groupes jihadistes qui y sévissent, dont Ansar al-Charia.

Plus inquiétant encore, Derna, une ville située entre Tobrouk et Benghazi, qui constituait déjà un « vivier » de jihadistes pour l’Irak, d’après un câble diplomatique américain diffusé par WikiLeaks, a fait allégeance à l’État islamique (Daesh ou EI) en octobre, laquelle a été reconnue par Abu Bakr al-Baghdadi, dans un message diffusé le 12 novembre.

Cette cité, sous la coupe du groupe Majlis Shura Shabab al-Islam, constitue la première implantation de l’EI hors du territoire couvert pas le califat qu’il a proclamé le 29 juin dernier. D’autres mouvement jihadistes ont prêté allégeance à Daesh : Jund al-Khilafa en Algérie et  Ansar Bayt al-Maqdiss en Égypte.

Quant au sud libyen, qualifié de « nid de vipères » par M. Le Drian en avril dernier, il sert de base arrière aux groupes jihadistes chassés du Nord-Mali par l’opération française Serval. Des chefs de premier rang, dont Mokhtar Belmokhtar et Iyad Ag Ghali y ont trouvé refuge. En outre, les localités de Brak, Oubari et Sebah sont connues pour être des plaques tournantes du trafic d’armes.

D’où la raison d’être de l’opération Barkhane, dont l’objectif est de traquer ces mouvements terroristes dans la bande sahélo-saharienne, notamment en leur coupant leurs routes d’approvisionnement entre le sud de la Libye et le nord du Mali, en intervenant au Niger, voie de passage quasi-obligée pour les jihadistes.

Justement, le Premier ministre, Manuel Valls, est allé en Tchad et au Niger pour rencontrer les militaires français engagés dans l’opération Barkhane, forte de 3.000 hommes (même plus puisqu’il serait question de 3.200 soldats, sans compter les forces spéciales). À noter que ce type de déplacement est rare pour un chef de gouvernement, le dernier en avoir fait de même est François Fillon, en Afghanistan et en Côte d’Ivoire).

À N’Djamena, où est installé l’état-major de l’opération Barkhane, M. Valls a une nouvelle fois insisté sur la situation dans le sud de la Libye. Un « sujet de préoccupation majeure », a-t-il dit. Non seulement pour la France mais aussi pour le Tchad ainsi que « les pays qui sont en première ligne ». « Nous regardons d’ailleurs avec attention et inquiétude les liens aujourd’hui entre ces groupes terroristes non déclarés et Daech », a-t-il ajouté, le 22 novembre, à l’issue d’un entretien avec Idriss Déby-Itno, le président tchadien. « Cette situation nous préoccupe et c’est dans cette perspective que nous devons agir ensemble avec le Tchad et le Niger », a encore estimé le Premier ministre.

La situation dans le sud-libyen constitue un facteur de déstabilisation pour la Tunisie, où des groupes jihadistes sont actifs dans le mont Chaambi. Et des connexions avec le mouvement nigérian Boko Haram ne sont pas à exclure. D’ailleurs, aussi bien le Niger que le Tchad sont en première ligne face à ce dernier, tout comme le Cameroun.

« C’est important de dire combien le Tchad représente un facteur de stabilité et c’est ce facteur de stabilité que nous continuerons de soutenir », a affirmé M. Valls.

Par ailleurs, selon une confidence qu’une « source militaire française » a faites à l’AFP, il est possible que l’opération Barkhane soit amenée à « jouer un plus grand rôle pour contrer la menace » que Boko Haram fait peser sur le Niger et le Cameroun . « Il est possible que l’on apporte une appui, à leur demande, à des pays limitrophes de Boko Haram. Ce n’est pas encore écrit, ce sont des orientations », a-t-elle dit.

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