La Belgique aura-t-elle encore une défense dans 5 ans?

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Il y a quelques jours, la Belgique s’est payé une polémique sur le nom de la commission parlementaire chargée des affaires militaires, avec l’idée de supprimer le terme « nationale », accolé à celui de défense. Mais d’ici 5 ans, une structure existera-t-elle encore?

Depuis le 11 octobre, un nouveau gouvernement, emmené par le libéral Charles Michel, est entré en fonction, après un accord passé entre le parti libéral francophone MR et 3 autres formations néerlandophones, dont les nationalistes de la N-VA.

S’agissant de la défense, l’on pouvait penser que le nouvel exécutif belge allait mettre un terme aux restructurations et aux économies budgétaires qui ont lessivé ses militaires. D’ailleurs, l’accord gouvernemental prévoyait « de donner à l’armée les moyens de s’acquitter correctement de ses tâches », après avoir affirmé que, « sur le plan budgétaire, force est de constater que le budget de la Défense a très largement contribué au processur d’assainissement de nos finances publiques ces dernières années ». Et d’ajouter : « Le gouvernement tient à une armée déployable, efficace, rationalisée, moderne, bien entraînée et jeune ».

D’après l’agence Belga, un passage entre parenthèses dans l’accord non définitif (ce qui signifie qu’il était encore en cours de discussion) indiquait même que le gouvernement « ne réduira pas le budget (de la Défense) durant la législature ».

« Une armée moderne est une assurance stratégique et doit disposer d’un matériel moderne », affirmait encore le document, qui précisait également que le « gouvernement prendra une décision qui permettra à la Belgique de conserver pour le long terme une capacité de chasse et de bombardement en vue de la fin de vie annoncée du F-16 actuel et définira une orientation stratégique pour la succession des frégates M, des chasseurs de mines et d’autres systèmes d’armement tels que les drones et le matériel majeur de la composante Terre ».

Cette orientation était alors conforme aux engagements pris lors du dernier sommet de l’Otan, organisation sur laquelle la Belgique compte beaucoup. L’un deux stipulait, en effet, que les pays membres dont le budget militaire est inférieur à 2% de leur PIB devront cesser « toute diminution des dépenses de défense » et chercher les augmenter « en termes réels à mesure que croîtra leur PIB ».

De quoi redonner un peu de moral à une armée belge décrite comme étant « sur les rotules », selon l’expression utilisée en septembre par le général Marc Compernol, son numéro 2, après des années de disette budgétaire. « La limite est atteinte. (…) devons économiser nos moyens lors d’entraînements. Résultat: nos troupes sont moins bien préparées et leur sécurité lors des réelles opérations est compromise », avait-il expliqué. Et l’argent manque à la fois pour remplacer les matériels anciens et pour participer aux missions extérieures. C’est d’ailleurs pour cette raison que Bruxelles n’a pas fourni de troupes à la force européenne déployée en Centrafrique.

Deux ans plus tôt, une note confidentielle rédigée par des officiers d’état-major et diffusée par la presse d’outre-Quiévrain, tirait le signal d’alarme. « Certaines unités terrestres ont un niveau de puissance de feu qui les ramène à celui de l’époque de la guerre de Corée », y était-il écrit. « Quant au matériel, sa durée de vie « est souvent prolongée avec de la salive, de l’adhésif et du bricolage », déplorait le document, pour qui l’armée belge était « à la dérive ».

Seulement, les gouvernements passent et, malgré les bonnes intentions affichées en début de mandat, les mêmes ficelles sont utilisées. Malgré les réductions budégaires imposées à ses forces armées, la Belgique présente toujours des comptes publics dégradés. Le 14 novembre, l’agence de notation Fitch a revu les perspectives du pays à la baisse, pointant « le peu de progrès observé en matière d’assainissement budgétaire en 2014 » ainsi qu’une « évolution de la dette » et « des perspectives de croissance économique peu encourageantes ».

En outre, le gouvernement Michel a présenté un nouveau (énième) plan d’austérité, lequel a récemment donné lieu à des manifestations. Et, les militaires belges ne seront pas épargnés. Et « les moyens » qui leur ont été promis pour « s’acquitter correctement » de leurs « tâches » seront réduits de 1,5 milliard d’euros sur 5 ans. Ce qui représente une baisse du budget belge de la Défense de 9%. Ce dernier représentera, en 2019, seulement 0,5% du PIB.

Ce chiffre a été confirmé par le ministre belge de la Défense, Steven Vandeput, qui est aussi celui de la Fonction publique (sic!). Bien évidemment, cela impliquera des réductions supplémentaires d’effectifs (il resterait entre 20.000 et 27.000 militaires en Belgique) ainsi que de nouvelles fermetures de casernes et de bases.

Le ministre a indiqué, le 17 novembre, qu’il annoncerait son plan dans 6 mois, sur « la base d’une vision stratégique à long terme ». Mais peut-on encore sérieusement parler de « vision stratégique » quand on en arrive à ce niveau?

« Nous allons essayer de protéger notre personnel, personne ne devra démissionner, et nous allons payer nos gens. Mais d’autres facteurs du budget, comme l’entraînement et les opérations seront soumis à des coupures d’une vingtaine de pour-cent », a expliqué le général  Van Caelenberge, le chef de la Défense, lors d’un entretien donné à la RTBF. « Cela veut dire qu’il faudra faire des choix très pénibles. 20%, c’est un sur cinq. Cela veut donc dire qu’un avion sur cinq, un pilote sur cinq ne volera plus, un navire sur cinq ne naviguera pas, une compagnie sur cinq n’ira pas en exercice », a-t-il ajouté.

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